La mobilisation enseignante pourrait être moins forte pour cette 5ème journée de grève nationale contre la réforme des retraites. L’annonce ministérielle d’une revalorisation à hauteur de 500 millions en 2021 n’a pourtant pas modifié les attentes d’enseignants qui veulent une revalorisation immédiate et ne croient plus dans les promesses. Le report de l’âge pivot ne semble pas non plus avoir eu une grosse influence sur les enseignants. Les attentes coté retraite restent les mêmes. Mais le rejet de la réforme du bac, avec les E3C, offre un exutoire à la colère enseignante.
Les enseignants sont parmi les professions les plus mobilisées contre la réforme des retraites. Après une mobilisation exceptionnelle le 5 décembre, une baisse le 10 décembre, un nouveau pic le 17 décembre puis une mobilisation forte le 9 janvier avec un enseignant sur deux en grève, la cinquième journée de mobilisation aura du mal à rester au niveau des précédentes.
Les enseignants restent pourtant la profession qui a le plus à perdre de la réforme des retraites. Leurs pensions devraient baisser fortement par l’application de la réforme gouvernementale. En plus le ministre exige une transformation du métier en échange d’une éventuelle revalorisation. Pour les enseignants, la réforme gouvernementale aurait des conséquences particulièrement fortes et à long terme.
Qu’est ce qui a changé depuis le 9 janvier ? Le principal changement ne se voit pas : c’est le relatif silence ministériel. Dans la semaine précédant le 9 janvier , le ministre de l’éducation nationale a beaucoup promis et beaucoup tenté de convaincre les enseignants des horizons délicieux qu’ils construisait pour eux. Depuis le 9 janvier, JM BLanquer a nettement moins occupé les médias. Il a davantage écouté les syndicats. Il semble avoir pris conscience du fait qu’il n’est plus audible par le monde enseignant.
Après le 9 janvier, le gouvernement a annoncé le report de l’age pivot à condition que les syndicats trouvent une solution d’équilibre des retraites sans prélever davantage de cotisations ni baisser le niveau des pensions. L’annonce a eu peu d’effet sur les enseignants qui sont mobilisés sur des questions plus graves encore que l’âge pivot. L’analyse de la Fsu et de la Cgt selon laquelle » ce projet est quasi strictement le même que celui présenté dans le rapport Delevoye, et est identique à celui que les citoyen·ne·s rejettent depuis des mois. La mise en scène d’une dissociation entre les économies de court terme (décidées par ordonnance) et le projet de loi en lui-même ne change rien, ni au fond, ni au calendrier de la réforme » semble largement admise.
Le seul événement qui les touche est l’ouverture de discussions avec les syndicats et l’annonce d’un budget de 500 millions en 2021 pour la revalorisation. Cela montre que pour une fois ils ont été écoutés. Mais cette somme semble bien faible par rapport à la décote des pensions et aux attentes de revalorisation. Surtout elle semble bien loin pour une profession qui veut des actes tout de suite.
En même temps la mobilisation contre la réforme des retraites est alimentée par celle contre la réforme du bac. Le mouvement de contestation des épreuves du controle continu prend de l’ampleur. Des professeurs des lycées rejettent l’inégalité entre les candidats qu’introduit la réforme et l’impréparation de la réforme sur le terrain. Depuis le 13 janvier on voit ce mouvement prendre de l’ampleur et se fondre avec celui des retraites. Le blocage de Nîmes a montré cette convergence des luttes. Depuis des blocages de rectorats ont eu lieu avec la participation d’autres professions. Dans deux lycées au moins les épreuves, qui doivent normalement commencer le 20, ont du être annulées. Des enseignants refusent de choisir des sujets et de surveiller les épreuves.
Si le taux de grévistes le 16 janvier risque d’être plus faible, c’est au profit d’un éventail plus large d’actions. Les enseignants ont aussi compris que le conflit allait être long. L’état d’esprit des enseignants n’est pas à l’apaisement.
F Jarraud