Organisé à Pau par le Département des Pyrénées-Atlantiques en partenariat avec l’Education nationale, le forum Eidos 64 a réuni des experts et des enseignants, de tous niveaux et de tous territoires, autour d’une question centrale : comment le numérique transforme-t-il le moment et le lieu des apprentissages ? Les échanges d’analyses et les partages d’expériences ont éclairé l’ampleur du chantier : le numérique invite à reconfigurer l’espace et le temps de l’éducation, à inventer de nouvelles pratiques et organisations scolaires, à relier plutôt que séparer, à nous libérer de ce qui nous enferme, qu’il s’agisse des murs de la classe, des grilles d’emploi du temps, des cloisonnements disciplinaires, des injonctions programmatiques, de nos représentations mêmes. Et si, pour mieux accomplir ses missions, l’Ecole se faisait un peu plus buissonnière ? Eidos 64 lui a assurément tracé de belles lignes de fuite…
Espace-temps : de nouvelles formes d’apprendre ?
Pour Bruno Devauchelle, enseignant-chercheur à l’Université de Poitiers, le numérique dérange le monde scolaire et universitaire, amené à questionner ses modes habituels de travail et d’organisation : « de l’élève qui apprend à l’organisation apprenante, quel avenir de l’apprendre dans un monde numérique ? » Michel Foucault, rappelle-t-il, classe les opérations qui constituent le sujet scolarisé en fonction de quatre paramètres : l’espace, le temps, la ritualisation, le regard. D’après Guy Vincent, Bernard Lahire et Daniel Thin, les traits de la forme scolaire, conçue comme un modèle de socialisation, sont les suivants : un univers séparé pour l’enfance, des règles dans l’apprentissage, l’organisation rationnelle du temps, la multiplication et la répétition d’exercices. La pédagogie traditionnelle, selon Jean Houssaye, présente sept caractéristiques majeures : le maître au centre, une relation pédagogique impersonnelle, un élève ayant besoin de l’enseignant, la transmission d’un savoir coupé de la vie, un modèle normatif, un modèle bureaucratique, un modèle charismatique. L’organisation de l’École s’est adaptée à cette pédagogie : organisation physique de la classe, structure classique et répétée des leçons, tâches et activités qui dépendent de l’enseignant, gestion du temps qui limite le temps passé à chaque tâche, formes d’interactions qui privilégient l’exposition, l’interrogation, l’évaluation .
Or, en 40 années, l’avancée technologique liée à l’informatique s’est insérée dans toutes les strates de la vie personnelle et professionnelle. La généralisation des équipements et des usages se caractérise par le décalage entre ce qui se passe dans les familles et ce qui se passe dans le monde scolaire : « l’Ecole est déclassée », insiste Bruno Devauchelle. La transformation culturelle à laquelle nous assistons repose sur plusieurs éléments clés : l’accès à l’information ; la communication permanente qui nous fait perdre la capacité à l’absence, au silence, qui nous rend impatients de l’autre ; l’automatisation des processus interhumains ; la transformation du rapport au temps sur le mode de l’accélération.
L’arrivée du numérique dans la société nous pose alors bien des questions : le lieu scolaire peut-il encore « limiter les savoirs circulants à ceux qu’il définit dans ses programmes » ? alors qu’il y a désormais accès possible de tous à l’information, comment sont vécues les limites imposées par le système scolaire ? le « potentiel d’apprenance » proposé par les moyens numériques étant très supérieur à ce que propose l’école (en temps, quantité, qualité), les temps de l’apprendre sont-ils toujours encadrés par elle ? les dynamiques d’échange, de partage, de communication étant porteuses de nouvelles formes sociales (vivre ensemble, bien commun…), le modèle de la réussite individuelle, base du parcours scolaire, est-il encore suffisant pour assurer la réussite sociale ? comment, par exemple, accorder de la place aux questions des élèves quand il devient plus facile de poser une question sur un forum en ligne qu’entre les murs de la classe ?
