Le mouvement lycéen a pris une nouvelle ampleur lundi décembre. Après le galop d’essai du vendredi 30 novembre, ce sont plusieurs centaines de lycées qui ont été bloqués le 3 décembre. Une estimation ministérielle portant sur 7 académies seulement compte 118 établissements. L’UNL en revendique 350. Mais l’essentiel n’est pas là. Les cortèges lycéens ont été rejoints par des gilets jaunes et des agriculteurs. Une coordination qui prend une tournure inquiétante pour le gouvernement. Autre motif d’inquiétude : des violences ont eu lieu dans plusieurs villes. Le mouvement n’est pas prêt de s’arrêter.
Blanquer dépassé
« La contagion n’est pas une fatalité. Toutes les personnes raisonnables savent qu’il n’y a aucune raison que ce soit le cas ». Les propos de JM Blanquer sur LCI le 3 décembre ont semblé largement dépassés alors que des cortèges associant gilets jaunes et lycéens sillonnaient les rues de plusieurs villes. Le ministre de l’éducation nationale a tenté de minimiser le mouvement lycéen parlant d’une centaine de lycées touchés « un pourcentage très faible » et d’une « petite minorité » qui essaie de bloquer. Parlant du SGL, la première organisation lycéenne, il parle aussi d’un « groupuscule ». Toute cette communication n’a pas servi à grand chose. Non seulement le mouvement est monté en puissance tout au long de la journée. Mais l’UNL, le « groupuscule » appelant à manifester ce 3 décembre, a été reçu le soir même rue de Grenelle.
Environ 300 lycées bloqués
Le mouvement a pris une grande ampleur dans toutes les académies. Selon l’AFP, une quarantaine de lycées étaient bloqués dans l’académie de Toulouse, une vingtaine à Créteil et Bordeaux, une quinzaine sur Nancy-Metz, une dizaine à Marseille selon des chiffres officiels. Mais des mouvements ont eu lieu dans l’ouest, le centre, le Limousin et l’Auvergne, la Cote d’Azur (avec plus de 1000 manifestants à Nice), l’est , le sud ouest. On notera la faible participation de Paris. Le ministre explique que c’est le résultat d’interventions policières particulièrement efficaces. C’est peut-être aussi que le mouvement a un caractère plus populaire. Le mouvement avait déjà gagné des lycées professionnels et de périphérie le 30 novembre. Il a gardé ce caractère populaire et s’est amplifié. L’UNL revendique 350 lycées bloqués et 100 000 lycéens dans la rue dans un mouvement qui a une dimension nationale.
Des cortèges avec gilets jaunes et agriculteurs
Le plus important c’est que les lycéens ont associé à leurs cortèges des gilets jaunes. Ainsi à Vesoul et La Châtre (36), lycéens et gilets jaunes ont bloqué des carrefours. A Loches ils ont manifesté ensemble. A Limoges, des agriculteurs ont rejoint avec leurs tracteurs la manifestation des lycéens à laquelle participaient déjà des gilets jaunes. La contagion est belle et bien faite.
Incidents
Autre caractéristique de ces cortèges, des incidents ont eu lieu dans de nombreuses villes. A Aubervilliers un incendie de poubelle a dégénéré en mini émeute avec au moins un magasin pillé. A Toulouse les lycéens ont été chargés par la police et ont subi les gaz lacrymogènes. A Orléans la police a chargé aussi et au moins une voiture a été brulée.. A Dijon un policier a été blessé. A Bordeaux, Limoges, Pau des affrontements ont aussi eu lieu. A NIce la police a su gérer le cortège lycéens (particulièrement important) sans incidents mais au prix de la paralysie de l’agglomération (comme à Bordeaux ou Orléans d’ailleurs). Des interpellations ont eu lieu dans plusieurs villes (Toulouse, Bordeaux, Orléans etc.). La Seyne a connu une seconde journée d’affrontements avec la police. Une lycéenne a été blessée à Lyon. Des unions locales syndicales annoncent déjà « qu’elles ne laisseront pas matraquer les lycéens » (CGT Toulouse par exemple).
Nouvelles manifestations les 6 et 7 décembre
Le ministre le sait : il est toujours difficile de faire rentrer les lycéens une fois qu’ils sont sortis manifester. Le SGL appelle à manifester jeudi 6 décembre. L’UNL organise une manifestation le 7. Le mouvement va-t-il s’arrêter mardi et mercredi ? Certains établissements ont déjà annoncé un blocage pour plusieurs jours, comme Saint Sernin à Toulouse. Partout ces deux journées devraient voir le mouvement s’organiser à travers des assemblées générales. Et celles ci devraient essaimer vers d’autres établissements. En s’appuyant sur le mouvement de contestation générale et de plus en plus radicale qui balaie le pays, le mouvement lycéen a pris un élan que seules des mesures politiques peut arrêter.
François Jarraud