Où en est l’éducation aux yeux de l’exécutif ? L’Ecole est-elle encore la priorité du quinquennat ? La question est éclairée singulièrement le 4 janvier par un échange entre Manuel Valls et le président de la République…
« J’ai décidé de faire de l’école maternelle et de l’enseignement primaire une priorité de mon action ». François Hollande s’est exprimé ainsi… en février 2012. C’est le moment où le candidat à la présidence fait des 60 000 postes pour l’éducation nationale le fer de lance de sa campagne. Quelques jours après, son premier discours de président de la République se fait dans les jardins du Louvre, devant la statue de Jules Ferry. L’Ecole est placée comme la grande affaire du quinquennat.
Le 4 janvier 2016, lors des voeux au gouvernement, un exercice singulier où l’exécutif parle à l’exécutif, la situation est toute autre. Le président de la République s’est contenté de dire à la fin d’un discours où le thème sécuritaire l’emporte : « ‘je n’oublie pas la réforme du collège, le plan numérique et tout ce qui contribue à l’amélioration de la vie quotidienne des Français ».
Mais voilà, les choses qu’on n’oublie pas sont parfois celles que l’on aurait pu oublier… Le verbe présidentiel sonne comme un soutien assez mou à une réforme de l’éducation présentée non plus comme un outil de justice sociale mais comme un confort supplémentaire.
François Hollande répondait ainsi aux propos plus affirmés du premier ministre. Pour M Valls, « la rentrée scolaire 2016 sera un moment essentiel, avec le déploiement de la réforme du collège qui offrira aux équipes enseignantes plus de liberté, avec de nouveaux programmes centrés sur la formation de la personne et du citoyen, avec une sectorisation différente pour plus de mixité sociale dans certains départements volontaires. C’est aussi l’année du déploiement du plan numérique à l’école ».
Le tournant a été pris début 2014. « Il est temps aujourd’hui d’ouvrir une nouvelle étape », explique F Hollande le 31 mars. Celle ci est marquée par la politique économique et non plus l’éducation. C’est le remaniement et Vincent Peillon, qui portait la priorité éducative, quitte le gouvernement. En janvier 2014 déjà l’éducation avait décroché du premier rôle. « Je vous le redis ce soir : je n’ai qu’une priorité, qu’un objectif, qu’un engagement, c’est l’emploi ! », avait dit le président de la République. Il ne faisait plus de l’Ecole une priorité. Tout au plus affirmait-il que » la Nation doit se mobiliser autour de son école » avant de redire « nous devons faire des économies partout où elles sont possibles ». Le 31 mars, le redressement économique avec le Pacte de responsabilité est confirmé comme premier objectif. Arrive le second.
La question de la priorité n’est pas que théorique ou que protocolaire. Elle est surtout budgétaire. Depuis 2012 l’Education nationale a le privilège de créer des postes qui sont compensés par des réductions dans les autres ministères. Ce privilège est partagé dans le budget 2016 avec les ministères sécuritaires. Mais déjà la progression du budget de l’Education nationale est nettement plus faible que dans le budget 2015. Et depuis Bercy grignote quand il le peut un budget sous tension.
Vu de l’Elysée, l’Education est un peu devenue une vieille compagne. On a fait sa vie avec elle mais on ne la sort plus… Les préoccupations présidentielles sont ailleurs. Des deux interventions sort quand même une certitude. Le plan numérique, que l’on a vu longtemps perdu dans un no man’s land de l’action politique, reste un cap pour le gouvernement.
François Jarraud