Comment passionner les élèves à l’étude du climat ? Sébastien Pardonneau, professeur de SVT au lycée Aristide Briand à Gap, mène un projet dantesque sur le changement climatique. En effet, ses lycéens vont chercher eux-mêmes les données sur le glacier pour étudier les variations du climat. A la rencontre de bergers, de techniciens du parc des Ecrins, des guides de haute-montagne, la classe est suivie par une équipe de cinéastes durant les expéditions. Comment se prépare un tel projet ? Quels sont les retours des élèves ?
Quel est votre projet « Climat » avec vos élèves ?
En 2014 et en 2013, un article du Dauphiné, faisait l’écho d’un bilan positif pour le Glacier Blanc des Ecrins. Voilà un fait qui a étonné les élèves, habitués à la fonte toujours plus marquée de ce géant de glace. D’autre part l’année 2003 a marqué pour les alpages une sécheresse sans précédent qui, dans une certaine mesure, s’est répétée cet été 2015.
L’idée principale du projet est donc d’aller sur le terrain pour confronter les élèves de Terminale S à l’obtention des données scientifiques jusqu’à leur utilisation dans le cadre du changement climatique.
« Alpes, quels indicateurs du changement climatique ? » est un projet qui met l’accent sur l’obtention des données de terrain du Parc National des Ecrins. Il s’agit pour les élèves d’assister, avec les techniciens, aux relevés et mesures d’indicateurs du changement climatiques pratiqués sur le Glacier Blanc et sur les alpages.
Mais comment suit-on l’évolution d’un milieu complexe? Quels paramètres sont suivis? Comment sont-ils mesurés? A quelle fréquence? Quelles difficultés rencontrent-les professionnels pour le faire? Quels choix sont faits lors du traitement des données brutes? Autant d’aspects qui, en filigrane, impriment leurs marques dans ce sujet d’actualité.
Combien d’élèves sont impliqués dans le projet ? Comment s’est déroulée la sélection des lycéens ?
Le dispositif de l’accompagnement personnalisé (AP) nous offre la possibilité de travailler avec des élèves qui ont choisi un projet proposé par chaque professeur. J’ai présenté ce projet en mai 2015 à l’ensemble des quatre classes de 1ère S du lycée. Ceux qui étaient intéressés devaient rédiger une petite lettre de motivation et s’inscrire le rapidement possible, car il n’y a que 15 places dans chaque dispositif d’AP. La sélection s’est faite essentiellement sur l’ordre d’inscription.
Vous mettez l’accent sur les données de terrain : glaciers, alpages. Comment se préparent ces excursions à plus de 3000m d’altitude ?
La moyenne et la haute montagne sont des lieux qui comportent de nombreux aléas. Toute la difficulté d’un tel choix de sortie est d’assurer un travail pédagogique de qualité dans un cadre de sécurité sans faille. Guide de haute montagne, techniciens du parc, réservation en refuge, équipe de tournage, transport…De telles sorties se préparent en amont, et lorsqu’une fenêtre météo se présente, nous déclenchons le processus. Ce n’est pas toujours de tout repos, mais c’est vraiment sympa!
Quels professionnels vos élèves de terminale ont-ils rencontrés dans leurs recherches ?
Eleveurs, bergers, techniciens du parc, guides de haute-montagne, gardien de refuge, cameramen, monteurs… L’idée connexe de ce projet c’est aussi de rencontrer des personnes, des métiers autour d’une structure partagée: le parc national des Ecrins. Ceci afin de prendre conscience de l’interdépendance des acteurs, des ressources et des aléas climatiques, mais aussi d’apporter quelques éléments de réflexion à la construction du parcours d’orientation des élèves.
Ce suivi au plus proche des glaciers doit vraiment passionner vos élèves. Quels sont les retours des lycéens ?
Sourires, satisfactions, étonnements ont parcouru les visages du groupe. Certains ont regretté de ne pouvoir en faire plus sur le terrain en voyant la barre des Ecrins ou le Pelvoux. L’heure est au travail sur les données fournies par le parc des Ecrins et à entendre les élèves, elles ont du sens maintenant.
Vous êtes également suivis dans votre projet par une équipe de tournage avec la cinémathèque de montagne. Ceci contribue sans doute à l’exceptionnalité de l’aventure. Quelques mots sur ce film en préparation ?
L’équipe de la cinémathèque d’images de montagne emmenée par Gilles Charensol le réalisateur, Christophe Rosanvallon et Valérie Bonfé, participe au projet depuis le début. L’idée du film est de témoigner du travail réalisé sur le terrain. Les élèves ont appris comment construire un scénario et une interview. Ce film-reportage, actuellement en montage, sera projeté aux » 7èmes rencontres de la cinémathèque de Montagne à Gap vendredi 13 novembre 2015″. Ce sera l’occasion de toucher un plus large public sur ce thème, composé pour cette avant-séance de 1000 élèves des Hautes-Alpes. Le groupe du projet sera là bien sûr pour présenter!
La COP21 approchant, comment comptez-vous suivre la conférence ?
C’est un rendez-vous médiatique. Sur le temps de l’AP nous avons prévu des échanges sur les sujets qui seront traités dans les médias. Les élèves ont maintenant pris conscience de l’origine des données qui s’agrègent pour appuyer les discussions autour du changement climatique. Nul doute que nos échanges scientifiques se feront plus citoyens à l’approche de la conférence COP21.
Propos recueillis par Julien Cabioch