Comment faire travailler les lycéens avec le langage Python ? Quels sont les outils pédagogiques existants pour initier au codage ? Maryline Querry, enseignante de mathématiques au lycée Jean-Baptiste Le Taillandier à Fougères (35), utilise le langage Python en seconde et en première. Entre tableaux de valeurs, tracés de fonction, créations de fractales et productions d’œuvres d’art aléatoires en lien avec les occurrences d’un texte littéraire, les réalisations des lycéens se font dans un cadre qui laisse « une place importante à l’autonomie et la collaboration ». Pour Maryline Querry, « l’enseignant doit être très vigilant avec ces élèves geeks : il doit toujours leur laisser leur créativité et leur autonomie afin de leur permettre de progresser avec plaisir ».
Quels usages faites-vous du langage python en classe ? Pour quel public ?
J’utilise le langage Python en classe de seconde, enseignement d’exploration Informatique et Création Numérique et en classe de première ES, L et S, option facultative Informatique et Création Numérique.
En seconde, nous faisons une découverte et initiation au langage Python après avoir créé un jeu vidéo avec Scratch. En première, suivant le niveau de compétence initiale, nous partons sur une initiation puis la réalisation de projets pour découvrir les fonctions, les listes, les dictionnaires et différentes bibliothèques.
Quels sont les outils pédagogiques que vous conseillez pour coder en python avec des lycéens ? Quelle est la démarche à privilégier ?
En ligne, je conseille le jeu « code combat » pour apprendre le code. Le site « codecademy » donne les bases et offre des activités en ayant l’interpréteur intégré. Il existe aussi « Trinket » qui est un interpréteur en ligne et permet le partage.
En téléchargement, le logiciel recommandé qui peut s’installer en local reste Edupython.
Je pense qu’il faut essayer de développer la pensée algorithmique en lien avec la créativité, la curiosité, l’autonomie, l’entraide et la collaboration dans une démarche de projet. La collaboration élève-élève mais aussi élève-enseignant est indispensable dans le numérique. Il est impossible de tout savoir, tout maîtriser.
Les enseignants sont-ils demandeurs de formation pour ce type d’enseignement ?
Oui, très clairement. Avec la réforme du lycée, des établissements demandent des journées de formation pour les enseignants de mathématiques. Le langage Python devient un incontournable des programmes de mathématiques du nouveau lycée. De nombreux enseignants découvrent ce langage et souhaitent une réflexion sur l’algorithmique en général.
Quelles sont les productions réalisées au cours de l’année par vos lycéens ?
Les productions des élèves sont variables et en fonction des compétences de chacun. Cependant, un socle de connaissances minimales doit être atteint par chacun. L’autonomie et la collaboration permettent d’y parvenir.
Voici des exemples de créations mathématiques et artistiques :
• Tableau de valeurs et tracé de fonction,
• Dichotomie,
• Création de formes géométriques, de fractales, de spirales …
• Production d’une œuvre d’art aléatoire en lien avec les occurrences d’un texte littéraire.
Quels sont les avantages du langage Python ? Et les autres langages ?
Les avantages du langage Python sont d’abord le haut niveau donc plus de facilité d’utilisation, son caractère de logiciel open source, gratuit et son fonctionnement sous Windows, Linux, MacOS, Android, iOS etc. C’est aussi le fait que c’est un langage interprété : chaque ligne d’instruction envoyée est transcrite en langage machine au fur et à mesure de sa lecture. Il existe de nombreuses bibliothèques et extensions développées par des programmeurs. Enfin il est couramment utilisé notamment dans l’enseignement supérieur.
Pour avoir une ouverture concrète et pratique sur le codage, je leur fais aussi découvrir les langages du web : CSS, HTML et JavaScript notamment en créant des sites web utilisant le CMS très utilisé : WordPress.
En codage, qu’apporte un enseignant à un élève qui se forme principalement chez lui ?
Etre autodidacte, c’est parfait. Cependant, on est seul et on peut prendre de mauvaises habitudes notamment dans la syntaxe du langage utilisé. Un projet précis et abouti donné par l’enseignant impose un cadre et des contraintes auxquels l’élève est obligé de se confronter. Cependant, l’enseignant doit être très vigilant avec ces élèves « geeks » : il doit toujours leur laisser leur créativité et leur autonomie afin de leur permettre de progresser avec plaisir.
De plus, la pensée algorithmique ne se limite pas à un langage et notre objectif d’enseignant est de les ouvrir à d’autres langages ou codes. A contrario, le codage ne doit pas s’apprendre qu’à l’école : il faut un juste équilibre et une continuité entre les apports scolaires et les découvertes personnelles. La cassure classe et hors classe doit absolument être évitée.
Quelles sont vos attentes vis-à-vis de l’enseignement du numérique pour le nouveau lycée ?
Que tout le monde s’y mette de manière raisonnée et raisonnable, enseignants comme élèves.
Trop de collègues ont encore peur du numérique et ne se croient pas capables, mais c’est faux. L’inconnu est stressant mais je suis convaincue que se former et s’aider entre pairs peut pallier ce problème. C’est pour quoi j’ai vraiment à cœur ma mission d’animatrice Tice auprès de la DDEC35 qui me permet de partager mes compétences numériques et ainsi d’apporter mon soutien à mes collègues.
Trop d’élèves croient maîtriser le numérique, se mettent « en danger » et ne respectent pas la loi. Notre rôle d’enseignant est de le former afin qu’ils deviennent des utilisateurs raisonnables et cela passe aussi par la découverte de la pensée algorithmique et du code utilisé.
Entretien par Julien Cabioch
Liens conseillés par Maryline Querry :
Lien algorithmique collège-lycée
Dans le Café