A peine adoptée, la revalorisation des enseignants sera-t-elle annulée en cas de victoire de l’opposition aux élections ? La promesse n’en a pas été faite. Mais, lors du débat sur le budget de l’éducation, les élus de droite de la commission de l’éducation de l’Assemblée nationale ont vivement critiqué cette réforme qu’ils jugent sans rapport avec le travail réel des enseignants, « quantitative » et non « qualitative ».
Un rapport très positif pour la revalorisation
Tout avait bien commencé. Présenté par le député Pascal Demarthe, le rapport de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, sur le projet de budget de l’Education nationale se focalise sur la revalorisation des enseignants.
C’est un plaidoyer pour ce qu’il présente comme la 3ème réforme importante de la Refondation. P Demarthe ne se contente pas de reprendre les chiffres du ministère. Il les met en perspective comme le Café pédagogique a pu le faire.
P Demarthe présente la réforme comme « la première revalorisation de toutes les étapes de la carrière enseignante depuis un quart de siècle ». En effet, il faut remonter aux années 1989-1993 pour avoir des augmentations générales des enseignants.
Et il la justifie. Pas seulement par l’écart avec les autres pays de l’OCDE. Mais aussi par l’écart avec les autres fonctionnaires, un argument que le Café pédagogique a mis en avant mais qui a été peu utilisé. Ainsi entre 2003 et 2014 le pouvoir d’achat des enseignants a diminué de 10% quand celui des autres cadres de la fonction publique a augmenté, grâce à des primes, de 0.2% par an. Mieux, P Demarthe montre, comme le Café, aussi le lien entre la rémunération des enseignants et le niveau des élèves.
P Demarthe donne aussi des chiffres. En début de carrière, la revalorisation représentera un gain brut mensuel de 99 euros en 2020, 151 au bout d e15ans d’ancienneté et 730 en fin de carrière pour tous sans accélération d’avancement. Ceux qui atteindront l’échelon maximum passeront de 3626 € à 4 555 €. En moyenne c’est +7.5% de hausse salariale. Du moins si les accords PPCR sont respectés…
Les réticences de l’opposition
Car on peut avoir des craintes pour l’avenir de l’accord PPCR. Lors du débat devant la Commission, les députés de l’opposition ont multiplié leurs critiques sur cet accord.
Ainsi Annie Genevard, déléguée nationale à l’éducation des Républicains, rappelle que les versements effectués vers les enseignants pour des heures supplémentaires sous Sarkozy atteignaient 400 millions, soit à peu près ce qui sera versé pour la revalorisation au 1er janvier 2017. Xavier Breton invite à « sortir d’une approche quantitative ». Il s’inquiète du droit de regard des chefs d’établissement sur l’évaluation des enseignants.
Vincent Ledoux estime que si les revenus des enseignants en France sont moindre que dans les autres pays de l’OCDE c’est parce qu’ils travaillent moins. Et il avance des chiffres : de 2 à 4 heures de moins par semaine dans le premier degré, de 4 à 6 heures dans le second. Un argument que Claude Sturni avait aussi avancé.
Pas de chance pour l’opposition. Ancien professeur des écoles, P Demarthe connait son dossier. « Les professeurs des écoles français travaillent davantage que ceux des autres pays de l’Ocde : 924 heures par an en France contre une moyenne de 782 heures en moyenne dans l’Ocde ».
« Je vois mal un gouvernement remettre en question un dispositif qui aura été adopté par une majorité d »organisations », nous a dit Frédérique Rolet, secrétaire générale du Snes, le 16 octobre. Un avis qui était partagé par C Chevalier du Se Unsa. Reste que la revalorisation ne semble soutenue qu’à gauche. Pour l’opposition de droite, des pouvoirs accrus pour les chefs d’établissement et le recours aux heures supplémentaires semblent suffire pour la gestion des enseignants.
François Jarraud
Pourquoi augmenter les enseignants ?