« Il faut aller au delà des poncifs., trouver quelque chose ». Le souhait de la sénatrice F Laborde a sans doute été entendu. Après l’audition des syndicats de personnels de direction, la Commission de l’éducation du Sénat a reçu le 12 décembre Benjamin Moignard, directeur de l’Observatoire Universitaire International Education et Prévention, pour un échange sur la violence scolaire. Son intervention a permis de faire le point des recherches sur le sujet. Pour B Moignard, seul le travail collectif peut améliorer durablement le climat scolaire. Et cela passe par de nouvelles règles d’affectation des enseignants.
Les recettes du passé…
Des poncifs il y en a pourtant eu lors de cette audition du 12 décembre de la Commission de l’éducation du Sénat. Ainsi Jacques Grosperrin « s’interroge sur les travaux de sociologie qui ont tendance à excuser ». Pour lui, « il y a des enfants qui acquièrent des comportements et les font entrer dans l’école ». Et la stabilité des équipes pédagogiques c’est faire rester plus longtemps les enseignants dans les établissements. De l’autre coté de l’éventail politique, la sénatrice Ghali pense que « la violence est naturelle dans le quartiers. Il n’ya plus de bien et de mal. Les enfants vivent au milieu des armes alors il est normal qu’ils en amènent à l’école » comme à Créteil. Pour elle, « il faudrait faire comme dans le passé. Quand le comportement (de l’élève) n’était pas adéquat, la bourse diminuait ».
La France n’est pas laxiste, mais…
Benjamin Moignard va balayer ces discours convenus. Il rappelle qu’on en est au 14ème plan de lutte contre le décrochage et que donc « on est déjà largement équipé ».
La France se distingue aussi par un haut niveau de sanctions. Par exemple la moitié des collégiens sont collés dans l’année contre 25% en Angleterre et encore moins en Allemagne. Mais il y a des écarts énormes entre établissements : de 6 à 64% pour les exclusions de classe par exemple. Or « la routine des sanctions alimente le sentiment d’injustice des élèves » et contribue donc à la violence scolaire. « On est dans un système très punitif mais le problème c’est que ça ne marche pas ».
Un malaise enseignant profond
D’un autre coté les professeurs vivent dans un malaise déjà largement décrit par les chercheurs et que l’institution découvre seulement. « Les enseignants sont seuls. Les collectifs enseignants n’existent pas ». Ils ont un sentiment d’abandon d’autant plus fort qu’il y a de grandes inégalités de moyens entre établissements.
Il lie aussi cette question à celle des inégalités dans le système éducatif. « Le mieux doté des collèges de Seine Saint Denis est moins bien doté que le moins doté des collèges parisiens ». Les enseignants portent seuls la République et ils sont infantilisés par l’institution. B Moignard souligne le caractère inhumain de la gestion des relations humaines dans l’institution scolaire. Cela participe de la profonde méfiance envers la hiérarchie chez les enseignants français, un problème plus fort qu’ailleurs.
Comment stabiliser les équipes ?
Pour lui la clé c’est la stabilité des équipes éducatives. « Dans certains établissements il faut donner au chef d’établissement le droit d’affecter les enseignants », estime-t-il.
Une proposition qui devrait retenir l’attention du Sénat. La commission a déjà publié plusieurs rapports sur ces questions . Le dernier rapport recommandait pour « restaurer l’autorité des enseignants », que ceux-ci soient recrutés par le chef d’établissement. « Il faut une autorité sur les enseignants », affirmait le rapport. « Un enseignant a surtout des devoirs… Le jour où on sera plus exigeant avec les enseignants on aura d’autres résultats ».
Mais la nomination sur poste à profil a déjà été essayée et n’a pas marché en éducation prioritaire. A quelles conditions pourrait-elle fonctionner ? Il reste quelques semaines au Sénat pour y réfléchir.
F Jarraud
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