Pourquoi des enseignants ne sont-ils pas remplacés quand ils sont absents ? Le 18 octobre, la ministre rappelle que c’est lié à la suppression de postes de remplaçants. Mais elle propose aussi une gestion plus intensive des enseignants en réveillant le décret Robien et en élargissant les aires de remplacements du primaire. Des mesures qui seront bien difficiles à faire appliquer…
Deux fois plus d’heures non remplacées dans le second degré
« Il faut sortir de clichés selon lesquels les enseignants ne travaillent pas assez, ne font rien en dehors des heures de cours comme si ceux-ci sortaient d’une inspiration subite et les copies se corrigeaient toutes seules ». Le 18 octobre, N Vallaud Belkacem a pris toutes les préoccupations d’usage pour rappeler qu’il faut parler de « non remplacement » et non « d’absentéisme enseignant ». Elle a rappelé que les enseignants sont moins absents que la moyenne des fonctionnaires. Mais ces efforts sont contrariés par des mesures qui demandent plus de travail aux enseignants.
La ministre a commencé par promettre des indicateurs réguliers des non remplacements dans le 1er et le second degré. On compte aujourd’hui selon les données officielles de 13 heures de cours perdues en moyenne dans le premier degré et y29 heures dans le second. L’écart entre les deux reflète la gestion plus souple dans le 1er degré : les collègues se partagent les élèves du collègue absent.
Créer des postes de remplaçants
La ministre promet aussi une information rapide et complète des parents. Testée dans les académies de Poitiers et Nancy-Metz, généralisée en 2017, cette information indiquera aux parents la durée de l’absence et la date d’arrivée d’un remplaçant.
Pourquoi il y a t-il autant d’enseignants non remplacés ? D’abord parce que le vivier d’enseignants remplaçants a été asséché sous le quinquennat précédent où par exemple 1576 postes ont été supprimés dans le premier degré. La ministre a rappelé que depuis 2012 son ministère a créé 3 522 postes de remplaçants auxquels devraient s’ajouter en 2017 1500 postes supplémentaires. Au total, ce sont 5 000 postes de remplaçants dans le premier degré qui auront été créés.
Des mesures de gestion
Dans le second degré, la ministre envisage de réactiver le décret Robien de 2005. Ce décret demande aux personnels de direction de chercher dans l’établissement des enseignants pour faire face aux absences de courte durée. Le chef d’établissement peut désigner, s’il manque de volontaire, un enseignant dans la limite de 60 h par an et 5 h par semaine. La ministre demande que le prochain conseil d’administration des établissements décide des modalités de mise en oeuvre du décret.
C’est aussi vers la gestion des enseignants que se tourne le ministère pour le 1er degré. Un décret devrait décider que les aires d’affectation pour les remplacements seraient départementalisées, alors qu’aujourd’hui elles dépendent des situations. Il y aura un vivier unique de remplaçants qui interviendront dans tout le département.
Le ministère veut aussi s’attaquer aux absences perlées. « On recevra systématiquement les personnels en question », dit la ministre. Le service médical du rectorat suivra ces personnes et proposera des solutions ‘décharge, tutorat etc.).
Enfin le ministère veut s’attaquer aux absences perlées. Il promet que les convocations aux jurys auront lieu le mercredi après midi pour ne pas perturber les cours. Les formations auront lieu durant les petits congés scolaires et seront rémunérées.
Pour quelle efficacité ?
Pour la ministre, ces mesures ont été testées et elles sont efficaces. La plupart renvoient courageusement au niveau local la gestion du problème des remplacements. Or nombre de ces mesures sont impopulaires chez les enseignants.
Ce n’est pas par hasard que le décret Robien est tombé en désuétude. Outre le fait que le professeur de maths ne peut pas remplacer celui de français (et vice versa), les enseignants sont hostiles à l’idée qu’on puisse leur imposer des heures supplémentaires. Il faudra de la persuasion au chef d’établissement pour faire revivre ce texte.
La départementalisation des zones de remplacement du premier degré sera également mal accueillie. D’autant que le ministère veut aussi que le remplaçant soit totalement polyvalent. Une maitresse de maternelle pourra être envoyée en Cm2 ou en Ulis. Les remplaçants ont déjà des conditions de travail difficiles puisqu’ils n’arrivent jamais à se fixer quelque part. Les mesures de N Vallaud Belkacem va rendre leur mission encore plus difficile.
Le cas des absences perlées s’apparente aussi à un controle renforcé du personnel pour faire baisser le taux d’absences. Mais là les enseignants peuvent être rassurés : le nombre de médecins du travail est tellement bas dans l’éducation nationale que le controle effectif risque fort d’être local et non médical.
Si le ministère sait recruter et compenser les suppressions de postes de remplaçants, il a encore bien du mal à gérer efficacement ses ressources humaines…
François Jarraud