Comment enseigner à des classes à hétérogénéité croissante ? Michel Debarge, enseignant de mathématiques au lycée polyvalent Jules Fil de Carcassonne (11) s’est lancé en classe inversée suite au congrès Clic 2016. Après une année d’expérience en classe de seconde, son établissement va étendre l’expérimentation. Pour Michel Debarge, qui réalise ses propres capsules, cette méthode permet à chaque élève « d’écouter à son rythme et au moment qui lui convient le mieux ». Entretien avec cet enseignant qui fera son retour d’expérience au congrès Clicx 2017.
Pourquoi cette participation au congrès Clicx ? Que ferez-vous au congrès ?
J’ai participé au Clic2016 avant de me lancer moi même dans la classe inversée cette année. Lors de ce congrès, j’ai entendu à plusieurs reprises certains des intervenants souligner que les capsules vidéos n’étaient pas le point central de la classe inversée et qu’il valait mieux ne pas y consacrer trop de temps. J’ai aussi entendu qu’il valait mieux se satisfaire des vidéos déjà existantes sur internet. Je ne me sentais pas en accord avec ces propos. Et lorsque j’ai cherché des vidéos sur internet, je n’ai rien trouvé qui correspondait pas à ce que je recherchais et je ne voyais pas trop l’intérêt de juste se filmer en faisant un cours sur un tableau comme on le fait en classe. L’intérêt de la vidéo est pour moi de faire un produit mieux préparé et d’apporter une valeur ajoutée. Bien qu’il soit vrai que faire ses propres capsules soit chronophage, elles me permettent de retrouver le cœur de mon métier : expliquer au mieux aux élèves des notions de mathématiques.
J’ai décidé de participer au Clicx parce que je voulais partager ce point de vue à travers mon expérience. Au congrès j’expliquerai ma démarche pour faire des capsules. Sur un exemple, je montrerai la plus-value apportée par la vidéo, les conséquences sur l’organisation générale qui s’en est suivi et enfin je donnerai l’évaluation de cette classe inversée.
En quoi votre pratique de la classe inversée permet-elle une meilleure gestion de l’hétérogénéité d’un groupe ?
De part l’hétérogénéité croissante dans nos classes, il me paraît de plus en plus illusoire d’imaginer que tous les élèves d’une même classe puissent écouter les explications en même temps et au moment où le professeur décide de les donner. Les capsules vidéo permettent à chaque élève d’écouter à son rythme et au moment qui lui convient le mieux. Ceux qui comprennent tout de suite peuvent ensuite passer aux exercices d’application et d’approfondissement. Ceux qui ont besoin d’explications supplémentaires peuvent les avoir en revenant en classe. Il n’y a plus de problème liée à la vitesse trop rapide pour les uns ou trop lent pour les autres.
Comment s’est mise en place la pratique de la classe inversée dans votre lycée ? Quelles disciplines sont impliquées ? Quels sont les changements observés au bout d’un an ?
Je ne voulais pas faire ce changement pédagogique sans l’appui d’une équipe et de l’administration. J’ai discuté avec un collègue qui a tout de suite été partant. J’en ai parlé au proviseur et il était d’accord sur le principe. Nous avons donc lancé le projet en seconde pour une classe. D’autres collègues nous ont rejoints, les matières concernées étaient l’histoire-géo, la physique, le français, les SVT et les maths.
Une fois le projet lancé, une autre équipe s’est constituée au niveau du lycée professionnel. D’autres collègues sont prêts maintenant à se lancer dans cette pédagogie. Le proviseur souhaite étendre la classe inversée à d’autres niveaux. Les élèves ont gagné en autonomie et ont apprécié le travail de groupe qu’engendre la classe inversée. Quant aux parents, je n’ai pas eu de retours.
Quelle plateforme utilisez-vous ? Pouvez-vous nous décrire une semaine de cours avec des secondes en maths en classe inversée ?
J’utilise la plateforme Moodle sur l’ENT du lycée pour mettre les vidéos, les quiz et les exercices.
Il n’y a pas eu vraiment de semaine type. Des fois le chapitre commençait après qu’ils aient regardé la première vidéo. D’autre fois, il y avait une activité préparatoire en classe. Après avoir vu la vidéo, les élèves devaient répondre à un quiz de quelques questions. Une écoute correcte permettait de répondre à ces quiz. Une fois en classe je repassais la vidéo, les élèves me posaient des questions et ensemble on résumait ce qui était important de retenir pour faire une fiche. Ensuite, on passait à des exercices d’application, d’approfondissement ou des travaux de groupes.
Quand les élèves n’avaient pas de vidéos à regarder, je leur donnais un exercice à faire sur l’ENT pour qu’ils prennent l’habitude d’aller systématiquement sur l’ENT. Ce sont les vidéos qui m’ont demandé le plus de préparation. Pour les premières, j’ai passé un temps énorme parce que je ne maîtrisais pas encore les outils et je n’avais pas encore de procédure au point. Avec l’habitude c’est devenu beaucoup plus rapide. Néanmoins cette année, je n’ai pu traiter que la moitié des chapitres en mode inversé.
Les quiz étaient fait assez rapidement et les exercices m’ont demandé aussi beaucoup de travail, parce qu’il me fallait être réactif par rapport au travail fait en classe.
Quelles sont vos perspectives pédagogiques pour cette nouvelle année ?
Cette année mon objectif est de faire tout le programme en inversé. Je souhaite diversifier plus les exercices selon les niveaux des élèves et de passer sur la plateforme Wims qui m’offre plus de possibilités dans les exercices que je construis.
Entretien par Julien Cabioch
Dossiers dans le Café pédagogique