Pour tous ceux qui ont eu l’occasion de le rencontrer, en tant qu’étudiant, chercheur, collègue… Jacques Ardoino restera une personnalité marquante. Peu connu en dehors des cercles de spécialistes de l’éducation, il est une des grandes références du domaine. Ses « propos actuels sur l’éducation », publiés d’abord en 1965, restent un ouvrage de référence, réédités en 2003 (l’Harmattan) ils font écho au livre quasiment éponyme d’Alain.Mais Jacques Ardoino était surtout un spécialiste de l’intervention psychosociale, de la psychosociologie ce qui l’amenait à travailler sur la dimension institutionnelle de l’éducation. Auteur en 1994 avec René Lourau d’un ouvrage sur les pédagogies institutionnelles, il situait son action dans un cadre pédagogique, mais aussi politique clairement affirmé.
Pour ceux qui ont eu la chance de suivre le cours commun qu’il tenait à Paris 8 dans les années 1990 avec Guy Berger, « l’écoute des termes », on se rappellera la rudesse de ses interventions, son exigence et sa rigueur, son immense connaissance des textes et surtout des concepts. On retrouve dans son ouvrage « Les avatars de l’éducation » (Puf 2000) la mise en forme de ces cours dans lesquels il travaillait avec les étudiants ces « problématiques et notions clefs en devenir ». L’évaluation était pour lui une question importante qu’il traduisait d’ailleurs dans les faits en n’attribuant que deux possibilités à ses étudiants : admis ou non admis, zéro ou vingt, l’importance étant d’abord le parcours de l’étudiant. Il avait d’ailleurs publié avec Guy Berger un ouvrage sur ce sujet : « D’une évaluation en miettes à une évaluation en acte », (Matrice-ANDSHA, Paris, 1989) qui évoquait l’enseignement supérieur.
Enseignant à Paris 8, d’abord à Vincennes, puis à Saint Denis, Jacques Ardoino était un des artisans de cette évolution de l’université dans une ouverture aux reprises d’études et aux formes nouvelles d’apprendre. Malheureusement, comme il le constatait lui-même dans un retour trente années plus tard sur l’aventure de Paris 8 à Vincennes, les espoirs fondés en 1968 sur cette expérimentation s’étaient évaporés et il n’en restait guère que quelques représentants bien symboliques.
Après Geneviève Jacquinot-Delaunay, Jacques Ardoino est un autre de ces enseignants qui, ayant porté le projet de mai 1968 et d’une évolution de l’université, nous quitte. On pourra le retrouver au travers de nombreux documents intéressants qu’il avait mis en ligne sur son blog http://jacques.ardoino.perso.sfr.fr/. À nous de relire ces enseignants chercheurs et de montrer que leur travail reste encore parfaitement utile pour tous ceux qui s’intéressent à l’éducation.
J Ardoino, psychosociologue de l’éducation et défenseur de l’ouverture des universités, est décédé.
Bruno Devauchelle
Son site
http://jacques.ardoino.perso.sfr.fr/
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