Le collège Fernand Puech, seul collège public du centre-ville de Laval (Mayenne), ne fermera pas l’an prochain. Il restera ouvert jusqu’à son déménagement dans de nouveaux bâtiments, plus grands et plus modernes, que le département va construire à l’horizon 2024. Pour les parents mobilisés depuis dix huit mois – dont le Café avait parlé -, c’est une belle leçon de démocratie citoyenne, la preuve que l’on peut encore se faire entendre.
Le collège Fernand Puech était promis à une fermeture rapide. Lorsque le président du Conseil départemental, le centriste Olivier Richefou, l’avait annoncé à la surprise générale en avril 2016, il parlait même d’une décision » irrévocable » avec fermeture à la rentrée 2017… D’après lui, le collège nécessitait de coûteux travaux de réhabilitation, notamment pour l’accessibilité des personnes à mobilité réduite. Or, avec moins de 300 élèves, il perdait des effectifs alors que les autres collèges publics de la ville avaient, eux, des places vacantes. Mieux valait donc répartir les élèves de Puech dans les autres établissements.
Immaculée Conception
Sonnés par la nouvelle, les parents de Puech s’étaient très vite ressaisis. Pour eux, il n’y avait pas de raison de fermer le collège. Dans ce petit établissement comptant trois classes par niveau, leurs enfants étaient bien encadrés, les rapports faciles avec les profs, l’ambiance humaine. Et le niveau aussi bon qu’ailleurs.
En plus, Puech fermé, il n’y aurait plus de collège public dans le centre où trône déjà l’imposante cité scolaire de » l’Immac » ( pour l’Immaculée Conception). » Nous n’avons rien contre l’enseignement privé mais encore faut-il qu’il y ait un choix « , clament alors les parents.
Réseaux sociaux
La réplique s’est alors très vite organisée, sur un mode paisible et bon enfant mais aussi méthodique et tenace. Les parents ont notamment exigé, et obtenu, de participer au comité de pilotage sur l’avenir du collège au côté des élus municipaux et des acteurs locaux.
Contestant les études sur les travaux brandies par le département, ils en ont commandé d’autres, avec d’autres conclusions. Ainsi que des études prospectives sur la démographie collégienne, démentant les pronostics d’une chute continue.
Sur le terrain, l’Association des parents et amis du collège public Fernard Puech a battu la campagne – pétition, rassemblements, tractages… Là encore, rien d’agressif mais des idées et de la persévérance. Le dernier rassemblement, le 21 novembre, a réuni autant de monde qu’aux premières heures.
Mais c’est sur internet, que la campagne s’est focalisée. Une page Facebook régulièrement alimentée, un compte Twitter publiant chaque jour le portrait d’une personne posant avec le logo » Nous aimons le collège Fernard Puech » entourant un coeur rouge (365 photos publiées à ce jour), des alertes envoyées sur les portables, un clip sur Youtube, 320 personnes abonnées à la liste de discussions…
Tête haute
Marc-Henri Pamiseux, l’un des porte parole du collectif, tire le bilan de cette mobilisation : » C’est une victoire même si nous demeurons vigilants. Notre collège reste ouvert. Il fermera quand le nouveau bâtiment sortira de terre, en 2024 normalement, à 400 mètres de l’actuel. Depuis 18 mois, au comité de pilotage, on discutait des travaux à venir. On était même arrivé à un point de consensus sur le chiffre de 900 000 euros pour l’accessibilité.
Aujourd’hui, le département veut construire un collège neuf pour 500 élèves, pour un coût de 7 millions d’euros. Peut-être est-ce une façon pour lui de sortir la tête haute. En tout cas, on ne va pas s’en plaindre. Au conseil départemental, ils sont même très fiers aujourd’hui : ce sera le premier collège public construit en Mayenne depuis 1995. «
Petit peuple
Marc-Henri Pamiseux s’enthousiasme lorsqu’il évoque l’exercice citoyen : » Nous nous sommes battus argument contre argument. Nos études ont montré que le centre-ville repartait, que l’activité allait croissant, que le collège était en phase de renaissance. Notre participation à ce comité, que certains contestaient dans notre collectif estimant que ça ne servirait à rien, a été constructive. Il faut dire aussi que l’attachement au collège public a beaucoup pesé dans la mobilisation. Il faut avoir le choix entre privé et public.
Cela a été une vraie expérience démocratique. On a échangé des arguments, réfléchi ensemble. Que les politiques puissent ainsi revenir sur leur avis, cela redonne un peu foi dans le système. On se dit enfin que ce sera profitable à l’éducation de nos enfants. Ils sauront : il ne faut pas se laisser faire, on a toujours le choix et ensemble, on peut encore se faire entendre, même nous le petit peuple. «
Véronique Soulé
Lire les origines de la polémique autour de la fermeture du collège Puech