Intervenant lors du colloque national du Snuipp, Roland Goigoux, professeur à l’Espe de Clermont Ferrand, a vivement plaidé pour une autre formation des enseignants permettant la mutualisation et la transmission intergénérationnelle du métier et située au plus près dans les circonscriptions.
« La préoccupation majeure des enseignants se situe dans la classe et plus dans le rapport à la hiérarchie ». C’est la leçon que tire Roland Goigoux du sondage publié par le Snuipp le 19 janvier lors du colloque national sur le métier enseignant. Et c’est sur le terrain de la formation des enseignants qu’il va intervenir.
5 préoccupations pour une formation
Car, pour lui, il y a une « dégradation vertigineuse de la formation initiale dans les Espe… La moitié des Espe sont séchées sur place avec une dislocation entre l’académique et le professionnel ». Aujourd’hui les enseignants sont en attente d’outils de formation. « Ils ont comme seule possibilité la visite de blogs d’enseignants et de quelques sites d’information. Ils y échangent des informations, des idées de techniques, peu de théorie ». Sinon « je ne vois plus de plans de formation mais des castings », ajoute-il..
Après ce bilan sévère, Roland Goigoux avance ses propositions. « Les enseignants n’ont pas besoin d’accompagnateurs mais de formateurs qui en savent plus qu’eux », dit-il. « Ils demandent d’être aidés dans une dynamique collective ».
Pour cet accompagnement, R Goigoux fixe une technique et 5 préoccupations. « Le postulat de départ c’est que les gens ont de bonnes raisons de faire comme ils font. Il faut donc démonter et identifier ce raisons ». R. Goigoux invite à réfléchir en terme de gains et pertes , ou avantages et inconvénients, les pratiques des enseignants. Une approche qui donne aux pratiques pédagogiques leur dimension sociale et qui a été utilisée avec profit en Belgique par exemple à propos du redoublement.
Les cinq priorités d’accompagnement des enseignants sont pour R Goigoux la planification, la régulation de la classe, la motivation des élèves, l’explicitation et la différenciation. « Le climat de la classe est très important pour la réussite des élèves », explique-t-il. « Il faudrait le traduire en termes opérationnels. Plutôt que de parler de bienveillance, dire « en classe on ne se moque pas ». Sur la motivation, « au lieu de parler d’estime de soi, inviter à travailler le sentiment de compétence ».
Créer des emplois de passeurs
Pour lui, « il faut développer l’existence de personnes ressources qui seraient des référents métiers » en doublant les personnels des circonscriptions. Il propose de recruter pour 2 ou 3 ans des enseignants repérés dans la circonscription qui seraient déchargés de cours pour assurer un rôle de transmission des gestes du métier. « Il n’y a aujourd’hui aucune instance qui cherche à mutualiser les apports », dit il. Ces nouveaux formateurs seraient « des passeurs ». Autre proposition : « rétablir la liberté de circulation des enseignants » en autorisant les visites dans la classe des collègues et en la considérant comme du temps de formation.
Des pistes concrètes pour un corps enseignant qui se sent piégé entre injonction de faire réussir tous les élèves et absence de formation.
François Jarraud