Peut on faire comprendre aux élèves qu’ils doivent gérer la planète en assumant à la fois les impératifs du développement économique, les exigences envers l’environnement et les équilibres dans la société humaine ? Professeur à Toulon, Philippe Cosentino a imaginé un jeu tout en équilibre entre ces 3 composantes et entre le ludique et le sérieux pour que tous les élèves puissent accéder à la notion du développement durable. Son jeu est mis gratuitement à la disposition des enseignants.
Un modèle venu du quotidien
Ne dites pas à Philippe Cosentino que son jeu est génial. Cet enseignant de SVT expérimenté, interlocuteur académique TICE, auteur déjà d’une quinzaine d’animations et de plusieurs jeux sérieux pour la SVT (Leuco War c’est lui aussi) ne voit plus que les défauts de son dernier jeu « Sim ‘Agro ». Au Café pédagogique, on trouve ce logiciel absolument génial pour faire comprendre en jouant ce qu’est réellement le développement durable. L’équilibre entre le jeu, très prenant car il se passe toujours quelque chose d’inattendu, et le sérieux, rendu explicite à travers les évaluations et les stratégies que doivent trouver les joueurs, est simplement remarquable.
Toujours modeste, Philippe Cosentino explique que le modèle du jeu lui a été soufflé par son environnement quotidien. « J’habite dans une vallée avec des vergers et ce qui se passe dans le jeu c’est ce que j’observe dans la vie réelle », nous a-t-il dit. Dans Sim Agro vous héritez d’un terrain planté de romarin et de quelques arbustes au bord d’une rivière. Vous devez développer un verger en plantant des cerisiers et des oliviers.
L’équilibre impossible entre les 3 composants de l’EDD
Apparemment c’est simple. Sauf qu’il faut concilier votre projet avec ses effets sur l’environnement et sur le voisinage. Il vous faudra résister à la tentation de mettre trop d’engrais ou de pesticides sur vos arbres sinon les pêcheurs manifesteront leur mécontentement. Les sangliers viendront visiter votre verger mais si vous cloturez les chasseurs du village ne seront pas contents. Le berger sera votre ami si vous laissez ses moutons venir chez vous pour débroussailler. Mais les moutons vont brouter quelques uns de vos arbustes. Le débroussaillage coute lui aussi de l’argent. Ne pas le faire c’est voir un incendie ravager le verger. Il y a encore bien d’autres interactions possibles qui donnent à Sim Agro son aspect ludique et stratégique. Tout au long du jeu l’élève reçoit des informations sur son score (noté sur 20) écologique, économique et citoyen.
A priori le jeu est destiné à des premières S et renvoie à la notion d’agrosystème. Mais P Cosentino l’utilise aussi en seconde avec succès. Il peut probablement être utilisé aussi en fin de collège aussi bien en SVT qu’en géographie.
Un jeu sérieux et ludique
Il y a deux impératifs du jeu sérieux destiné à l’éducation nationale que P Cosentino a parfaitement respecté. D’abord le jeu tient sur une séance de cours. « Avec mes élèves, je leur laisse d’abord 5 à 10 minutes pour découvrir le jeu en faisant n’importe quoi », nous a-t-il dit. Ce temps permet de comprendre le fonctionnement du jeu. L’élève découvre que ses actions ont un effet et les aides dont il dispose. Ensuite P Cosentino passe à la phase de jeu. En 20 à 30 minutes les élèves peuvent faire un nombre d’annuités dans le jeu fixé à l’avance, voir les 40 annuités. « On passe ensuite au débat », nous dit P Cosentino. « Je fais remonter les frustrations : les élèves expliquent les choix qu’ils ont fait et ce qui s’en est suivi ».
Les élèves ont alors accès à deux estimations. D’une part à celle qui est inclue dans le jeu. L’élève obtient un score dans les trois dimensions du développement durable. D’autre part la classe construit de façon explicite le modèle de développement durable. « On se rend compte des impacts des apports humains. On voit qu’un agro système n’est jamais équilibré. Et qu’il n’y a pas de réponse miracle pour assurer le développement durable. Mais un sens des responsabilités et la recherche d’équilibre ».
Philippe Consentino nous a fiat un beau cadeau avec Sim Agro. Il a encore d’autres projets en développement et nous n’avons probablement pas fini de parler de lui. D’ici là essayer Sim Agro c’est l’adopter…
François Jarraud