Alors que la ministre va réunir début mai des « Assises de la refondation » qui tourneront, volens , nolens, au bilan de l’action gouvernementale, la publication du « Compte de l’éducation » apporte un éclairage officiel et assez détaillé sur son aspect financier. Si celui-ci est loin de suffire pour ce bilan, et s’il laisse bien des points dans l’ombre, il permet de tirer quelques enseignements sur les priorités de l’action gouvernementale.
N’attendons pas de cette publication officielle qu’elle apporte des révélations sur le détail de l’action ministérielle. Le Compte de l’éducation évoque de grandes masses financières au niveau de l’éducation dans son ensemble. Cela dépasse les dépenses strictement d’enseignement mais englobe la restauration, les livres, l’habilement, le transport etc. Mais il ne donne pas qu’une vision globale. Il éclaire tour à tour la répartition par niveau d’enseignement, par tête d’élève ou encore par origine du financement de l’éducation. Et cela nous réserve encore des surprises.
Un vrai effort pour le primaire
Si l’ouvrage donne accès aux années 2006 à 2014, comparons 2011, le dernier vrai budget de la droite et 2014, le dernier budget définitif de la gauche.
Observons d’abord l’évolution de la dépense par niveau d’enseignement. Depuis 2012, le gouvernement promet un effort sur le primaire. Sur le plan financier il est bien réel, quoiqu’on pense de la façon dont cet argent a été utilisé. En 2011, le pays dépensait 5606 € pour chaque enfant du pré-élémentaire et l’Etat 2729. En 2014, on était passé à 6238 et 2894. C’est là où on trouve la plus forte hausse (11%) , un effort supporté seulement pour un quart par l’Etat.
Pour l’école élémentaire, on est passé de 5719 à 6052 € : l’effort est réel (+6%) mais moins important. Là c’est l’Etat qui met la main au porte monnaie pour les trois quarts des dépenses.
Au secondaire, le coût de chaque élève reste en gros stable entre 2011 et 2014. Un collégien coute 8239 € en 2011, 8406€ en 2014 soit 2% de plus. La hausse vient de l’Etat alors que les départements ont réduit leurs dépenses éducatives de 82 millions.
Pour le lycée, le coût moyen d’un lycéen est de 11 054 € en 2011 et de 11192 € en 2014, autrement dit l’augmentation est insignifiante. C’est moins vrai pour les lycéens professionnels pour qui on constate une hausse de 3.5% de la dépense par élève depuis 2011, essentiellement portée par l’Etat.
Une vérification en masse totale (et non plus par élève) confirme ces évolutions : +12% pour le pré-élémentaire et +7% pour l’école élémentaire. Au collège et au lycée la dépense nationale augmente de 5 et 4% entre les deux dates (mais avec une forte hausse des effectifs). Pour les lycées professionnels, on a une légère baisse des dépenses liée au passage de 4 à 3 ans du bac pro.
Recul des départements, investissements des parents
Qu’en est-il pour l’origine du financement ? Ce que montre la comparaison des deux années retenues, une forte hausse des apports dans le premier degré : +7% alors que dans le second degré l’Etat n’a augmenté ses dépenses que de 1.5%.
La première surprise c’est la baisse des dépenses des départements : -3.8% , soit 265 millions de moins, alors que les régions ont continué à dépenser plus pour l’éducation.
L’autre surprise c’est la hausse des dépenses des ménages : elle est passée de 6.6 milliards à 9.5 pour l’enseignement scolaire. Pour l’essentiel , les ménages ont dépensé plus sur le collège et en lycée professionnel, autrement dit ce sont plutôt les ménages des classes moyennes et populaires qui ont investi dans l’éducation.
La Refondation respectée
Ces évolutions respectent-elles les engagements de la loi d’orientation ? Oui. La Nation a mis relativement plus de moyens au primaire et au profit de l’enseignement professionnel. La question maintenant c’est de savoir si, sur le terrain, les acteurs en sont conscients. Ce ‘est pas sur si l’on en juge par les conditions de travail des enseignants dans certains quartiers. Mais les ménages ont fait un effort encore plus grand pour l’éducation de leurs enfants. Et ça ce n’était pas prévu.
François Jarraud