Si le climat a changé dans de nombreux établissements de l’éducation prioritaire, si les enseignants s’y sentent davantage accompagnés, avec des temps de formation et une reconnaissance du travail d’équipe, on le doit à Marc Bablet. Responsable à la Dgesco de l’éducation prioritaire sous trois ministres, il a impulsé sa réforme qui a des effets sensibles sur le terrain, même si tout cela est très récent. Parti en retraite cet été, Marc Bablet prend sa plume et explique sur son blog pourquoi il a pris la tangente avant l’heure.
« Il y a des moments où il vaut mieux savoir ne pas faire une année de trop que l’on risquerait de regretter, tant on pourrait être amené à se voir mis en contradiction ou pour le moins en contrariété avec ce que l’on a porté avec enthousiasme principalement dans les terrains dits « défavorisés » », dit d’emblée M Bablet.
» Et pourquoi partir maintenant du ministère ? Disons le avec simplicité, c’est sans doute d’abord par manque de courage : manque de courage pour voir détricoter ce qu’avec mon équipe nous avons patiemment élaboré, manque de courage pour dire franchement qu’il est insupportable de se sentir devenu inutile, manque de courage pour voir qu’une fois de plus ce qui est dit « prioritaire » n’est pas si prioritaire que cela dans le pilotage réel quotidien du système éducatif ».
Marc Bablet rappelle la satisfaction qu’il a eu de travailler avec trois ministres, de V Peillon à N Vallaud Belkacem, qui lui ont donné du temps pour construire son projet. Et il pointe du doigt en opposition « le populisme » qui sévit rue de GRenelle sous JM Blanquer.
« On ne peut être que scandalisé par la manière dont on cherche en ce moment à remplacer dans des séminaires d’IEN de ce mois de septembre un Roland Goigoux qui est une vraie référence en matière de lecture par Franck Ramus qui, à ma connaissance n’a guère travaillé dans les classes et qui, s’il connaît le cerveau, ne connaît pas l’enseignement », poursuit-il. « Or, j’y reviendrai, pour travailler utilement pour les apprentissages en milieu populaire, il ne suffit pas de connaître en laboratoire les apprentissages, il faut connaître les conditions scolaires de leur réalisation. Car les enseignants sont chargés de faire apprendre leurs élèves à l’école pas en laboratoire sous un scanner ».
« Il est décisif que nous ayons à cœur de porter, contre ces dominations médiatiques de plus en plus marquées par le populisme, des idées construites, argumentées, sujettes à débats contradictoires. La pensée éducative, pour être une pensée, doit se construire dans la contradiction rationnelle sur la base de données solides, reproductibles, critiquables, ce que n’est pas la bouillie pour les chats que l’on nous livre trop fréquemment avec en prime un air d’assurance ».