Comment une étude de terrain peut-elle aboutir une production mutualisée et utilisable par tous ? Après avoir emmené ses lycéens sur un glacier, Sébastien Pardonneau, enseignant de SVT au lycée Aristide Briand de Gap dresse le bilan de son ambitieux projet climat. En lien avec des chercheurs et le parc national des Ecrins, les élèves ont recueilli une masse de données sur le verdissement des pelouses d’alpage, sur les différents glaciers et même sur un suivi phénologique des mélèzes et des hirondelles des roches. Comment sont traitées ces données au lycée ? Découvrez les logiciels utilisés par les lycéens et les productions finales.
Quel bilan dressez-vous de votre projet « Climat » mené en amont de la COP 21 avec vos lycéens ?
Il est toujours assez complexe d’évaluer un tel projet. De fait, il rassemble des aspects très divers: relations humaines, randonnées alpines et travail de terrain, exploitation de données en classe, interview dans la rue, communication face à une assemblée. Nous avons eu des satisfactions mais bien sûr de nombreux points à modifier.
Ainsi, le travail avec les données s’est révélé complexe à mettre en œuvre, mais une fois pris en main par les différents groupes, très enrichissant. Certains élèves ont fait preuve de créativité face à la liberté de démarche qu’il leur a été laissé. Le plus difficile reste d’accompagner sans trop contraindre afin de leur laisser de l’autonomie dans un cadre d’apprentissage.
Que trouve-t-on dans les diaporamas présentés au lycée ?
La communication requiert de faire des choix, de se positionner par rapport un public varié. Après avoir partagé ce préalable, les groupes se sont donnés les objectifs de rendre clairs et accessibles leurs travaux aux autres élèves. Les diaporamas présentent:
– le suivi du verdissement des pelouses d’alpage par photo constat et son traitement par le logiciel Mesurimpro
– le suivi phénologique des mélézes, des hirondelles des roches
– les bilans d’ablation et d’accumulation du Glacier Blanc et d’autres Glaciers de Savoie
– l’exploitation des données météorologiques locales saisonnières entre 2010 et 2015 et un essai de mise en relation avec les données phénologiques et le suivi des glaciers.
Avec quels partenaires scientifiques avez-vous travaillé ? Pour quel apport ?
Notre partenaire principal est le Parc des Ecrins .Nous tenons à remercier très chaleureusement Clotilde Sagot en charge des mesures physiques pour son implication sans faille dans la réussite de notre projet. D’autres partenaires sont à remercier: le CREA Mont-Blanc, l’ARPA-val d’Aoste, Glacioclim du LGGE de Grenoble qui nous ont procuré gratuitement l’accès à leurs données.
Les données scientifiques fournies ont permis aux différents groupes de travailler sur des sujets complémentaires. Les élèves se sont retrouvés face à une masse d’informations numériques. L’étude de la chaîne d’acquisition des données s’est révélée fondamentale. Ainsi, ils ont découvert le bruit dans les séries de données, les valeurs aberrantes, l’absence de données lorsque le capteurs ne fonctionnent plus, des variations non-attendues…là aussi des choix argumentés ont dû être faits par les groupes face aux difficultés rencontrées.
Quels sont les logiciels utilisés par vos lycéens pour le traitement des données ? Pour quel rendu ?
Les logiciels de type tableur ont été très utilisés bien sûr avec des traitements et des présentations variées. Il y a eu des tâtonnements y compris de ma part. Un groupe a utilisé aussi Mesurim pro un logiciel bien connu des collègues de S.V.T pour le traitement d’images de verdissement. Les résultats obtenus après traitement sont assez satisfaisants selon notre partenaire du Parc des Ecrins.
Un tel projet demande un certain travail scientifique de la part de l’enseignant. Comment prépariez-vous en amont les séances ? En quoi est-ce motivant de travailler ainsi ?
J’ai pris de l’avance sur eux! Pendant les 8 mois qui ont précédé ce projet j’ai travaillé sur ce sujet afin de me former. Je suis allé plusieurs fois travailler avec Clotilde Sagot au siège du Parc des Ecrins afin d’écouter et de comprendre ses axes de travail. J’ai ensuite essayé de repérer ce qu’il était possible puis souhaitable de faire avec les élèves de TaleS. Je suis parti avec une grille au début du projet qui a beaucoup évoluée au fur et à mesure du déroulement des séances. C’est très motivant car on se sent en prise directe avec « son programme » mais aussi très exigeant: Il m’est arrivé de me retrouver à chercher avec mes élèves des solutions en séance!
Quelles sont les orientations de vos ex-lycéens ? Avez-vous suscité des vocations ?
Je ne sais pas si le projet à suscité des vocations mais j’ai relevé que leur point du vu sur l’environnement Alpin et les personnes qui y travaillent avait évolué. C’est déjà un point de satisfaction ! De plus, nombre d’entre eux ont découvert avec enthousiasme la haute montagne. Ils ont aussi réalisé la complexité pour obtenir des données fiables. En général nos « anciens » élèves reviennent nous parler de leur orientation lors des vacances de février au lycée car ils réalisent leurs études pour la majorité, hors de leur département.
D’autres projets à venir ?
J’ai rencontré, avec des collègues, des scientifiques de la Station alpine Joseph Fourier . C’est une unité mixte de services de l’université Grenoble Alpes et du CNRS au col du Lautaret. Parmi les travaux de cette station il y a de sujets très intéressants pour nos lycéens sur la biodiversité ou la coévolution. Nos interlocuteurs se sont montrés très ouverts pour un projet de TP encadré sur le site de la station.
Entretien par Julien Cabioch
Accès aux productions :
Dans le Café
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