Chaque année, je commence la rentrée en lançant un défi à mes élèves. J’ai depuis 4 ans une classe de CE1-CE2-CM1-CM2. Cette année, ils sont 30 ! Après avoir rédigé un journal, joué une pièce de théâtre devant les parents, préparé un repas pour les parents, cette année, il m’a fallu trouver une nouvelle idée. Notre thème de l’année étant « les châteaux », je leur ai demandé de construire une maquette de château dans la journée.
Apprendre à coopérer
Nous avons commencé par regarder des photos de châteaux (Moyen-âge et Renaissance). Nous en avions déjà observé quelques-uns l’an dernier, donc ils se sont assez rapidement tournés vers Chambord, Villandry, Chenonceau et Clos Lucé. Chaque élève a choisi sur quel château il voulait travailler. La contrainte était d’avoir au moins un élève de chaque niveau dans chaque groupe. Une fois les groupes constitués, ils se sont répartis dans la classe et dans la salle d’à coté.
Ils ont observé des dépliants avec des photos. Ils ont cherché d’autres photos sur internet. Tout le monde était au travail ! Ensuite, c’est devenu une sorte de fourmilière… Dans tous les sens, ça coupe, ça colle, ça colorie… Ils sont partis bille en tête.
L’heure de la récré arrive. Celle de faire le bilan au retour aussi. Qu’est-ce qui a posé problème dans votre groupe ? Que pouvez-vous faire pour résoudre ce problème ?
Certains parlent des « petits ciseaux qui font mal aux mains quand on coupe le carton ». Ok, on prendra les grands ciseaux de la maîtresse, en faisant attention. Très vite, les CM pointent le manque de communication dans leur groupe. « Si on ne se parle pas, chacun fait ce qu’il veut mais on ne sait pas ce que font les autres. Le manque de communication nous empêche d’avancer ensemble. » Là, c’est le moment où la maîtresse jubile intérieurement !
On se met donc d’accord tous, pour discuter avant de découper, coller…. pour savoir ce qu’on veut faire, comment on va le faire etc.
Apprendre les règles
Arrive la fin de la journée et les maquettes ne sont pas terminées ! Bon, pas grave, on y consacrera deux après-midis de plus et ça marchera.
Jeudi après-midi : on se rappelle ensemble que la communication est indispensable avant de se répartir dans les groupes. J’avoue, j’ai deux AVS et une ATSEM. On prend chacune un groupe pour aider à fluidifier la communication. Mes dix CE1 qui débarquent dans la classe et qui n’ont jamais travaillé en Pédagogie Freinet sont un peu perdus. Qu’est-ce qu’elle veut cette maîtresse? On se déplace, on va aux toilettes, on bouge, on discute… elle veut bien tout ? Bah non, la maîtresse n’accepte pas tout : on ne peut pas coller du carton sur le nez du voisin ni casser une paire de ciseaux. Petit à petit, des règles se mettent en place. On se respecte et on respecte le matériel. C’est essentiel.
Du plaisir au travail
Jeudi soir : On fait le tour des salles pour aller voir les maquettes de chaque groupe. Bilan : « Maîtresse, il vaudrait mieux faire les maquettes demain toute la journée parce qu’on a bien avancé, mais il nous reste beaucoup de travail quand même ! Si on a fini avant 16h30 demain, ben on travaillera. » Décision collective de terminer les maquettes toute la journée vendredi : c’est bon ça !
Vendredi : Dès 9h, on se fait un petit point pour savoir où en est chaque groupe, ce qu’il reste à faire. C’est parti… jusqu’à 16h15 ! Toute la journée, ils ont coupé, collé, mesuré, peint, testé, tâtonné, fait, défait, refait…. Ils n’ont pas voulu sortir en récré l’après-midi pour être sûrs de terminer les maquettes. Résultat : époustouflant !
J’ai été un peu optimiste en voulant faire ce défi en une journée. Mais on a réussi en 2 jours 1/2. C’était vraiment beau ! Tous étaient au travail, chacun à leur mesure. C’est boostant et motivant. Quelle année incroyable on va passer ensemble !
Karine Fallourd
Pour aller plus loin
1) Le TATEX (TATonnement EXpérimental)
Une question :
Comment faire en sorte pour que tous les apprentissages soient vécus comme des défis à relever ?
Retrouvez tous les mercredis La Classe Plaisir !