« Il faut investir dans l’école de la République et en particulier dans ses enseignants, auxquels nous devons rendre hommage et qu’il faut chérir », a déclaré le premier ministre le 8 avril dans sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale. Des paroles flatteuses mais l’Ecole n’est apparue dans son discours que durant deux minutes et en fin de parcours. Elle n’est plus la priorité d’un gouvernement tendu vers le redressement économique. Manuel Valls annonce vouloir garder le cap de la refondation mais il impose une pression administrative et budgétaire importante. Il maintient la réforme des rythmes mais annonce des « assouplissements ».
Maintien de la refondation
C’est au terme de son discours de politique générale que le premier ministre a abordé le thème de l’école , en des termes volontaires, comme la tonalité générale de son intervention. « Investir dans l’école et dans ses élèves, c’est réinvestir la République de sa mission première. Chaque enfant, quel que soit son milieu social, doit bénéficier des mêmes chances ». » Le redressement de l’école doit être poursuivi ! » affirme M Valls. Il cite nommément : réforme des métiers, rétablissement de la formation des maîtres, lutte contre l’échec scolaire, priorité donnée au primaire et relance de la scolarisation des moins de trois ans. C’est à dire les aspects déjà engagés par Vincent Peillon. Rien n’est dit des chantiers de l’année : le collège, la réforme du lycée par exemple.
Les rythmes maintenus mais assouplis jusqu’où ?
Très attendu sur les rythmes scolaires, Manuel Valls estime que c’est » une bonne réforme » car « grâce à elle, un nombre accru d’enfants accède à des activités périscolaires, sportives et culturelles fortement complémentaires de l’éducation dispensée par les enseignants ». La gestion du temps strictement scolaire n’est pas évoquée par le premier ministre. Il ajoute : » j’entends néanmoins les remarques de bonne foi formulées par les élus. Ainsi, le cadre réglementaire sera assoupli après les nécessaires concertations avec les enseignants, les parents, les élus et bien sûr les maires ».
Interrogé par le Café pédagogique, le cabinet de Benoît Hamon précise qu’il n’y aura pas d’assouplissement sur la date d’application de la réforme des rythmes. « Il n’y aura pas de report, pas de retard, pas de libre choix ». Mais « pour ne pas passer à coté de projets pédagogiques intéressants » et « pour permettre l’application » de la réforme, on « tiendra compte des réalités de terrain ». « Le décret reste inchangé » mais les services académiques ont des pistes juridiques pour s’adapter à des situations variées. L’exemple qui est donné est troublant puisqu’il s’agit d’une école qui utiliserait tout le mercredi pour faire du ski, c’est à dire le maintien de l’école sur 4 jours ! L’assouplissement ira-t-il jusque là ? Est-ce juridiquement possible ? Au ministère on annonce des concertations. La réponse n’est pas très claire.
Dans un entretien donné au Café en décembre, Georges Fotinos signalait 5 pistes de sorties dont l’article L401-1 du code de l’Education qui permet les expérimentations (ex article 34) et l’article L521-1 qui permet des adaptations locales du calendrier scolaire. Les deux articles suivants précisent par exemple que cette adaptation peut être justifiée par le sport ou des « circonstances locales ».
Des économies budgétaires importantes
« Nous réaliserons 50 milliards d’euros d’économies en trois ans, de 2015 à 2017″, a confirmé Manuel Valls. « L’État et ses agences en prendront la plus grande part, soit 19 milliards d’euros ; 10 milliards d’euros proviendront de l’assurance maladie et 10 milliards supplémentaires des collectivités locales. Le reste proviendra d’une justice accrue, d’une mise en cohérence et d’une meilleure lisibilité de notre système de prestations ». Le premier ministre déposera plusieurs lois. Une loi de finances rectificative pour 2014 sera proposée au Parlement fin avril. Mais c’est seulement au début de l’été que les assemblées connaitront le détail des mesures permettant les 50 milliards d’économie. La double pression sur l’Etat et les collectivités locales aura forcément un impact sur l’Ecole. Mais jusqu’où ? Le 7 avril Benoît Hamon n’a pas confirmé le gel des créations de postes dans l’enseignement.
Une réforme territoriale qui concerne l’Ecole
Le premier ministre a promis une réforme territoriale importante qui va donc concerner également l’Ecole. Le nombre des régions devrait être divisé par deux d’ici 2017. Une nouvelle carte sera proposée par le gouvernement après les élections de mars 2015. « Une nouvelle carte intercommunale fondée sur les bassins de vie entrera en vigueur au 1er janvier 2018 ». Les départements devraient disparaitre « à l’horizon 2012″. Mais avant la clause de compétences générales des collectivités territoriales sera supprimée en vue de » la clarification des compétences. Ainsi, les compétences des régions et des départements seront spécifiques et exclusives ».
C’est donc tout l’environnement de l’Ecole qui sera affecté par les mesures annoncées par le premier ministre. On retiendra du discours le ton volontaire, la volonté d’affirmer l’autorité de l’Etat , par exemple sur les rythmes. Mais surtout que la priorité gouvernementale est ailleurs, dans la lutte contre la crise économique qui est en train de désespérer la population. Si le gouvernement y réussissait, cela aussi aurait des effets, positifs, sur l’Ecole.
François Jarraud
Le discours de M Valls
http://www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2013-2014/20140186.asp#P209248
Fotinos : Comment sortir du conflit ?
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lexpresso/Pages/2013/12/05122013Articl[…]
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