« Bonheur d’une rentrée en musique avec les élèves de La Réunion ». Contrairement à ce qu’affirme son tweet du 17 août, Jean-Michel Blanquer a inauguré l’année scolaire par la fermeture des écoles décidée par les maires de La Réunion pour protester contre la première mesure budgétaire de l’année : la réduction du nombre des contrats aidés. L’événement pourrait bien symboliser l’année toute entière. C’est que si le gouvernement a déjà ordonné 4.3 milliards d’économies en 2017, celles ci devraient être 4 fois plus importantes en 2018. A peine ministre, Jean Michel Blanquer est invité à tenir les promesses du président tout en réduisant fortement les dépenses. Une année difficile s’annonce…
Comment l’Education nationale a perdu 80 millions…
» Je ne pensais pas que les chiffres seraient aussi mauvais ». Dans Le Parisien du 4 août, Edouard Philippe tente de justifier le tour de vis budgétaire qu’il vient de faire accepter par le Parlement. Le gouvernement se fixe comme objectif de ne pas dépasser un déficit public de 3% du PIB en 2017 puis 2.7% en 2018. Tout au long du mois de juillet, il multiplie les annonces : gel du point Fonction publique, journée de carence, « réflexion » sur le PPCR.
L’orientation budgétaire est traduite cet été en textes budgétaires défendus devant les assemblées. Pour 2017 cela se traduit par 4.3 milliards d’économies. Un décret publié le 21 juillet annule 3 milliards de crédits. L’armée perd 850 millions, l’écologie 200, l’enseignement supérieur 260, la sécurité 240, les affaires étrangères 160 auxquels s’ajoutent 140 millions d’aide au développement. Finalement l’Education nationale s’en tire pas trop mal avec « seulement » 82 millions de crédits annulés. Ce sont quand même les réserves pour mesures catégorielles qui s’évaporent…Un milliard est encore dégagé par d’autres mesures dont la réduction de l’APL.
20 milliards d’économies en 2018
Mais le gros de l’effort reste à venir. En 2018 le gouvernement veut à la fois ne pas dépasser 2.7% de déficit public et diminuer les prélèvements de plus de 10 milliards. Au total ce sont 20 milliards qui devront être économisés en 2018. Et ce n’est pas fini. Le rapport budgétaire du Sénat égrène la suite : 18 milliards d’économies en 2019, 21 en 2020, encore 14 en 2021. Au total 82 milliards seront économisés sur le quinquennat ramenant le taux de prélèvements obligatoires de 55 à 51% du PIB en 2022.
Comment atteindre ces objectifs ? Le gouvernement entend réduire la masse salariale de l’Etat. Il a déjà annoncé un gel du point Fonction publique. E Macron a évoqué le 17 juillet la suppression de ce point unique sur lequel sont indexés les salaires de toutes les fonctions publiques. Le gouvernement proposera plusieurs points ce qui devrait permettre de casser les indexations automatiques sur ce point. Il a décidé aussi le retour de la journée de carence (environ 200 millions d’économies).
L’inconnue du PPCR
Le 11 juillet G Darmanin a laissé entendre que la revalorisation liée aux accords PPCR serait reportée. Depuis il semble, selon les échanges au Sénat, que le gouvernement respecte la signature de l’Etat, sans qu’on en ait la certitude. Le « report » des accords PPCR ce serait une économie de 700 à 800 millions pour l’Éducation nationale. Ça voudrait dire que la revalorisation ferait une « pause » probablement définitive. Pour les enseignants, les deux revalorisations d’indices prévues pour le 1er septembre 2017 et le 1er janvier 2018 seraient annulées. Et probablement les suivantes, les 1er janvier 2019 et 2020. Par exemple, un certifié 4ème échelon devait passer à l’indice 529 au 1er septembre 2017 puis à 539 au 1er janvier 2018. Le 17 juillet, dans une lettre commune, la Cfdt, la Cgc, la Cftc, la Fa-Fp, la Fsu et l’Unsa ont demandé au premier ministre de maintenir ces accords.
L’équation impossible de JM Blanquer
Le gros des économies budgétaires devrait venir des suppressions d’emplois dans la fonction publique. E Macron en a promis 120 000 dont 50 000 pour la fonction publique d’Etat. E Philippe a bien promis , dans Le Parisien, « des orientations ambitieuses en faveur de l’Education nationale », on voit mal comment celle-ci, qui compte la moitié des emplois d’Etat, pourrait échapper à des dizaines de milliers de suppressions de postes.
Mais tout cela ne vas pas résoudre l’équation qui est posée à JM Blanquer pour 2018. Le ministre a promis le dédoublement des CP et Ce1 de l’éducation prioritaire en 2018 ce qui représente 9500 postes, soit 500 millions. Le PPCR représenterait environ 700 millions. Le dispositif « Devoirs faits » , qui devrait commencer à l’automne 2017, coute selon le ministre 150 millions. L’évolution normale des carrières des personnels, ce qu’on appelle le glissement vieillissement technicité, représente 300 millions de dépenses. Enfin la prime de 3000 € promise aux professeurs des Rep+ couterait 200 millions.
Voilà près de deux milliards de dépenses nouvelles qu’il va falloir caser dans un budget qui devra très probablement baisser. Quand on vous dit que l’année sera difficile…
François Jarraud
E Philippe Le Parisien le 4 aout