De quoi peuvent parler profs et élèves ce 12 janvier ? De la manifestation. Près de 4 millions de Français ont défilé partout sur le territoire national le 11 janvier. Ils étaient plus d’un million à Paris, plus de 100 000 à Rennes, Montpellier, Bordeaux, 300 000 à Lyon, 70 000 à Clermont-Ferrand, 50 000 à Nancy et à Metz, 10 000 à Châteauroux (un quart de la ville) pour ne citer que ces seules villes. Parmi eux de très nombreux enseignants, d’innombrables lycéens, collégiens et même écoliers qui partagent une expérience commune.
A Paris, plus d’un million de personnes était réuni dans un cortège exceptionnel. La manifestations très compacte était aussi très silencieuse. Pas de slogan. Des applaudissements par salves ou par vagues impressionnantes. Une foule familiale, chaleureuse, applaudissant les policiers. Une foule qui a vécu un moment inoubliable ensemble et qui a tardé à se séparer.
A Brest, près de 20 000 personnes se sont rassemblées place de la Liberté. » Ce qui frappait, c’était la volonté d’unité : aucun slogan clivant, aucun signe d’appartenance politique », nous a confié Jean-Michel Le Baut. « La diversité était reconnue comme valeur : celle des âges, des origines, des pensées, qui permet la rencontre de personnes âgées et d’adolescents, de femmes voilées et de libres penseurs…. A intervalles réguliers durant la marche déferlait une vague d’applaudissements : adressée à qui à quoi ? Nul besoin de le dire tant cela allait de soi, tant le respect de la vie humaine, de la liberté de penser et du droit de rire, la lutte contre l’obscurantisme, le fanatisme et l’antisémitisme étaient pour tous des évidences, ce qui nous porte et nous anime dans ce chemin partagé ».
A Rennes, plus de 100 000 personnes ont manifesté. « C’est du jamais vu depuis la Libération », nous dit Julien Cabioch. » Après un rassemblement Esplanade Charles-de-Gaulles, des familles entières ont défilé sur les quais de la Vilaine de 15h à 17h. Une manifestation digne, peu de bruit et aucun débordement. Des vagues d’applaudissements retentissaient toutes les dix minutes. De nombreux parents expliquaient à leurs enfants la nécessité d’être là, le sens de certains slogans et surtout des nombreuses caricatures de Charlie Hebdo visibles dans le cortège ».
« Ma présence ici est une évidence. Cette barbarie m’a bouleversée. » m’explique Amélie, jeune enseignante en espagnol dans un lycée de Rennes. « Nous avons vécu un temps de recueillement très digne avec mes élèves. Mais je ne suis pas sûre que l’école puisse changer vraiment les mentalités si les enseignants et certaines familles n’ont pas le même discours et ne marchent pas main dans la main pour l’éducation des enfants. »
Tristan, élève en 1ère ES, « je me réjouis de cette union en France. Nous donnons une image positive de notre pays. Un pays debout face au terrorisme. » Valentine, 12 ans, « C’est la première fois que je me mobilise pour une cause. J’avais même des frissons quand j’ai vu tout ce monde dans la rue. » Les rennais ne manquaient pas d’imagination, on a pu voir un long fil à linge avec de nombreuses Unes de Charlie Hebdo et lire « mes cartouches (d’encres) seront les plus puissantes » , « Attention, dessiner tue ! »