Peut-on lier le bien être à l’Ecole aux résultats scolaires des élèves ? Comment les enseignants peuvent-ils agir pour améliorer le bien-être et les performances des élèves ? Quelle organisation l’Ecole peut-elle se donner en ce sens ? A ces questions , PISA 2015 apporte des réponses intéressantes particulièrement pour l’école française.
Le bonheur ne suffit pas
Il est évidemment positif de voir qu’une grande majorité des élèves se sent heureux de vivre. C’est le cas en moyenne de 90% des jeunes. Ils situent en moyenne leur niveau de bonheur à un niveau 7.3 sur une échelle de 0 à 10.. On observe des écarts sensibles entre les pays :: 4% de jeunes malheureux aux Pays Bas contre 29% en Turquie par exemple et la France est bien située. Mais le bonheur ne suffit pas. PISA montre un lien faible entre ce sentiment de bonheur et la performance scolaire. Inversement, l’environnement scolaire a un impact sur le sentiment à l’égard de la vie des jeunes. Pour l’OCDE, » les enseignants peuvent jouer un rôle particulièrement important en créant les conditions propices au bien-être des élèves à l’école. Les élèves plus heureux font en général part de relations positives avec leurs enseignants. Selon les résultats de l’enquête PISA, les élèves des établissements « heureux » (ceux où le niveau de satisfaction des élèves à l’égard de la vie est supérieur à la moyenne nationale) indiquent ainsi recevoir davantage de soutien de la part de leur professeur de sciences que les élèves des établissements « malheureux ». En d’autres termes, le sentiment des élèves d’être soutenus par leurs enseignants semble être une caractéristique distinctive des établissements où les élèves font part d’un plus grand bien-être ».
Comment lutter contre l’anxiété ?
L’anxiété à l’école a un effet négatif sur les résultats, notamment d’après l’OCDE sur celles des filles. Selon Pisa l’anxiété n’a pas de lien avec la fréquence des évaluations. Mais elle est en lien avec les pratiques enseignantes. « Les élèves qui indiquent que leur professeur de sciences adapte son cours aux besoins et aux connaissances de la classe sont ainsi moins susceptibles de déclarer se sentir très angoissés pour un contrôle même s’ils sont bien préparés, ou être très tendus quand ils étudient pour un contrôle. Les élèves sont également moins susceptibles de se dire anxieux si leur professeur de sciences leur apporte une aide personnalisée quand ils ont des difficultés. À l’inverse, des relations négatives entre élèves et enseignants peuvent fragiliser la confiance des élèves et accroître leur anxiété. En moyenne, dans les pays de l’OCDE, les élèves sont ainsi environ 60 % plus susceptibles d’être très tendus quand ils étudient pour un contrôle, et environ 29 % plus susceptibles de se sentir très angoissés pour un contrôle même s’ils sont bien préparés, s’ils ont le sentiment que leur professeur pense qu’ils sont moins intelligents qu’ils ne le sont en réalité ».
Améliorer le sentiment d’appartenance
Les sentiment d’appartenance, un point très faible de l’Ecole française, est aussi en lien avec les performances. Les élèves déclarant se sentir comme des étrangers à l’école obtiennent un score en sciences inférieur de 22 points, en moyenne, à celui des élèves ne se disant pas dans ce cas. En France l’écart est encore plus fort. Or, » les élèves indiquant que leur professeur de sciences est désireux de leur apporter son aide et s’intéresse à leur apprentissage sont environ 1.8 fois plus susceptibles d’exprimer leur sentiment d’appartenance à l’école que les élèves ne se disant pas dans ce cas ».
Et la pratique sportive
La pratique du sport est aussi liée à davantage de réussite scolaire. » Les résultats de l’enquête PISA mettent en évidence l’existence d’une relation positive entre le nombre de jours où les élèves pratiquent une activité physique modérée en dehors de l’école et la performance moyenne en sciences d’un système d’éducation. Par activités physiques modérées (comme la marche ou le cyclisme), on entend les activités faisant augmenter le rythme cardiaque de la personne qui les pratique, tout en la faisant transpirer. Au sein même des pays, un jour supplémentaire d’activité physique modérée est associé de façon positive – bien que limitée – à la performance en sciences des élèves, après contrôle du sexe et du statut socio-économique ; c’est en revanche l’inverse qui s’observe pour la pratique d’une activité physique intense.
Une relation plus étroite s’observe entre l’exercice physique et les résultats non cognitifs. En moyenne, dans les pays de l’OCDE, les élèves déclarant pratiquer une activité physique modérée ou intense sont ainsi moins susceptibles de se sentir très angoissés pour un contrôle (-2.9 points de pourcentage), de se sentir comme des étrangers à l’école (-6.7 points de pourcentage), de sécher des cours régulièrement (-3 points de pourcentage), et de subir des actes de harcèlement fréquents (-2.2 points de pourcentage) que les élèves ne pratiquant aucune forme d’activité physique en dehors de l’école ».
Favoriser la mixité sociale
Pisa montre aussi l’effet positif de la mixité sociale des établissements sur le bien être et la réussite. « Dans les 28 pays et économies disposant de données », affirme l’OCDE, « les enfants dont les parents exercent une profession manuelle et qui fréquentent un établissement où les parents des élèves exercent des professions intellectuelles sont environ deux fois plus susceptibles de compter obtenir une diplôme de l’enseignement tertiaire et occuper un poste de direction ou de cadre que les enfants dont les parents exercent une profession manuelle et qui affichent une performance similaire, mais qui fréquentent d’autres. En d’autres termes, les aspirations scolaires et professionnelles des élèves défavorisés sont liées au profil et à la composition socio-économique de leur établissement ». Les élèves défavorisés ont plus de chances d’avoir davantage d’attentes et d’accrocher à l’école dans un établissement socialement mixte que ségrégué. Une remarque qui concerne particulièrement la France.
Quelles pratiques pédagogiques favoriser ?
Pour l’OCDE ,Pisa établit que toutes les postures pédagogiques ne se valent pas. » Selon l’enquête PISA, le sentiment chez les élèves d’avoir des rapports négatifs avec leurs enseignants constitue l’un des principaux obstacles à leur sentiment d’appartenance à l’école. Pour établir de meilleures relations entre élèves et enseignants, ces derniers doivent être formés aux méthodes de base d’observation, d’écoute et de communication interculturelle afin de pouvoir prendre mieux en compte les besoins individuels de leurs élèves. Il convient aussi d’encourager les enseignants à collaborer et à échanger des informations avec leurs collègues sur les difficultés des élèves, leur personnalité et leurs atouts, afin qu’ils puissent trouver collectivement la meilleure approche pour renforcer le sentiment d’appartenance des élèves à la communauté scolaire… Pour améliorer le bien-être des élèves, l’école doit également leur enseigner les bénéfices d’un mode de vie sain et actif à l’aide de l’éducation physique et de l’éducation à la santé. L’accès à une offre attrayante de cours d’éducation physique à l’école peut permettre de réduire le nombre d’élèves ne pratiquant aucune activité physique en dehors du cadre scolaire ».
François Jarraud