Pendant que les groupes de travail se réunissent pour préparer la grande réforme de l’accès à l’enseignement supérieur, le ministère de l’enseignement supérieur présente son budget. On ne saurait mieux illustrer la soumission de la démocratisation de l’accès au supérieur aux impératifs budgétaires. Au final seulement 111 millions pourraient être mobilisés en 2018 pour accueillir le flux croissant des étudiants. En supposant que cette somme soit affectée à cet objectif, cela ne ferait que 10 000 places d’étudiants supplémentaires ou 8 000 places en BTS. On est très en dessous du nécessaire. A défaut de tirage au sort, le ministère sera bien obligé de sélectionner les étudiants.
Pour le ministère, « c’est un beau budget » qui « marque la priorité accordée à l’enseignement supérieur et à la recherche ». Et même pour la première fois un budget « responsable » où l’Etat respecterait tous ses engagements.
Le budget du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche s’établit à 24.5 milliards soit 707 millions de plus qu’en 2017. L’essentiel de la hausse va à la recherche (+501 millions), l’enseignement ne gagne que 194 millions.
Le ministère a trouvé une astuce pour gonfler ces sommes : ajouter une partie de la part de la réserve budgétaire, cette part du budget qui reste bloquée par Bercy. Selon le ministère, une partie serait débloquée ce qui ajoute du budget. Ainsi pour l’enseignement on passe de 194 à 234 millions avec cet artifice.
Cette somme permettra-t-elle de faire face à la crise de l’accès au supérieur où se pressent 40 000 jeunes supplémentaires au minimum et peut-être même 80 000 en prenant en compte les bacs professionnels qui renoncent à leurs ambitions ?
Il faut d’abord retirer de cette somme 113 millions qui correspondent à des engagements de l’Etat et à l’application du PPCR (63 millions). Le restant est à la disposition des établissements d’enseignement supérieur. Ils en font ce qu’ils veulent et ne vont pas forcément l’utiliser pour démocratiser l’accès au savoir.
En supposant que les 111 millions restants soient utilisés pour faire face à la crise de l’accès au supérieur, cela ne représente que 10 000 étudiants supplémentaires (un étudiant en université coute 10 390 euros par an) ou 8000 élèves de BTS (il coute 13 760 euros).
On est donc très loin du nécessaire. Pour avoir une réelle action sur la démocratisation de l’accès au supérieur il faudrait au moins 500 millions dont l’enseignement supérieur dispose mais qu’il préfère mettre sur la recherche et surtout la recherche opérationnelle avec les entreprises.
« Il faudra qu’on créé des postes en STS et en IUT », nous a-t-on dit au ministère. Ce sera sans doute fait. Mais dans un volume sans rapport avec l’exigence démocratique.
François Jarraud