« On a encore beaucoup à faire ». A l’occasion de ses voeux aux enseignants, Vincent Peillon montre sa détermination à aller au bout de la refondation. Mais pour les enseignants, 2014 pourrait bien être une année blanche, rendant encore plus difficile la refondation.
Pourtant l’effort consenti en faveur de l’éducation nationale dans le budget 2014 n’est pas seulement réel. Il est inouï. Dans une situation économique très difficile, imposant un budget d’austérité, l’éducation nationale est le seul ministère à connaître une croissance importante de ses emplois. Pire, il vampirise les autres missions de l’Etat et chaque poste créé à l’éducation nationale est payé par les autres ministères.
Pour autant cet effort exceptionnel de création de postes restera quasi invisible aux enseignants. Les 8 000 postes ouverts dans les classes vont être absorbés essentiellement par du fait de la croissance démographique. Les prévisions ministérielles il y aura 32 000 nouveaux écoliers et 9 000 nouveaux dans le second degré principalement au collège. Dans le second degré, la situation sera meilleure qu’en 2013. Mais globalement le nombre d’élèves par classe ne devrait donc pas sensiblement changer.
Et la revalorisation ? Pour le ministère, le gouvernement consacre plus de 700 millions en 2014 à la revalorisation des enseignants. Mais il compte dans cette somme 600 millions consacrés à la rémunération des enseignants stagiaires de première année, payés dorénavant à temps plein. Evidemment cet effort est imperceptible aux autres. Pour la masse des enseignants, la revalorisation touche le primaire à travers la prime ISAE mise en paiement anticipé fin novembre 2013. Les discussions sur le métier sont quasiment gelées dans le secondaire. La pression salariale va donc rester forte après des années de stabilité du point fonction publique. Le seul gain général est la suppression du jour de carence appliquée depuis le 1er janvier 2014.
Cette situation se traduira en une hausse certaine des tensions. D’abord entre V. Peillon et ses collègues. Pendant combien de temps l’éducation nationale pourra-t-elle jouer un rôle de prédateur sur les autres ministères alors que ses résultats ne sont pas susceptibles d’une amélioration rapide ? Mais aussi dans l’éducation nationale. Pendant combien de temps les enseignants vont-ils supporter une baisse salariale nette, une absence de perspectives de carrière, des conditions de travail dégradées, une dévalorisation de la fonction ?
L’avenir de la loi de refondation va se jouer en 2014. La bataille de l’évolution du métier d’enseignant semble reportée à plus tard ou jamais. La bataille des rythmes semble mal engagée puisque la question va se politiser avec les municipales. Alors que le ministre ouvre deux vrais chantiers de la refondation, ceux du prioritaire et du collège, il semble ne plus avoir de marges de manoeuvre.
François Jarraud