La mise en œuvre des nouveaux programmes de français suscite chez les enseignant.es beaucoup d’interrogations et d’inquiétudes. Le site Lettres de l’académie de Rouen propose un document bienvenu, produit par l’inspection pédagogique régionale, pour « répondre aux questions soulevées par les programmes. ». Peut-on choisir librement les œuvres à lire ? Qu’est-ce qu’un « parcours » ? En première, peut-on choisir des auteurs d’un autre siècle que ceux de la période historique imposée par l’objet d’étude pour constituer le parcours associé ou la lecture cursive ? Quelle place pour la littérature étrangère ? Quelle œuvre pour la seconde partie de l’oral du bac ? Comment parvenir à étudier 4 œuvres intégrales dans l’année ? Quelles modalités pour la lecture des textes ? Quelle longueur pour les textes étudiés ? Sur quel programme de grammaire les élèves de première de cette session 2019-2020 seront-ils interrogés ? Doivent-ils d’ores et déjà maîtriser le programme des deux années de seconde et première ? … Voici, en vrac, d’autres questions, collectées çà et là sur des forums et des listes de discussion, auxquelles les réponses apportées, lorsque réponses il y a eu, ont pu varier d’une académie à une autre…
Lors de l’entretien, les élèves pourront-ils disposer de l’œuvre présentée ? Leur sera-t-il interdit d’y présenter leur éventuel carnet de lecture pour témoigner de leur engagement dans le travail ? Ce carnet de lecture, censé favoriser l’émergence du sujet lecteur et accueillir les écrits d’appropriation, doit-il être détourné de ses finalités pour devenir un support de préparation à la dissertation, comme cela a été dit dans certaines réunions académiques ? L’entretien ne devra-t-il porter que sur l’œuvre présentée ou des élargissements sont-ils envisageables ? Peut-on avoir des exemples de questions de grammaire pour l’oral ? Les questions de grammaire se limiteront-elles à de l’étiquetage ? En ce cas, la réponse peut-elle vraiment tenir les 2 minutes réglementaires ? N’est-ce pas alors « perdre son temps » que de travailler la grammaire en lien avec l’étude de texte vu la lourdeur d’ensemble du programme ? Faudra-t-il sanctionner les élèves qui à l’oral feraient une lecture non linéaire ? N’est-il pas aberrant de découper une vingtaine de lignes dans des textes dont l’enjeu est bien plus large ? Les élèves ne risquent-ils pas, stratégiquement, de ne lire qu’1 œuvre sur les 8 qu’ils sont censés lire : celle qu’ils présenteront à l’oral ?
Question que l’exemple de sujet zéro est loin de résoudre : quelle place pour les parcours associés dans des dissertations dont les sujets portent manifestement sur l’œuvre au programme ? La question sur le corpus ayant été supprimée dans une durée d’épreuve écrite maintenue à 4 heures, faut-il attendre que les dissertations et commentaires soient bien plus longs qu’auparavant ?
Comment amener les parents à acheter les 8 œuvres de 1ère et les 7 œuvres de 2nde ? La lourdeur des tâches (24 explications de textes en série générale + études transversales + histoire littéraire + grammaire + écritures d’appropriation + entraînement à l’écrit + entraînement à l’oral …) ne risque-t-elle pas de renforcer la dimension bachotage du français en 1ère ? Comment échapper à la « course contre la montre » ? Un document de formation, en ligne sur le site de l’académie de Nancy-Metz, préconise que l’on consacre « 25% du temps » de travail à l’enseignement de la langue, « soit 1h/ semaine ou 4X 1⁄4 d’heure à chaque heure de cours par exemple pour installer un rituel, ou 2 X 1⁄2 heure deux fois par semaine » : ces recommandations sont-elles officielles et nationales ? Aucun.e enseignant.e n’a de doute sur la qualité des œuvres imposées, mais, au vu du temps d’appropriation que chacune d’entre elles va demander, est-il raisonnable de penser que de telles exigences soient adaptées au niveau des élèves et puissent véritablement leur transmettre l’amour de la littérature ? Est-ce faire « confiance » aux enseignant.es que de leur imposer les œuvres à étudier ? Est-ce respecter les professeur.es de français que de changer leur programme par moitié chaque année ?
Liste non exhaustive.