C’est probablement l’étude la plus importante sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture pour toute une génération. Avec la collaboration d’une centaine d’enseignants, Roland Goigoux a étudié les pratiques de classe d’apprentissage de la lecture et de l’écriture pour mettre en évidence leur efficacité.
Une démarche nouvelle
A la différence d’études antérieures qui partaient d’expériences de laboratoire pour les calquer sur la classe, et qui n’ont pas obtenu de résultats positifs, Roland Goigoux et son équipe se sont penchés sur ce qui se passe en classe pour montrer ce qui pourriat être amélioré.
» À l’opposé des démarches expérimentales qui provoquent un changement des pratiques pour mieux en comprendre l’impact, nous ne voulions pas transformer les manières de faire des enseignants. Nous voulions identifier les caractéristiques didactiques de celles qui s’avèrent les plus efficaces et les plus équitables. C’est pourquoi nous avons proposé de constituer un vaste échantillon d’enseignants s’inspirant d’approches didactiques très diverses. Nous pensions que nos résultats pourraient.. aider les professeurs des écoles à mieux circonscrire les choix qui s’offrent à eux, voire à les rendre intelligibles aux yeux des non-spécialistes, par exemple les parents d’élèves, et concourir ainsi à apaiser les querelles de méthodes ».
L’étude étudie 8 sous ensembles de questions : l’étude du code alphabétique et la reconnaissance des mots, la compréhension des textes écrits, l’écriture, l’étude d ela langue, l’acculturation à l’écrit, le caractère plus ou moins explicite de l’enseignement, l’aide aux élèves en difficulté, le climat de classe et l’engagement des élèves.
Un apport essentiel : l’enseignement de la compréhension
Les apports de cette recherche sont extrêmement importants. » Malgré les fortes disparités entre classes, nous n’avons identifié aucun effet global de l’allongement de la durée d’enseignement du lire-écrire sur la qualité des apprentissages des élèves », note par exemple R Goigoux. « Nous n’avons pas non plus trouvé d’effet lorsque nous avons étudié les durées allouées globalement à trois des cinq sous-ensembles de tâches que nous avons identifiés : phonographie, lecture et écriture. En revanche, l’allongement du temps consacré à l’étude de la langue et, dans une moindre mesure, celui de la compréhension a un effet positif sur les performances globales des élèves en lecture-écriture à la fin du CP ».
Le principal apport est bien dans l’importance du temps consacré à l’enseignement d ela compréhension au CP. » Il nous reste à comprendre les raisons de cette faiblesse de l’enseignement de la compréhension au cours préparatoire. Est-ce parce que ses effets sont moins spectaculaires et gratifiants à court terme que ceux de l’enseignement du déchiffrage ? Est-ce parce que les enseignants font de la maitrise du code un préalable et diffèrent l’enseignement de compréhension aux années ultérieures ? Ou encore parce qu’ils manquent d’outils didactiques capables de les aider ? »
Au passage, R Goigoux enterre la querelle des méthodes : aucun manuel, aucune méthode ne montre d’efficacité particulière dans l’apprentissage de la lecture.