« Les inégalités de revenus progressent parce que les plus favorisés en veulent toujours plus », écrivent Anne Brunner, Louis Maurin et Nina Schmidt dans le Rapport sur les inégalités en France. » La lente diminution du niveau de vie des 10 % les moins favorisés (depuis 2008) constitue un retournement historique, un marqueur de notre histoire sociale. Que les riches s’enrichissent, c’est monnaie courante ; que les pauvres s’appauvrissent, cela change la donne. Ce choc nourrit une haine envers ceux qui continuent à profiter ».
Ils font le lien avec la question scolaire. » L’injustice scolaire nourrit une défiance vis-à-vis de l’institution, et cette défiance structure les rapports sociaux. Les enfants des milieux populaires savent que la compétition est faussée face aux initiés du système. Pas tant en raison de l’aide directe des parents favorisés à leurs enfants, mais du contexte dans lequel ils baignent (confort matériel, loisirs, langage, etc.) et de leur connaissance des rouages du système (exigences, orientation, etc.). L’ampleur de l’enjeu peut se lire dans l’omniprésence du débat scolaire dans la presse, dans la façon dont les dominants, bien organisés, bloquent toutes les évolutions du système éducatif, même les plus mineures, de la modernisation de l’orthographe à l’assouplissement de la notation, en passant par les langues anciennes. Il leur faut conserver leurs avantages à tout prix. Leur argumentaire est rôdé : chaque tentative pour remettre en cause leur position constitue une atteinte au niveau scolaire qui se ferait au détriment des masses ».