C’est une première interview. Nommée co-secrétaire générale et porte parole du Snuipp Fsu à l’issue du congrès de Rodez, le 10 juin, Francette Popineau partage avec le Café pédagogique les nouvelles orientations issues du congrès. Dans les priorités de la nouvelle équipe : une autre formation initiale en deux ans après licence, la suppression des APC qui pourraient devenir un temps d’équipe, une aide concrète pour permettre une école vraiment inclusive et toujours la question des rythmes scolaires…
Ce sont dorénavant, trois co-secrétaires généraux qui dirigeront le Snuipp. Le congrès de Rodez a décidé de partager la fonction de secrétaire général entre trois professeurs des écoles : Francette Popineau, 56 ans, élue également porte-parole, Régis Metzger, 54 ans et Christian Navarro, 58 ans. Sébastien Sihr ne pouvait demander un nouveau mandat.
Francette Popineau vient de Poitiers. Elle a été secrétaire départementale pendant 9 ans avant d’entrer au secrétariat national il y a 3 ans. « Mes nouvelles fonctions sont une lourde responsabilité pour moi, nous a-t-elle dit. « Mais elle s’exercera dans un collectif de travail qui exprime la diversité des opinions et des formations dans le syndicat ». Pour autant la nouvelle équipe se situe dans la continuité. « Le congrès à la volonté de poursuivre l’action du syndicat ». Avec quelques ajustements…
Quelles revendications le congrès de Rodez a-t-il mis en avant ?
On veut du temps pour les professeurs des écoles. Aujourd’hui les collègues sont isolés dans leur classe. Il faut du temps pour développer une responsabilité collective. Le congrès demande un moment qui ne serait pas forcément du temps libéré mais qui permette de réunir les équipes. Pour nous , ce temps pourrait être celui des APC qui n’ont pas fait leur preuves et dont nous demandons la suppression.
Même si les APC sont un progrès par rapport au dispositif d’aide d’avant 2012, cela reste une aide extérieure à la classe. Et on sait qu’elles sont peu efficientes. Le ministère voudrait en faire un temps de travail commun avec les TAP (le périscolaire NDLR). Mais on a du mal à voir comment ce pourrait être mis concrètement en oeuvre au profit des élèves. Les enseignants ne sont pas des animateurs et confondre les deux registres ne nous semble pas souhaitable.
Justement le rapport de l’Inspection dévoilé le 10 juin considère positivement les APC et la réforme des rythmes. Qu’en pensez-vous ?
Le ministère disait que la réforme permettait aux élèves d’avancer plus vite dans leurs apprentissages. On n’a pas mesuré cela. Le rapport conforte ce qu’on a dit sur le déséquilibre qui s’est installé entre les disciplines. Mais ce que les collègues ont surtout fait remonter c’est la fatigue des enfants. C’est relevé aussi dans le rapport et cela conforte leur analyse. On attend maintenant un bilan sur la réussite des élèves.
Le rapport de l’Inspection envisage de flécher davantage les emplois du temps des enseignants pour éviter le déséquilibre entre disciplines. Qu’en pensez vous ?
Les enseignants ont déjà des injonctions précises sur le temps accoré aux disciplines. Mais il est certain que les nouveaux rythmes ont entrainé des difficultés d’adaptation avec un accompagnement de la réforme insuffisant. Ce qui serait embêtant ce serait de se dire que le rééquilibrage se fera dans le temps périscolaire.
Quid de la formation des enseignants ?
Le congrès a amorcé une réflexion sur la formation initiale des enseignants. On veut élever la qualification des enseignants. On aimerait éviter le décrochage avec le second degré. Mais on veut deux années de formation initiale comme stagiaire rémunéré après une entrée ne licence. Ces deux années permettraient d’allier théorie et pratique. On va continuer à réfléchir à cette formule et voir comment l’articuler avec du pré recrutement dès l’année de L1.
C’est un peu le retour aux écoles normales ?
Ca y ressemble un peu. Mais l’idée derrière c’est aussi de démocratiser le recrutement des enseignants du primaire en ramenant au début de l’université un recrutement qui se fait aujourd’hui à bac +5.
Le congrès est aussi intervenu sur l’école inclusive. Il est important que tous les élèves puissent aller à l’école. Mais il faut que celle-ci ait les moyens de les accueillir. Or aujourd’hui les enseignants sont seuls à faire face aux difficultés. Et ce n’est pas la seule bonne volonté qui va faire l’école inclusive.
Comment aider l’école inclusive ?
On demande un pole d’aide avec des enseignants spécialisés pouvant venir aider les enseignants. Il faudrait aussi assouplir le temps scolaire pour les élèves qui souffrent en suivant des journées entières à l’école.
Nous voulons que les enseignants soient fiers de leur métier. L’écueil actuel des réformes c’est qu’elles ne s’appuient pas assez sur les enseignants. Il faut mettre en avant la valeur des enseignants pour transformer le métier. Ce qui m’anime c’est que les collègues soient fiers de ce qu’ils font.
Propos recueillis par François Jarraud