Présenté le 18 février aux syndicats, le projet de loi sur les instances de dialogue social dans la Fonction publique est jugé inacceptable par la Fsu. La fédération avait quitté le Conseil commun de la Fonction publique avec 7 autres organisations le 13 février.
Adieu l’égalité de traitement
Selon la Fsu, le projet de loi » supprimerait la quasi totalité des compétences des commissions paritaires et permettrait une diminution du nombre des CHSCT (comités hygiène, sécurité, conditions de travail) en les fusionnant avec les CT (comités techniques). Les CAP ne seraient plus consultées sur aucun acte de gestion et ne seraient même plus des instances de recours pour les mouvement des personnels et les promotions ».
Dans cette situation, « les agent-es n’auraient plus de représentant-es pour les protéger de l’opacité, de l’arbitraire ou des erreurs de l’administration. Les possibilités de recours affichés sont un leurre car les agent-es n’auront aucune information pertinente pour se défendre. Cela donnerait une marge de manoeuvre inédite aux chefs de service, d’établissement ainsi qu’aux employeurs territoriaux ». Pour la Fsu, « c’est avec le principe d’égalité de traitement que le gouvernement veut en finir ».
Contourner les élus du personnel
Le syndicat dénonce aussi la disparition des CHSCT, un organe qui veille à la sécurité et la santé des salariés et qui de fait est souvent utile pour détecter les souffrances et les risques et faire respecter sur le terrain les règlements.
La FSU dénonce « la volonté gouvernementale de contourner les élu-es des personnels » en contradiction avec le statut de la Fonction publique. « Il s’agit aussi d’une remise en cause unilatérale par le gouvernement de plusieurs accords largement majoritaires lors de la dernière décennie (accords de Bercy en 2008, accord de 2009 sur la santé au travail, accord de 2012 sur les non titulaires, accord de 2013 sur les RPS) ».
Un plan gouvernemental lancé en mai 2018
Ce projet de loi n’arrive pas à l’improviste. En mai 2018, G Darmanin avait présenté aux syndicats le plan gouvernemental. Il s’agissait selon lui de « fluidifier les mobilités individuelles » et de revoir l’architecture actuelle par corps. Il envisageait plutot une gestion par catégorie (A, B ou C). Enfin il voulait mieux « prendre en compte la valeur professionnelle » des agents. Mais les « pistes d’évolution » contenues dans le document allaient très loin.
Ainsi pour la mobilité, le ministre proposait déjà de « supprimer toute compétence des CAP sur les actes de mobilité et mutation ainsi que pour les questions de disponibilité, détachement. Les CAP ne seraient plus consultées sur les promotions : elles recevraient juste « la liste des agents retenus par l’autorité de gestion ». Les CAP ne seraient plus compétentes sur les mesures individuelles favorables (titularisation).
Finalement, pour « remédier aux lourdeurs constatées par les employeurs en matière de gestion individuelle des ressources humains », le ministre proposait « la suppression éventuelle du paritarisme à l’exception des questions disciplinaires ». Encore cette consultation pourrait-elle être « dématérialisée » pour gagner du temps…
En fait les commissions paritaires matérialisent une philosophie des rapports sociaux basés sur des droits et une association à la gestion des représentants du personnel, telle qu’elle est garantie par le statut de la Fonction publique. Ce sont ces CAP qui donnent aussi aux syndicats leur force, notamment dans le système éducatif. Supprimer les CAP c’est aussi penser, ou en nourrir l’illusion, la suppression du syndicalisme dans l’appareil d’Etat.
Un mois plus tard, le 12 juin 2018, E Philippe présentait son plan au conseil des ministres avec trois volets : recrutement de contractuels, rémunération au mérite et fin du paritarisme. C’est celle-ci qui est protée dans le projet de loi.
La question de l’union…
La crise sociale que traverse le pays avait pu éloigner un temps ce plan gouvernemental. Soulagé par la baisse de pression des gilets jaunes, le gouvernement repart à l’assaut du statut des fonctionnaires (et aussi par suite de celui des professeurs du privé sous contrat).
La FSU va « proposer aux fédérations de fonctionnaires un plan d’action pour contrer ce projet ». Depuis 2018, les fédérations syndicales de fonctionnaires ont été souvent unies contre ces projets.
F Jarraud