« Pour pouvoir gagner il faut jouer ». Selon l’OCDE, le vieil adage s’applique à merveille à la maternelle. L’organisation démontre grâce à Pisa qu’à l’âge de 15 ans il y a un net écart de niveau entre les enfants qui ont eu plus d’une année de maternelle et ceux qui n’ont pas bénéficié du pré élémentaire. Selon l’OCDE cet écart représente 51 points pour les compétences en maths, soit l’équivalent d’une année de scolarité. D’où l’intérêt de se demander : à qui profite la maternelle ?
Selon l’OCDE si 67% des enfants de milieu populaire vont en maternelle c’est 82% de ceux des milieux favorisés. Autrement dit, la maternelle profite surtout à ceux qui en ont le moins besoin. Avec quelques exceptions nationales, comme par exemple en Allemagne.
Examinons ce qu’il en est en France. Si la scolarisation en maternelle est presque universelle à partir de 3 ans, la France se singularise par un des écarts les plus forts entre les enfants qui bénéficient de la maternelle et ceux qui ne le suivent pas. Des pays de l’OCDE, seule la république slovaque constate un écart plus important. La France est aussi un des pays où la situation sociale commande le plus la scolarisation en maternelle. La France serait au 8ème rang sur les 37 pays de Pisa.
C’est d’ailleurs ce que nous a dit la récente étude de la Depp sur la scolarisation à deux ans. Avec un léger progrès en 2013, la scolarisation à 2 ans ne concerne toujours que 12% des enfants. Cette légère remontée de 2012 à 2013 se situe dans une tendance longue d’effondrement de la scolarisation à 2 ans. De 2000 à 2013 on est passé d’un taux de scolarisation de 35% à 12% seulement, révèle une étude de la Depp. C’est que durant les deux principaux quinquennats, les suppressions de postes ont été effectuées prioritairement aux dépens de ces classes.
L’étude de la Depp dévoile aussi la géographie de cette scolarisation. On pourrait s’attendre à ce qu’elle soit forte en éducation prioritaire. C’est le cas puisque 20% des enfants de ces zones sont scolarisés à 2 ans. Mais on voit aussi que cela ne concerne pas les territoires les plus difficiles. Par exemple le taux de scolarisation dans le 93 est faible. C’est dans les régions rurales, là où il reste des places en classe, ou dans l’ouest, là où le public est en concurrence avec le public, que la scolarisation est forte. Autrement dit, pour l’institution scolaire la scolarisation à deux reste une variable d’ajustement des postes ou de promotion. L’objectif social reste secondaire.
Le plan Peillon pour l’éducation prioritaire prévoit la scolarisation des enfants de moins de 3 ans à hauteur de 30% d’ici 2017. Aujourd’hui les taux sont de 2 et 3% à Créteil et Versailles. On mesure le chemin à parcourir. Et ses obstacles. Faire bénéficier les enfants des quartiers populaires de la scolarisation à deux ans c’est construire de nouvelles écoles pour des municipalités pauvres. C’est aussi convaincre des parents qui sont moins convaincus que d’autres des bienfaits de la maternelle et plus attachées au maintien de la mère au foyer.
F Jarraud
Pisa in focus 40
http://www.oecd.org/pisa/pisaproducts/pisainfocus/pisa-in-focus-n40-(eng)-final.pdf
Etude Depp
http://cache.media.education.gouv.fr/file/2014/55/2/DEPP_NI_2014_20_Pres_[…]
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