Aux racines de la robotique… Comment l’inanimé devient-il animé ? Comment l’homme instaure-t-il une relation insolite ou intime avec des objets ? Quels sont les nouveaux talismans de notre époque, qu’est ce qu’ils révèlent de nous et de notre société ? Nombreux sont les objets dont le statut est plus proche de celui d’une personne ou d’une créature que d’un simple objet. Guidée par la science de l’anthropologie, l’exposition « Persona » du quai Branly explore le rapport de l’homme à l’objet, qu’il personnifie et dont il se méfie, une rencontre inédite entre les arts premiers, l’art contemporain et la robotique. A travers 230 pièces, statues, sculptures, installations, peintures, robots, automates, extraits de films, l’exposition fait la lumière sur ces « étranges humains », permet de comprendre ce transfert qui s’opère, dans toutes les cultures, entre l’humain et le non-humain. Elle invite à des expériences insolites ! Les jeunes sont attendus, en famille ou avec leurs enseignants à cette exposition curieuse. Un copieux dossier pédagogique d’une trentaine de pages est à la disposition des professeurs.
Quand les arts premiers rencontrent la robotique
A travers les siècles, les civilisations et les croyances, l’exposition explore les mécanismes par lesquels un objet accède au statut de personne. Les frontières entre l’humain et tout ce qui l’entoure, semblent de plus en plus perméables, soulevant des questions très larges de cohabitation entre l’homme, l’objet, l’animal et la machine. Objets d’art, produits high-tech se voient régulièrement attribuer, dans leur utilisation, des capacités d’action insoupçonnées, qui en font des quasi-personnes. A l’heure des grands débats sur le transhumanisme et l’intelligence artificielle, l’exposition permet de comprendre les mécanismes par lesquels les cultures, des plus ancestrales au plus contemporaines, « injectent de la personne » dans les objets. Elle est un véritable laboratoire d’anthropologie, invitant le visiteur à une expérience de la rencontre, autant déstabilisante qu’enrichissante. La question, « de quoi voulons-nous nous entourer ? » ne s’est jamais posée avec autant de force qu’aujourd’hui.
Quatre grandes sections
En guise d’introduction, le visiteur est accueilli dans l’exposition par une vidéo qui propose un dialogue avec l’homme invisible imaginé ici en anthropologue dialoguant sur la notion de « personne ». L’exposition se répartie ensuite en quatre grandes sections. « Il y a quelqu’un ? » présente un ensemble d’œuvres de différentes époques qui ressemblent de manière très minimale, quasi indicible, à des humains, mais peuvent être considérées comme des « personnes » du fait de leurs caractéristiques. Masques d’Océanie, amulettes et figurines anthropomorphes et zoo-anthropomorphes d’Afrique et des Amériques…témoignent d’une variété de formes, de l’infiniment grand, à l’infiniment petit, et deviennent tantôt aimables et attachantes, tantôt terrifiantes. Dans l’espace suivant intitulé « Il y a personne ! », fantômes, extra-terrestres, esprits, revenants, divinités…se côtoient ! Ce second temps de l’exposition s’intéresse à la manière de détecter et maîtriser ces « différentes présences supposées ». Au cours de l’histoire, de nombreux dispositifs destinés à saisir, mesurer, activer ces présences, ont vu le jour, et on peut particulièrement regarder la « Radio Momo » de Jean-Jacques Lebel, la mallette d’outils pour chasser les fantômes appartenant à un membre du Club des chasseurs de fantômes de Bruxelles, ainsi que la « machine pour parler au mort » sur laquelle Thomas Edison travailla les dix dernières années de sa vie.
La vallée de l’Etrange
La troisième partie de l’exposition s’intéresse alors aux rapports entretenus par les hommes avec ces présences. Quels types de présence acceptons-nous, rejetons-nous, ignorons-nous, apprivoisons-nous ? L’exposition pose cette question cruciale et terriblement actuelle : de quoi voulons-nous nous entourer ? Pour tenter d’y trouver des réponses, le visiteur est invité à déambuler dans …la « Vallée de l’Etrange »….sur les traces du pionnier de la robotique japonaise, Masahiro Mori. Le roboticien démontre que si l’anthropomorphisme permet dans un premier temps de faciliter les interactions avec un robot, on arrive, à partir d’un certain point, au résultat opposé : un trop grand degré de réalisme crée chez la plupart des gens un sentiment de malaise ou d’étrangeté. Cette « Vallée de l’Etrange » est une épreuve de coexistence avec ces objets-personnes : attraction, répulsion, ou fascination ? Des « objets » qui ne laissent personne indifférent !
La maison-témoin
Le dernier espace de l’exposition prolonge l’aventure de la « Vallée de l’Etrange », à travers une maison-témoin, dans laquelle ont été installés et mis en interaction une profusion d’interfaces et de créatures artificielles. L’expérience inédite proposée par cette maison-témoin a pour objectif de poser cette question finale : « De quoi voulons-nous nous entourer ? Avec qui voulons-nous faire famille ? ». Le visiteur pénètre successivement dans la « cuisine rêvée des roboticiens », dans la « chambre aux attachements », dans le « salon anthropomorphique » et termine son parcours insolite dans l’ultime pièce, le « garage des métamorphoses ».
Autour de l’exposition
Des visites guidées de l’exposition sont programmées régulièrement. Un audio-guide propose un parcours immersif et des contenus interactifs en lien avec les objets empruntés aux domaines des nouvelles technologies, au design et à la robotique. Une soirée festive, « Before Persona », est prévue le 15 avril pour prolonger l’exposition avec de la musique, de la vidéo et des ateliers en lien avec les thématiques de l’exposition. Pendant les vacances de printemps, des animations seront proposées aux familles et aux jeunes.
Pour le public scolaire
Un copieux dossier pédagogique de 38 pages est à la disposition des enseignants. Il présente l’exposition, et ses objectifs. Il donne des pistes d’études qui s’adressent aux élèves du cycle 3 à la terminale, et peuvent s’inscrire dans des séquences disciplinaires (arts plastiques, histoire, géographie, lettres, philosophie…) ou interdisciplinaires ( culture humaniste, histoire des arts, culture scientifique et histoire des techniques) . Les professeurs peuvent organiser des visites autonomes, ou opter pour des visites guidées d’1 heure adaptées aux niveaux des collégiens et des lycéens, de 12 à 18 ans.
Béatrice Flammang