On n’a pas peur de le dire, cette application est incontournable ! Pour reprendre la phrase des développeurs : « CHRONOPerf l’application de chronométrage qui fait plus que chronométrer ». En effet, elle permet de créer, de gérer et d’organiser les groupes, de créer des barèmes automatiquement, de gérer les records, d’évaluer sur les protocoles du DNB, et permet également le lien avec l’ENT PRO EPS que nous vous avions présenté dans le dernier mensuel. Logiquement, le Café pédagogique a rencontré Martial Pinkowski, professeur d’EPS pour qu’il nous explique les différentes fonctionnalités et usages possibles pour le professeur d’EPS.
Avant d’aborder les différents usages, peux tu nous faire un résumé rapide des différentes fonctionnalités de CHRONOPerf ?
CHRONOPerf est une application tournant sous Android proposant d’apporter des plus-values multiples à un enseignant au cours de séances où veulent être prélevées et/ou évaluées des performances. D’un point de vue organisationnel : cette application permet de créer très rapidement des groupes de travail avec des élèves qui se regroupent en classes, en petits groupes au sein d’une classe ou en groupes provenant de plusieurs classes. Par la suite, toutes sortes d’épreuves peuvent être créées et mise en œuvre. Un large panel de possibilités qui va permettre également de créer des ateliers où l’outil numérique sera manipulé par les élèves et livrera d’autres perspectives aux professeurs, plus centrés sur leurs compétences à aider, orienter, corriger et valider.
D’un point de vue fonctionnel : c’est « plus qu’un chronomètre », mais un chronomètre avant tout. L’ergonomie de l’application s’adapte à des formes de pratique abordables très rapidement. Lancer un chronomètre, relever des temps intermédiaires et arrêter le temps, le tout en 2 boutons ! Une fois ces 2 étapes franchies, l’application prend tout son sens au regard de l’immédiateté des informations qu’elle procure. Informations qui peuvent être lues et délivrées par un professeur, mais également par des élèves les détenant de ce fait au même titre. C’est la connaissance du résultat et sa nécessaire analyse qui vient renforcer des usages plus classiques, que nous développerons ultérieurement.
Une liste non exhaustive des fonctionnalités peut se définir autour des notions de : Gestion : « mieux gérer » sa séance, par la possibilité de se fixer des objectifs de nombre de réalisations et de pouvoir les vérifier à chaque instant pour chaque élève. En modifiant également des paramètres pour être plus ambitieux ou revoir ses objectifs à la baisse ; Information : « informer sur la réalisation » de l’élève, en comparant très rapidement les performances entre elles, en les analysant au regard des contenus en déterminant quels sont les points forts et les points faibles ; Connaissance : « introduire de nouvelles notions » comme la vitesse qui s’exprime en km/h ou m/s en fonction de l’activité ; Evaluation : « délivrer une note » sur la base de barèmes constitués en équipe ou au sein du groupe ; Suivi : « suivre les progressions » au travers de différents tableaux permettant de voir une séance, un cycle, un élève
Justement est-ce compliqué de créer un nouveau barème, imaginons pour une épreuve hybride ?
La création d’un barème est un acte très complexe en réalité. Ce type d’application en génère un de manière assez fonctionnelle. Le principe de base est de mettre en avant les performances d’un groupe pour constituer une matrice de note. L’application enregistre des temps et les utilise pour constituer ses propres tables en fonction de l’âge et du sexe. Ce principe est à rapprocher des tables Letessier bien connues dans la discipline. L’application, grâce à ses paramétrages multiples, offre comme avantage de pouvoir distinguer la performance en fonction des âges et du sexe ou pas.
Si on regarde les protocoles d’évaluation au Diplôme du brevet (DNB), notamment en demi-fond, on remarque que le législateur insiste sur des données s’exprimant en km/h. On peut imaginer les difficultés pour les élèves de s’approprier ce type d’information ! Que peut proposer justement CHRONOPerf pour ces critères ?
La vitesse est une notion transdisciplinaire importante. Je la rapproche de la connaissance de l’environnement et des amusantes réponses que l’on obtient dans une installation de type C quand on demande la longueur approximative du gymnase ! Aborder cet aspect physique de l’environnement est absolument intéressant. Grâce à ces nouveaux outils numériques, on délivre facilement et rapidement de nouvelles informations, qui deviennent très vite, pour les élèves des informations essentielles. Ils s’interpellent alors, non plus uniquement sur le temps, mais également sur la vitesse. Cela permet une approche plus concrète des mathématiques ou des sciences physiques en donnant à l’élève des informations précises sur sa vitesse (données à 0,1 km/h près). Comparer cette réalisation sur 50m à la vitesse d’un marcheur, d’un cycliste ou d’un véhicule en ville sur des portions de vitesse limitée éclaire l’élève et donne du sens aux contenus d’enseignement et aux apprentissages.
Dans une situation de course parallèle de 40m haie et 40m plat, mise en place avec un collègue, les élèves ont renforcé leurs acquisition en basculant de l’objectif « j’arrive premier » à celui de « je vais plus vite » grâce à l’influence de la technique de franchissement sur la notion de vitesse.