La question de l’espace devient alors centrale. Il y a une symbolique des locaux scolaires, rappelle Bruno Devauchelle : pour s’en convaincre, il n’est qu’à voir combien de nombreux bâtiments ressemblent à des monastères ! C’est que les lieux instituent et ritualisent l’acte scolaire. C’est aussi que l’Ecole a été conçue pour faire de la distance : elle définit un espace-temps symbolique à distance de la famille, de la vie active, de la vie professionnelle ; son fonctionnement organise le temps séparé et/ou conjoint de ses usagers. L’avènement de l’informatique dérange physiquement l’Ecole : où mettre les ordinateurs, dans l’établissement ou dans la classe ? où « ranger » ( !) les outils mobiles ? quelle nouvelle organisation spatiale de la classe si l’on veut rendre les ordinateurs disponibles ? quelle place de l’enseignant dans cet espace plus éclaté ? quelles nouvelles relations pédagogiques alors tisser avec les élèves ?… Depuis longtemps, l’informatique bouscule l’organisation scolaire, posant des problèmes de maintenance, d’accès aux salles, de pilotage, de sécurité, d’infrastructures, d’architecture … au point que certains seraient tentés de dire : n’utilisez pas l’informatique !
« Océan des savoirs », « tsunami », « galaxie des connaissances » : ce qui se construit avec le numérique, c’est « un nouvel environnement personnel techno-cognitif ». Les Terminaux Personnels Mobiles Connectés sont désormais au cœur de la question des équipements des élèves : ils sont à portée de la main, invitant à en trouver l’usage pertinent dès qu’on en a besoin. Le local et le distant sont dorénavant réunis et continus : la « continuité communicationnelle et informationnelle » devient un incontournable de « notre vie numérique ». Conséquences pour les jeunes : apprendre est encore davantage un enjeu du quotidien et le sera tout au long de la vie ; apprendre ne peut plus se réduire au domaine scolaire. Conséquences pour les enseignants : il faut passer d’un pilotage a priori à un accompagnement a posteriori ; il devient essentiel de penser le degré de guidance. Conséquences pour l’institution : elle doit repenser l’accès aux savoirs dans l’ensemble de la société, inventer la sortie du modèle imposé par la forme scolaire, reconfigurer l’établissement autour des lieux de travail personnel de l’élève.
Apprendre, ça prend du temps, rappelle Bruno Devauchelle. Nous apprenons par expérience, par imitation, par interaction. Apprendre ne se réduit pas au seul espace-temps scolaires, aujourd’hui encore moins qu’hier. La création de l’Ecole a industrialisé et professionnalisé la transmission dans la forme scolaire : elle est désormais interrogée par les formes numériques. Dans le triangle pédagogique, il y avait l’enseignant, l’élève et le savoir, pour des tâches telles qu’enseigner, former et apprendre : il y a désormais l’adulte, l’apprenant et l’information, pour des tâches telles que maîtriser, re-lier et comprendre. Dans l’établissement, la salle de classe est amenée à être périphérique : au centre doit se construire un espace de vie et de travail des élèves (avec des ressources pour apprendre, avec l’accompagnement structurant d’adultes, avec des possibilités de travail en groupes) ; autour de lui, des salles de travail collectif (pour l’expérimentation, l’imitation, l’entraînement, l’observation, la réception) ; sont encore à favoriser les liens physiques et numériques avec le monde extérieur. « Il faut supprimer les salles informatiques, il faut supprimer les CDI, lance Bruno Devauchelle : c’est tout l’établissement qui est appelé à devenir CDI, ou mieux encore « maison de la connaissance ». « La forme de l’Ecole est morte ! » : il nous faut « repenser des espaces de socialisation et d’accès aux savoirs. »
Le « temps de l’apprenance » englobe et dépasse le temps scolaire. Le numérique offre à chacun « un environnement personnel techno-cognitif permanent ». Avec cet environnement, chacun est invité à construire son parcours de vie, en interaction avec les autres. L’enjeu pour l’école est de se resituer dans ce nouvel espace-temps en permettant au jeune de maîtriser cet environnement complexe. L’Ecole sépare, conclut Bruno Devauchelle : « Souhaitons que le numérique soit l’occasion de retrouver du lien, cette complexité de l’humain en développement ». Alors, dans ces « nouvelles maisons de la connaissance » à bâtir ensemble, « nous pourrons, selon le vœu d’Edgar Morin, continuer à vivre ».
