Organisée sur le thème « L’éducation prioritaire deux ans après la refondation », la Journée nationale de l’Observatoire des zones prioritaires (OZP), le 28 mai, a vite tournée autour de la question du devenir des emplois spécifiques à l’éducation prioritaire : coordonnateurs, professeurs référents. Elle a mis en avant leur isolement et les incertitudes qui pèsent sur leur devenir alors que les académies donnent de la visibilité à d’autres missions. Un an avant une éventuelle alternance politique, la question du devenir des piliers de l’éducation prioritaire se pose déjà…
« On a besoin d’être reconnus ». En ouvrant la Journée, Marc Douaire, président de l’OZP invite à « rendre publics les éléments du bilan de la réforme de l’éducation prioritaire ». Mais les interventions vont un peu dévier la route du bilan attendu.
Le gap garçons – filles à Créteil
Une première intervention réunit B. Gille, rectrice de Créteil, et deux correspondants académiques éducation prioritaire, Françoise Moncada et Alain Pothet. B Gille situe l’importance de l’éducation prioritaire dans son académie : 30% des élèves, jusqu’à 60% en Seine-Saint-Denis où existe une zone exceptionnelle par le nombre d’élèves, l’accumulation de difficultés et le manque d’attractivité pour les enseignants. Un fait préoccupant dans l’académie : l’écart de réussite au brevet entre filles et garçons : 13 points en moyenne, parfois 35, aux dépens des garçons.
Mais la rectrice est venue pour donner de bonne nouvelles. A la rentrée 2016 elle disposera de 503 créations de postes pour le premier degré. Cela permettra de faire passer les postes dédiés à la scolarisation des moins de 3 ans de 31 à 51 et ceux des « plus de maitres que de classes » (maitres +) de 41 à 154. Autre bonne nouvelle : dans le second degré 60 demandes de sorties pour 1673 entrées. Les chiffres du 1er degré auraient donné une autre image…
La rectrice plaide pour que le référentiel éducation prioritaire pénètre davantage, pour « sécuriser » les enseignants, pour travailler la synergie entre ses services et les partenaires.
Quel avenir pour les missions spécifiques ?
Une seconde table ronde s’ouvre sur le thème des missions spécifiques. Julien Destefanis, professeur référent dans l’académie de Nice, montre des référents qui vivent dans l’entre soi, sans formation et avec peu de contact avec els autres professionnels. Il n’y a plus de recrutement, plus de mouvement réel et les heures commencent à être partagées entre tous les enseignants. La question de leur avenir est clairement posée.
Alexis Lebert, principal à Paris en rep+, pose la question de la pérennité de leur savoir et du transfert des compétences.
Laurence Balu, ancienne chargée de mission éducation prioritaire dans l’académie de Besançon, montre également l’isolement des coordonnateurs de réseau. Beaucoup gardent un pied dans la classe car « c’est terrible quand ils sont suspectés d’être passés de l’autre coté de la ligne ».
A la jonction de ceux qui sont en classe et ceux qui n’y sont pas, les coordonnateurs ont fait la preuve de leur efficience, selon elle. La preuve : la réforme du collège n’est pas un drame en Rep puisque le travail collectif est déjà là…
Dans l’académie de Besançon, l’avenir des professeurs référents est aussi une question. C’est aussi le cas ailleurs si l’on suit les réactions de la salle alors qu’ils « ont créé du confort pour les autres enseignants ». Dans l’enseignement primaire, les missions spécifiques se transforment un peu partout en maitre+. Cela pourrait expliquer leur forte croissance à Créteil..
Renforcer les postes spécifiques
Marc Bablet, chef du bureau de l’éducation prioritaire au ministère, intervient. Il souligne que la Dgesco a demandé aux recteurs de « prendre en compte les éléments pertinents des anciens RAR ». Il renvoie la question des professeurs référents vers les établissements qui disposent d’IMP (indemnités de mission). « On a beaucoup conforté la mission de coordination et on va continuer », dit-il. « On souhaite que tous aient des lettres de mission ».
« Pour nous il faut abonder et renforcer les postes spécifiques », conclue Marc Douaire. « Il faut aussi tenir compte des personnes. Si elle sont pris des risques en abandonnant leur disciplines , en travaillant avec le 1er degré et qu’au bout de plusieurs années on termine leur mission sans même l’évaluer, quelle leçon pour les autres professeurs ».
« Les professeurs référents ont su créer des interactions entre école et collège », remarque-t-il. « Sur quelles ressources va-t-on s’appuyer pour les conseils école – collège alors que els académies reprennent les postes ? Il y a un capital d’ingénierie éducative qui doit être utilisé ».
François Jarraud