Recenser les innovations pédagogiques, faire une plateforme, récompenser les enseignants innovants: Cédric Villani recycle dans son rapport sur l’intelligence artificielle les idées portées par le ministère depuis 2010 avec le résultat que l’on connait..
C’est le second rapport Villani en quelques semaines. Cédric Villani a publié le 28 mars sur un site spécial son rapport sur l’intelligence artificielle. L’essentiel du rapport concerne les déclinaisons de l’intelligence artificielle dans le monde économique et le soutien que l’Etat pourrait lui apporter. Quelques pages concernent l’Ecole. C Villani y défend des thèses souvent entendues depuis 2010.
» La seule focalisation sur les compétences cognitives générales a souvent conduit à sacrifier l’apprentissage d’une autre qualité qui devient encore plus essentielle aujourd’hui et qui peut même figurer comme la compétence matricielle dans un monde en perpétuelle évolution : la créativité. C’est pour cette raison qu’il ne sera pas possible de faire l’économie d’une transformation du système éducatif français qui mette en avant l’exigence de l’apprentissage de la créativité », prévient C Villani. Pour lui cela suppose « une modification profonde des modes d’enseignement… pour des pédagogies orientées davantage vers le développement de l’esprit critique et de la coopération ».
« Le premier objectif est de mettre en valeur et en réseau ceux qui mettent en place des pratiques pédagogiques innovantes et orientées vers l’apprentissage de la créativité. Créer une plateforme de mise en valeur des porteurs de pédagogies innovantes. Elle pourrait être le support d’une bibliothèque des pédagogies innovantes avec une explication pour chaque pratique et les règles pour les mettre en place ; de l’indexation de l’ensemble des projets pédagogiques innovants qui ont été mis en place au sein de l’éducation nationale…, de la mise en valeur des personnes et des établissements qui portent ces pratiques innovantes ». C Villani évoque des décharges attribuées aux enseignants innovants. Toute cette administration devrait être interministérielle (éducation nationale, recherche , travail).
Or tout cela c’est ce qui est déjà pratiqué depuis 2010 par le ministère de l’éducation nationale. C’est l’application des vieilles recettes administratives à l’innovation. Yves Reuter a démontré en son temps les impasses de cette situation. Créer une administration ministérielle de l’innovation aboutit à stériliser l’innovation, en l’encadrant et en la faisant labelliser par une administration. Qui oserait dire que la création d’un Conseil de l’innovation, en 2013, a fait avancer l’Ecole et aidé les enseignants ?
Derrière la grande bibliothèque des innovations, il y a l’idée de « bonnes pratiques » duplicables et labellisées alors que le propre de l’innovation c’est d’apporter une solution nouvelle dans un contexte précis. L’innovation est par nature rarement reproductible. Ce dont l’Education nationale a besoin ce n’est pas de davantage d’administration mais de libérer l’esprit d’innovation. L’esprit d’innovation vaut beaucoup plus que la somme des innovations. C’est du moins ce que le Forum des enseignants innovants essaie de défendre depuis 10 an…