Face à l’explosion des savoirs
Dans une table ronde animée par Jean-Pierre Véran, Inspecteur d’académie honoraire, échangent Annie Côté, enseignante de français à Québec, Jean-Louis Durpaire, Inspecteur général honoraire, et Jean-Paul Moiraud, Directeur adjoint de la faculté de droit virtuelle à l’université Lyon 3. De multiples frontières, entre l’école et le monde et au sein même de l’école, conditionnent la « forme scolaire » : sanctuarisation de l’espace, sacralisation des savoirs, « silos disciplinaires » avec leurs programmes étanches, organisation une heure-une classe-une salle-un enseignant, opposition entre classe et étude, cours et vie scolaire… La mutation culturelle en marche, est-il souligné, remet en question cette structuration fermée : les savoirs légitimes ne sont plus seulement délivrés à l’école, pas plus qu’ils ne sont à l’Ecole seulement accessibles par la médiation du maître ; des savoirs non scolarisés sont disponibles de n’importe où, grâce aux réseaux numériques, et émanant d’une diversité d’instances culturelles, médiatiques, scientifiques… « Les savoirs ont explosé », insiste Jean-Louis Durpaire : les technologies vont beaucoup plus vite que les formes scolaires ! Déclencher le processus du désir d’apprendre est un impératif, un enjeu à partager, y compris avec la famille. Selon Jean-Louis Durpaire, les disciplines sont secondaires : ce qui est important n’est pas disciplinaire. Il faut aussi débattre des règlements intérieurs, ainsi que changer le bac et le DNB. Connecter à la vie les apprentissages et les évaluations est devenu capital. Pour Jean-Paul Moiraud, « réel » et « virtuel » sont entremêlés en permanence : cela génère de la complexité, cela oblige à les penser ensemble. « Apprendre, c’est se tenir droit », écrivait Jean-Baptiste de la Salle : est-ce encore tenable ? interroge Jean-Paul Moiraud. La rigueur du corps est-elle la rigueur intellectuelle ?
Côté lettres : ouverture québécoise
Annie Côté enseigne le français à l’école secondaire des Sentiers à Québec. Elle y met en œuvre des méthodes pédagogiques innovantes pour libérer, fortifier et stimuler les apprentissages. L’aménagement de l’espace lui-même est transformé, en concertation avec les élèves : pas de pupitres ni de manuels, des sièges confortables et même un canapé pour favoriser les temps d’échanges, un espace où les élèves peuvent circuler librement, un lieu de vie autant que de travail, plus proche d’un cybercafé que d’une salle de cours traditionnelle. L’espace y est propice à la pédagogie de projet et à la ludification des savoirs : les élèves y travaillent des compétences (qui sont aussi des valeurs) comme la responsabilité, l’autonomie, la collaboration, la créativité… Quelques exemples : un scénario pédagogique futuriste amenant des élèves décrocheurs à repartir aux origines de l’écriture et à reconstituer le savoir à l’aide d’énigmes ; des « devoirs » de français donnés et réalisés via Twitter, donc en 140 caractères ; une enquête policière qui amène les élèves à travailler différentes disciplines en enquêtant sur l’assassinat d’un enseignant de l’établissement… Ainsi les élèves ont-ils « l’impression de jouer plus que de travailler » : ainsi (re)trouvent-ils le plaisir d’apprendre. Avec quelle efficacité, demande une collègue ? Difficile à mesurer, mais on sait, répond Annie Côté, que les nouvelles technologies motivent les élèves et que la motivation a une forte influence sur les résultats. L’enseignante elle-même a l’impression d’être plus efficace parce qu’elle offre à chacun la possibilité de se confronter à des situations-problèmes et de travailler à son rythme, parce qu’elle se donne la possibilité de mieux accompagner chacun dans ce cheminement.
