Il faut parfois du courage pour chanter le vivre ensemble. C’est le pari fait par les chorales du collège Font d’Amaury de Fuveau, du collège Jean Zay et de l’école Jouly de Rousset dans les Bouches du Rhône. Sélectionnés dans le cadre du concours L’école en choeur, elles se produisent le 21 juin pour la Fête de la Musique dans le jardin du ministère de l’Education nationale avec un titre qui résume leur grande ambition : Shalom Salam.
Chanter la culture des autres
Fuveau et Rousset sont deux communes de la banlieue privilégié d’Aix-en-Provence. On est en terres lepenistes. Le Front national a fait près de 40% des voix dans les deux communes aux régionales. On est aussi en Provence, une région où les cultures se sont toujours mêlées.
« En ces temps de régression, il est important de chanter sa culture et celle des autres », nous a dit Françoise Atlan. Chanteuse spécialisée dans l’interprétation du répertoire des anciennes musiques traditionnelles arabo-andalouse, séfarade et ladino, elle s’est associée au projet des professeurs d’éducation musicale de Fuveau, Claire-Annie Ginoves-Maizières et de Rousset, Delphine Fourment.
Militer pour la convivencia
« Je milite pour la convivencia ». La convivencia c’est le nom donné à un moment de l’histoire espagnole où, sous le règne de princes musulmans , les communautés musulmanes, chrétiennes et juives vivaient en bonne intelligence dans une Europe où l’intolérance religieuse était la norme.
Françoise Atlan a adapté des mélodies traditionnelles pour créer des chants où se mêlent les cultures judéo espagnole, arabo andalouse et provençale. Les élèves chantent en hébreu, en arabe, en ladino, en turc et en shuadit, le judéo provençal des juifs du Comtat Venaissin. Les traditions musicales se mélangent dans cette composition réalisée spécialement pour les enfants.
Accompagnée par Fouad Didi au violon et à l’oud, la musique dépasse les frontières, la chorale embrasse les traditions pour créer de la complicité et de l’harmonie. C’est vraiment shalom – salam.
Porter sa culture à l’école
Claire-Annie Ginoves-Maizières, la professeure d’éducation musicale du collège de Fuveau, mène régulièrement sa chorale au festival académique. Cette année ses élèves se sont surpassés en répétant 14 titres différents dans des langues aussi diverses.
Organiser une chorale qui repose sur trois établissements différents et réunit un grand nombre d’enfants n’est pas chose facile. « Mon collège m’aide énormément », explique Claire-Annie Ginoves-Maizières. Avec les élèves volontaires de toutes les classes du collège, elle répète entre 12 et 13 heures sur le temps libre du déjeuner. Mais répéter avec les autres enfants demande beaucoup de débrouillardise et de complicités. Il faut transporter les enfants, trouver une salle assez grande et que ces moments collent avec les horaires chargés de Françoise Atlan et Fouad Didi.
« Les enfants ont pris à coeur ce projet. Beaucoup se sont appropriés leur culture. Ils ont aidé leurs camarades prononcer correctement des mots dans la langue de leurs parents ». L’initiative a été soutenue vigoureusement par les établissements.
Quelques enfants ont refusé de chanter la musique des autres. Mais globalement cette aventure musicale a fait reculer l’intolérance et enrichi chacun de la culture des autres.
La chorale des enfants de Fuveau et Rousset porte haut les valeurs de l’école. Vous pouvez l’entendre au ministère de l’éducation nationale le 21 juin à partir de 16 heures 30. Ecoutez bien. Vous entendrez des langues et des pays disparus avec la voix de la République.
François Jarraud