Il y a des lycées où on ne veut pas le savoir. Benoit Boiteux, proviseur du lycée professionnel Guimard de Paris, sait exactement combien d’élèves sans papiers compte son établissement. Le lycée, déjà exemplaire en ce qui concerne la mixité dans une filière où elle ne va pas de soi, le bâtiment, se soucie d’accompagner ces jeunes dans leur formation.
« Ce sont des jeunes qui ne posent pas de problèmes », nous avait dit B Boiteux, lors d’une visite en octobre 2013. Toufik, Lucien, Mohamed, nous les avions rencontré lors d’une réunion organisée dans le lycée par une association de soutien. Certains venaient d’Afrique sub saharienne. La plupart du Proche Orient. Mohamed a mis plusieurs mois à venir d’Afghanistan. Il fuit la guerre et n’en dira pas plus. Toufik vient lui de Syrie et il est poussé par les mêmes raisons. Lucien est venu du Cameroun « très facilement » nous dit-il.
Seuls en France ils ont de grosses difficultés pour assumer leur vie quotidienne, même s’ils ne sont pas expulsables tant qu’ils sont mineurs. Là aussi les services du lycée veillent au grain. La vie scolaire suit de près ceux qui n’ont plus de toit ou de quoi déjeuner. Les associations du quartier en lien avec le lycée trouvent des solutions mais certains élèves dorment dans la rue. Cela ne les empêche pas d’être présents aux cours où leur bonne volonté et leur implication est saluée par leurs professeurs.
Tous ont choisi les formations du bâtiment parce qu’ils savent qu’il trouveront facilement un emploi. L’apprentissage du français est la grosse difficulté pour les épreuves écrites du bac pro. Mais dans ce lycée, on a l’habitude de ces élèves et les professeurs savent y faire. A la sortie du lycée, leurs camarades français trouvent immédiatement un emploi correctement rémunéré. Ils sont compétents sur un marché de l’emploi où les salariés manquent. Beaucoup deviendront de petits patrons.
Ce n’est pas le cas de ces lycéens sans papiers. Faute de papiers ils ont du mal à valider les stages et donc le diplôme. Faute de papiers ils ont du mal à trouver un employeur officiel alors que le secteur recherche ces jeunes bien formés et qui ont développé des capacités sociales assez extraordinaires. Ils n’ont aucun mal à trouver un emploi au noir…
Une pétition circule chez RESF pour la régularisation des élèves sans papiers du lycée Guimard. Ce sont des jeunes qui ont pleinement démontré leur capacité d’intégration. Ils ont un métier en main et des entreprises les recherchent. Leur régularisation devrait aller de soi.
François Jarraud