Les questions que pose Annie Côté sont nombreuses et fortes. Elles bousculent nos usages et nos représentations, elles remettent souvent en cause des « visions biaisées par l’expérience », tant on cherche souvent à reproduire ce qui a marché avec soi. Comment lutter contre l’ennui à l’Ecole ? Comment lutter contre le décrochage ? Comment intéresser à la langue française des jeunes à qui on a expliqué qu’ils étaient « pourris » ? Comment déconstruire la « résignation apprise » ? Comment aider les jeunes qui ont un « profil kinesthésique », qui ont besoin de bouger pour apprendre, qui aiment manipuler ? Qu’est-ce qui fondamentalement fait l’intérêt de l’enseignement du français, autrement dit comment aider les jeunes à aimer les mots ? Est-ce que tous les élèves doivent être évalués de la même manière, le même nombre de fois, au même moment ? Quel est l’intérêt réel de multiplier les évaluations de type « examen blanc » à moins de considérer que les apprentissages doivent être mécaniques et les élèves des singes savants ? Est-ce que le plaisir est culturellement et scolairement louche ? Est-ce vraiment le contraire de l’effort ? Qu’est-ce qu’avoir le contrôle dans une classe ? Est-ce toujours nécessaire ? Est-ce que si les élèves se déplacent on a « perdu le contrôle » ? Est-ce que les nouvelles technologies font gagner ou perdre du temps ?… Retenons du vent du large, en l’occurrence du Québec d’Annie Côté, cette double et belle invitation : faire en sorte que même si les tables sont fixées, les esprits ne le soient pas ; miser sur la capacité des enseignants à inventer de nouvelles façons de faire, miser sur leur liberté.
Côté chiffres : pédagogie du big data
Laurent Bruneau, professeur de SES au Lycée Louis Barthou à Pau, Isabelle Martin, déléguée académique au CLEMI, et Christian Faitout, IA-IPR, animent un atelier sur une question encore peu explorée et pourtant cruciale : comment intégrer la démarche open data dans le cadre pédagogique. Avec le web, la production de données explose et atteint même une taille critique : c’est le « big data », qui rend nécessaires de nouvelles approches pour leur stockage, leur sélection, leur traitement, qui oblige à apprendre comment les mettre en relation, les présenter, les visualiser, les diffuser. « L’open data » renvoie au processus de mise à disposition des données publiques. Une nouvelle compétence est ainsi à développer chez les élèves : reprendre la main sur les données pour leur donner du sens. C’est d’ailleurs une façon de leur montrer que les trois quarts des métiers qu’ils feront demain n’existent pas encore : en particulier ceux-là même qui tournent autour du traitement des données.
Où trouver ces données ? Par exemple sur le site de l’INSEE ou sur data.gouv.fr, chez des agrégateurs comme Eurostat, la Banque mondiale, le FMI, les collectivités territoriales, chez les géants du web comme Wikipedia ou Google.trends, chez des acteurs privés comme la NASA… Les pistes pédagogiques sont variées : travailler sur les questions de traces et d’identité numérique avec le site de la CNIL, rechercher et confronter les informations en ligne, distinguer données structurées et non structurées par exemple en réalisant des enquêtes avec questions ouvertes ou fermées, travailler la construction de l’information par exemple en recensant et traitant des données sur les flux à l’œuvre dans l’établissement (consommations, déchets)…
Laurent Bruneau explique ainsi comment une élève a lancé un projet de recensement des places de parking réservés aux handicapés sur l’agglomération de Pau : elle a créé un site internet, mis en place une carte collaborative ouverte aux habitants. L’activité pédagogique présente un enjeu fort de cybercitoyenneté : produire une information utile aux habitants, faire pression sur les pouvoirs publics pour qu’ils ouvrir leurs données sur le sujet. Isabelle Martin évoque encore des projets lancés dans l’académie comme le concours « Mon Aquitaine dans 40 ans » ou la récente constitution d’un groupe de 17 enseignants de toutes disciplines : chacun sur un thème qu’il a choisi va tenter à partir de données à extraire de faire produire par les élèves de l’infographie, en image fixe, ou même en vidéo. Des outils sont évoqués pour aider à développer ce rapport ludique aux chiffres : easel.ly, datawrapper.de, Piktochart, Powtoon …
De tous côtés : à sauts et à gambades
A travers plus de 50 ateliers, d’une discipline à l’autre et par-delà les disciplines, le forum Eidos 64 invite chacun à la circulation et au partage, des idées et des pratiques.
