Bien loin de réduire les exigences, les nouveaux programmes de l’école et du collège demandent aux enseignants des compétences nouvelles, peu ou pas développées jusque là. Cette ambition est susceptible de faire progresser l’Ecole. Mais elle met au premier plan de ses priorités la formation initiale et continue des enseignants.
On ne reviendra pas ici sur la réforme du collège. On peut dire que le ministère l’a impulsée comme il sait le faire. Il applique une loi à la lettre et croit changer les choses en rédigeant un décret et un arrêté. Ce faisant il agit sur les condition d’exercice, la gestion des moyens. Or ce levier là n’est pas le plus efficace pour changer les pratiques. La grogne qui s’élève dans de nombreux collèges saluent les procédés d’une institution qui ne sait ni impulser ni gérer le changement.
Il y a bien des liens profonds entre la réforme du collège et les nouveaux programmes que le Café pédagogique a dévoilés le 13 avril. Bien sur on y retrouve l’intérêt porté aux compétences et à l’interdisciplinarité. Au delà, les nouveaux programmes s’intéressent pour la première fois à l’enfant et pas seulement à l’élève anonyme de l’école traditionnelle.
Mais ce que nous disent tous les analystes de ces nouveaux programmes c’est leur niveau d’exigence pour les enseignants. Les programmes de 2008 considéraient les enseignants comme des tacherons ayant à suivre des démarches précises et à vérifier des listes de connaissances qu’elles soient maitrisées ou juste apprises. Ces choix matérialisés en 2005-2007 validaient les pires pratiques pédagogiques, celles qui limitent le travail de l’élève à ânonner des connaissances non maitrisées. Les résultats catastrophiques des élèves français se lisent dans l’évaluation Pisa. Ils « savent » des choses qu’ils sont incapables d’utiliser dans des situations proposées lors des tests. Finalement, contrairement à ce qu’on peut lire ici ou là, le point commun des nouveaux programmes c’est bien de poser la question du savoir.
Or peu d’enseignants ont été formés à « l’apprendre à apprendre ». Cette dimension avait disparu de la formation initiale et il n’est pas certain qu’elle soit présente dans toutes les Espe. L’appropriation des nouveaux programmes va demander de la formation continue. C’est déjà un sacré problème pour l’institution scolaire comme vient de le souligner la Cour des Comptes. Mais elle va demander aussi des formateurs.
Et nous voilà revenu sur la question qu’on a voulu ne pas traiter : l’accompagnement du changement. Autant prévenir. Sauf exceptions, l’institution échouera à mettre en oeuvre les nouveaux programmes si elle se limite à demander aux cadres de former les enseignants comme elle l’envisage. Là aussi l’OCDE, avec TALIS, a montré qu’ils sont déconsidérés quand il s’agit pour un enseignant d’obtenir de l’aide. Au final, avec ces nouveaux programmes, la question de l’accompagnement est posée.
François Jarraud