Deux décrets publiés au journal officiel du 21 novembre redéfinissent l’organisation territoriale de l’éducation nationale. Ils précisent les compétences des préfets de région académique qui deviennent les supérieurs hiérarchiques des recteurs académiques. Ceyux-ci ont deux années pour réorganiser les services académiques dans leur région, certaines compétences étant spécifiques aux recteurs de région académique. Enfin un second décret crée des « recteurs délégués à l’enseignement supérieur ». Ces textes font suite à la réforme territoriale décidée par la loi Blanquer.
L’application de la loi Blanquer
« Ce projet de texte a pour objet de renforcer l’administration régionale des ministères chargés de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, aux fins de mieux clarifier les politiques régionales en matière d’éducation, d’enseignement supérieur et de recherche, d’améliorer la coordination avec les autres services régionaux de l’Etat et la collectivité régionale, et enfin de favoriser la coordination des politiques éducatives exercées au niveau académique. A cet égard, le rôle et les attributions du recteur de région académique sont significativement renforcés », explique le rapport adressé au président de la République annexé au premier décret.
Conformément aux arbitrages décidés au Parlement lors du vote de la loi Blanquer, le ministre ne supprime pas les recteurs d’académie et les académies. Mais il les chapeaute par des recteurs de région académique qui deviennent leurs supérieurs et sont dotés de compétences spécifiques. Ces recteurs deviennent les seuls interlocuteurs des autorités régionales.
Des super recteurs
Le décret précise : » Dans les régions académiques comportant plusieurs académies, le recteur de région académique a autorité sur les recteurs d’académie. Les décisions de ces derniers s’inscrivent dans les orientations stratégiques définies par le recteur de région. L’autorité du recteur de région sur les recteurs d’académie ne peut être déléguée. Le recteur de région académique peut évoquer, par arrêté publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de région, et pour une durée limitée, tout ou partie d’une compétence d’un ou des recteurs d’académie de la région, à des fins de coordination régionale »
Le recteur de région académique » fixe les orientations stratégiques des politiques de la région académique pour l’ensemble des compétences relevant des ministres chargés de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Dans les régions comportant plusieurs académies, il organise les modalités de l’action commune des recteurs d’académie et assure la coordination des politiques académiques. A cet effet, des services régionaux, des services interacadémiques et des services interrégionaux peuvent être créés dans les conditions prévues à la section 3 du présent chapitre. Dans les régions comportant plusieurs académies, le recteur de région académique préside un comité régional académique, qui réunit les recteurs d’académie de la région ».
Ce recteur de région académique a des compétences propres définies dans l’article 6 : schéma des formations, formation professionnelle, enseignement supérieur à l’exception de la gestion des personnels, orientation et décrochage « à l’exception des procédures d’orientation et d’affectation des élèves du 2d degré », numérique éducatif, fonds européens ».
Mais son autorité s’exerce aussi dans les autres domaines. » Pour toute question autre que celles relevant de ses attributions, le recteur de région académique peut proposer la mise en place de politiques communes au niveau régional et, à cet effet, la création d’un service régional chargé des missions concernées. Le service régional est créé sur proposition du recteur de région académique, après avis du comité régional académique prévu à l’article R. 222-16″.
La réorganisation des services lancée pour 2 années
Ainsi le décret lance la procédure de réorganisation des services régionaux d’éducation. Selon le texte les recteurs de région académique ont deux années, jusqu’en 2022, pour arrêter cette réorganisation que les textes précédents prévoyaient sur seulement une année. Dans chaque académie la réorganisation des services entre les différentes académies, qui affecte la vie quotidienne et le nombre des agents, va faire l’objet d’une réorganisation qui ne manquera pas de susciter inquiétudes et conflits. C’est l’avenir des anciennes académies qui va se décider également tant l’éducation nationale peut peser lourd sur le développement local.
Un second décret prévoit la création d’un nouveau type de recteur : les recteurs délégués pour l’enseignement supérieur. On a ainsi trois types de recteurs : les recteurs de région académique, vrais patrons dans les nouvelles régions, des recteurs d’académie maintenus mais dont l’autonomie est limitée puisque les BOP qui leur restent peuvent passer sous controle d’une gestion inter académique et des recteurs délégués à l’enseignement supérieur sous autorité directe du recteur de région académique.
Ainsi s’achève la réorganisation territoriale voulue par le ministre. Elle aligne l’organisation de l’éducation nationale sur le découpage des nouvelles régions, découpage pourtant fort criticable. Sous couvert de rentabilité elle lance une réorganisation des services qui pourrait déboucher sur des suppressions d’emplois administratifs. La vision très hiérarchique du ministre va aboutir à des politiques régionales spécifiques qui vont un peu plus détruire la dimension nationale de l’éducation.
F Jarraud