Marie Soulié, professeure de français au Collège Daniel Argote à Orthez, Bruno Vergnes, professeur de français au Collège du Vic-Bilh à Lembeye, Olivier Massé, IA IPR de Lettres, dans l’Académie de Bordeaux, montrent comment abattre les cloisons en faisant créer par les élèves des audioguides pédagogiques, comment travailler écrit et oral en faisant le mur de l’établissement, par le numérique, des voyages et sorties scolaires. Cécile Monchauss, professeure-documentaliste, et Christian David, CPD arts visuels, expliquent comment faire faire une bande-annonce de livre à l’aide d’outils en ligne comme Powtoon, Wideo ou Prezi tout en validant des items du B2I.
Vincent Audebert, IA-IPR de SVT dans l’académie de Créteil, présente une expérimentation de BYOD : l’utilisation des smartphones, et plus généralement du matériel personnel de l’élève, dans le cadre de l’enseignement des SVT. Objectifs : la personnalisation des apprentissages, l’interaction et la réflexivité, la mise en œuvre de la « pédagogie des mousquetaires » (« Que chacun travaille pour tous et tous pour un ! »…
Céline Souleille, professeure des écoles et Bergeot Vincent, animateur, présentent un travail pédagogique mené avec OpenStreetMap, projet de cartographie libre qui permet d’améliorer, compléter, corriger et réutiliser une carte du monde : une classe de CM1 en Gironde a réalisé des relevés de terrains, publié des modifications, échangé avec des contributeurs d’autres villes ; la classe a ainsi ouvert le cadre espace / temps traditionnel des apprentissages en s’appropriant le numérique comme nouvelle forme de partage des savoirs.
Au Collège Jean Rostand de Capbreton, Florian Rudelle, professeur de mathématiques, utilise Evernote, une application qui permet de capturer des informations, sous forme de notes, images, vidéos, sons ou pages web, et qui sert aussi d’espace numérique collaboratif pour la classe.
Aurore Coustalat, professeure d’anglais, mène au Collège Daniel Argote d’Orthez un ambitieux et passionnant projet Erasmus+, Eurotopia, qui permet aux élèves de franchir même les frontières : sur trois années, cinq pays européens (Allemagne, Danemark, Espagne, Italie et France) vont échanger via la plateforme eTwinning, le chat, la visioconférence, le travail collaboratif en ligne et les voyages dans chaque pays pour créer la ville européenne idéale du futur sur un logiciel en 3D. Eurotopia doit permettre aux apprenants d’améliorer leurs compétences en communication, ainsi que de les sensibiliser à leur futur rôle de citoyen européen.
Jean-Pierre Véran, Inspecteur d’académie honoraire, et Carole Blaszczyk, IA-IPR EVS, évoquent l’expérimentation des Centres de Connaissances et de Culture (les 3C). Ces espaces, encore à inventer, cherchent à dépasser les cloisonnements entre disciplines, à combattre le désœuvrement, à favoriser l’autonomie, à développer des compétences transversales… Il s’agit de mettre en place des parcours plus que des cours. Les valeurs humanistes transmises par l’Ecole sont désincarnées, regrette Jean-Pierre Véran : quel citoyen l’Ecole construit-elle par ses pratiques ? Les 3C dérangent l’ordre scolaire au point que celui-ci, se désolent les participants de l’atelier, semble leur opposer sa grande force d’inertie pour que rien ne change. Pourtant, souligne Jean-Pierre Véran, des marges de manœuvre existent (l’organisation 1 heure – 1 prof – 1 matière n’est nulle part fixée dans la loi) et des outils aussi (comme le CVL ou le Conseil pédagogique)…
A Eidos 64 2015, on a entendu l’Ecole craquer de tous côtés. La créativité enseignante, dont le forum s’est fait le bel écho, témoigne en tout cas d’une profonde aspiration. A ce qu’on cesse de découper et d’entasser les savoirs pour aider chacun à « grandir en connaissances ». A ce que bougent les lignes, à l’Ecole comme dans le monde. Enfin ?
Jean-Michel Le Baut
Bruno Devauchelle dans le Café