Au moment où JM Blanquer et E Macron lancent le dédoublement en CP en Rep+, une étude de l’Institut des politiques publiques (Paris Shool of Economics) vient conforter cette démarche. Pour les auteurs, Adrien Bouguen, Julien Grenet et Marc Gurgand, l’impact de la réduction de la taille des classes sur les performances scolaires est avéré et cela même avec des enseignants pas formés à cette situation pédagogique. Enfin c’est une opération rentable.
Une publication qui tombe à pic
» Ces travaux montrent que le dédoublement d’une classe de 24 élèves améliore les performances moyennes des élèves de façon significative, et il est même possible d’en voir les effets à long terme sur les trajectoires scolaires et l’insertion professionnelle », affirment les auteurs.
Le choix des « 24 » élèves ne tient pas au hasard et la publication de cette note non plus. Elle arrive pile au moment où le ministre lance à cette rentrée le dédoublement des Cp en Rep+ avec l’objectif de classes de 12 élèves. En fait la plupart des études évoquées ne citent pas le nombre de 12 élèves par classe. C’est une simplification effectuée par les auteurs. Toutes les études ne portent pas non plus d’ailleurs sur le CP.
En fait le travail mené par les auteurs consiste à synthétiser les résultats de plusieurs enquêtes différentes où émergent par exemple l’enquête américaine Star, qui a une trentaine d’année, ou la thèse de Valdenaire et Piketty qui a une dizaine d’années.
L’effet des dédoublements
» Le dédoublement de la taille des classes (de 24 à 12 élèves par classe) conduirait, d’après les études recensées dans cette note, à une amélioration des performances scolaires comprise entre 20 % et 30 % d’un écart-type », expliquent les auteurs. Un tel effet est important : dans une classe de 24 élèves, il correspond pour l’élève médian à une progression de 2 à 3 rangs et il est d’un ordre de grandeur comparable à la moitié de l’écart de performance moyen que l’on observe à l’entrée en CP entre les enfants de PCS favorisées (cadres, professions intellectuelles supérieures) et les enfants de PCS défavorisées (ouvriers, personnes sans activité professionnelle). »
Mais ces études sur la réduction de la taille des classes portent sur des dispositifs pédagogiques très différents aussi bien en durée qu’en niveau. « En s’appuyant sur des données de suivi du programme américain STAR, Krueger et Whitmore (2001) montrent que les élèves qui ont été aléatoirement alloués aux petites classes à l’école primaire ont plus souvent passé les examens d’entrée à l’université et ont obtenu des notes plus élevées que les élèves affectés aux plus grandes classes », citent par exemple les auteurs. « Les effets de long terme de la taille des classes au collège sont plus incertains. Au Danemark, Browning et Heinesen (2007) trouvent des effets positifs des petites classes au collège sur la durée des études. En revanche, deux articles récents sur données norvégiennes (Falch et al., 2017 ; Leuven et Løkken, 2017) ne détectent pas d’effets significatifs de la taille des classes au collège sur le niveau d’études ou sur les revenus ».
Efficace même sans formation des enseignants ?
Les auteurs s’attaquent aussi à la question de la formation des enseignants à ce dédoublements. » On entend parfois que la réduction de la taille des classes ne serait efficace que si les enseignants ajustaient leurs pratiques pédagogiques pour en tirer profit, et qu’une telle politique n’est donc pertinente que si elle est accompagnée d’une formation des enseignants dans ce sens. Un tel énoncé n’a aucune base empirique. Les expériences et quasi-expériences utilisées dans la littérature présentée ci-dessus n’incluent aucune formation spécifique des enseignants, et pourtant elles produisent des gains importants sur les performances des élèves. Autrement dit, les travaux empiriques démontrent que la réduction de la taille des classes est efficace même si les enseignants ne sont pas spécifiquement accompagnés au plan pédagogique ».
Se pose alors la question du pourquoi. Et les auteurs ne peuvent apporter que des hypothèses. « Pourquoi ? Ce point est discuté en sciences de l’éducation, mais il semble que, même si les enseignants changent peu leurs pratiques lorsqu’ils enseignent dans de plus petites classes, on y observe plus d’engagement des élèves dans leurs tâches, moins de problèmes de discipline, plus de temps passé à l’enseignement ».
Reste quand même à évaluer l’effet d’une réduction de taille sur une année donnée immédiatement suivie du bourrage des classes sur les autres. Ou celui du découragement des équipes enseignantes qui s’étaient lancées dans le « plus de maitres que de classes ». On attend encore l’étude qui validera l’expérience lancée par JM Blanquer.
François Jarraud