« On ne peut pas se laisser plier ». Professeure d’histoire-géographie au collège Saint Exupéry de Perpignan, Nathalie Leverrier croit fort en un enseignement des valeurs républicaines au collège. Elle monte des projets pédagogiques où se mêlent la géographie, l’histoire, l’EMC et qui associent la professeure de français, d’arts plastiques ou la professeure documentaliste. Au final les élèves comprennent et agissent. Dans une région où l’extrême droite est particulièrement forte, Nathalie Leverrier ne baisse pas les bras.
Des images flottantes…
Au départ de cette rencontre avec Nathalie Leverrier une séquence présentée sur le site académique de Montpellier sur les « images flottantes ». Les collégiens y sont amenés à réagir aux réutilisations des mêmes images de migrants et aux messages qu’elles portent. C’est tout un travail de lecture des images qui est mené. La séquences relève-t-elle de la géographie ,de l’EMC, de l’EMI ? Montée avec Mme Mandrillen, la professeure documentaliste, elle est à cheval sur les disciplines et elle arrive après un cours d’histoire sur Voltaire précise N. Leverrier… Enfin elle participe d’un Epi avec les professeurs de français et technologie.
Montée après la participation à un séminaire national sur l’analyse d’images, il s’agit » de développer l’esprit d’observation et de critique des élèves à l’égard des images et dans un second temps d’apprendre à utiliser le numérique et de découvrir les pièges d’internet ».
A la découverte de ses racines migrantes…
Le site académique offre une autre séquence, toujours en 4ème, dans le cadre d’un projet franco allemand. « Nous sommes tous des immigrés » qui s’appuie sur l’histoire du camp de Rivesaltes tout proche. Les élèves doivent constituer un parcours de visite pour les correspondants allemands.
» Ce projet pluridisciplinaire vise à faire réfléchir les élèves sur ce qu’est « être un migrant » en partant de leur histoire familiale », dit N Leverrier. « Le but étant de partir à la recherche de leur propre identité, de la partager et de réfléchir à notre sentiment d’appartenance à la Nation, à nos valeurs partagées. Depuis quatre ans nous menons ce projet en variant nos approches mais l’esprit reste le même. A chaque fois nos élèves ont découvert leur histoire familiale (certains ont notamment appris que leurs ancêtres étaient des Républicains espagnols), ont fait la chasse aux idées reçues sur l’immigration. La rencontre avec des intervenants comme Nicole Mathieu de la CIMADE ou Anne Marie Delcamp, bénévole à l’association RESF (réseau d’éducation sans frontières), sont l’occasion pour les élèves de découvrir l’engagement de citoyens à travers le monde associatif, de comprendre le périple des migrants ».
A l’engagement citoyen
Tout ce travail mène à l’engagement des élèves. Dans le cadre de ce projet, ils ont créé une association, avec tout ce que cela implique de travail administratif puis de communication sur leur projet, pour collecter des fournitures scolaires pour les enfants migrants soutenus par RESF.
A Perpignan, le candidat Front national a réuni 41% des voix au second tour des législatives 2017. Mais pour N Leverrier la transmission des valeurs « c’est important » et « on ne peut pas se laisser plier. Il faut tenir ce discours sur la fraternité et les élèves le comprennent ».
La démarche est toujours éducative. « Je ne veux pas faire changer d’avis les élèves mais créer le doute. Je montre d’autres points de vue ». Créer le doute c’est exactement l’objectif de la séquence sur les « images flottantes ». « Les élèves ont appris à prendre du recul sur ce qui circule sur les réseaux sociaux, à gérer leurs émotions quand ils regardent une image ».
N Leverrier, elle, n’a pas de doute sur le métier d’enseignant. C’est transmettre des valeurs et les mettre en action dans son enseignement. Un métier d’éveilleur.
François Jarraud