Nous ne sommes pas ici, dans le cas très précis du demi-fond, mais des comportements similaires se retrouvent à des échelles de vitesse moins importantes. La notion de VMA par exemple est une donnée subjective qui prend toute sa valeur au travers des charges de travail qui lui sont associées. Vitesse, distance et temps. Le numérique a pour fonction de nous aider à utiliser tout ou partie de ces notions. Pour ce genre de travail, nous utilisons une autre application, « EPS Running », tout à fait intéressante pour la régulation de la course et la mise en avant des notions de charge de travail au regard des objectifs que peuvent se fixer les élèves. Un produit performant au regard de sa liaison avec PRO-EPS et la possibilité pour les élèves d’avoir toutes ses réalisations affichées sous forme de vitesses et de courbes sur son espace personnel.
Lors de notre rencontre, tu avais insisté sur la possibilité justement d’adapter les notations, les critères au quart de point près, mais aussi de pouvoir communiquer les notes directement aux élèves et ainsi ne pas attendre la semaine suivante pour le faire.
C’est sur la notion de bilan que j’ai insisté plus particulièrement. Effectivement j’associe très (trop ?) souvent la connaissance du résultat à celle de la note. Elle est pour moi l’aboutissement d’un travail et place sur une échelle le niveau de progression, aussi infime soit-il. C’est pour cela, que la notion de ¼ de point est intervenue. Elle est également le fruit d’une réflexion sur un 2nd niveau de valorisation par rapport au mode intuitif de création de tables de cotations qui laissaient de larges intervalles vides entre les notes entières en fonction des distances d’épreuves. Cette note dont on parle si souvent n’est cependant pas une fin en soi, mais un indicateur probant… C’est un capteur d’attention ! Il est nécessaire de prendre le temps de faire un bilan, en expliquant les raisons d’obtention de cette note.
Je l’ai indiqué plus haut, CHRONOPerf, ce sont des élèves, des cycles, des séances… et donc une somme considérable d’informations qui se suivent et s’enchaînent. Tout d’abord, quantifier la pratique avec précision. Pour moi, il est impossible de faire état de progression sans massification de la pratique, et le premier objectif que je me fixe dans ces activités où la performance accompagne les apprentissages, est un objectif de répétition. Pour chaque élève, je sais précisément quelle est la nature de son engagement au fil d’une séance, dans la leçon, mais également sur l’ensemble d’un cycle ou d’une partie de cycle. Je peux également évaluer l’amélioration de son travail et l’associer à cet investissement. L’effort trouve alors sa justification au regard des résultats et des sensations personnelles qui les accompagnent. Cela permet également de placer l’élève face à sa tricherie.
Autre point important, le gain de temps, et la possibilité pour l’enseignant d’EPS d’enseigner des contenus qu’il n’avait, par le passé, « pas forcément » le temps d’enseigner ?
Avant d’aller plus loin, je souhaite faire part d’un exemple objectif : Nous avons travaillé sur une classe de 5ème, sur l’activité 50m, avec 25 élèves auxquels nous avons imposé 5 passages obligatoires. La leçon était basée sur l’apprentissage de la conservation de la vitesse. Elle reprenait les objectifs précédents de préparation à l’effort et se ponctuait de temps de récupération entre chaque passage chronométré. Suite à cette situation … Un temps de 20mn, acquis sur l’organisation générale grâce à l’outil numérique, a pu être consacré de manière privilégiée à l’annonce des meilleurs résultats de chacun et à la mise en place d’un temps complet sur la récupération passive. Un moment apprécié par les élèves.
L’utilisation d’un outil numérique adapté à la pratique de l’enseignant apporte une plus-value professionnelle, par la mise en avant de son savoir et de ses connaissances pratiques. Vous citez en référence, un article rédigé dans ce contexte, qui compare les pratiques habituelles à celles du numérique sur des objets similaires. Je ne dis pas que c’est grâce au numérique que cela est possible, car chacun est libre de ses contenus au regard de caractéristiques nombreuses, mais c’est bien d’un apport nouveau dans la pratique dont je fais état, dans des situations qui peuvent être diverses.
Enfin, pour ceux qui n’ont pas forcément lu l’article sur PRO EPS, comment CHRONOPerf peut-il être utilisé via l’ENT que vous proposez ?
C’est tout un concept que je vais résumer dans ces quelques lignes. Une conclusion qui vaut pour introduction pour qui n’a pas vraiment de notion sur le niveau de développement que connait le numérique en EPS, mais l’exercice est intéressant ! Tout part de l’impératif de mobilité du professeur d’éducation physique, jusqu’au-delà des limites de son établissement. Un espace qui le contraint à ne pas bénéficier d’une connexion internet permanente dont jouissent les autres disciplines aujourd’hui. L’outil numérique que nous privilégions est la tablette. Elle renferme des applications du type de celle décrite. L’objet commun à ces applications est la liste des élèves qui va permettre de configurer son travail sur la base des groupes qui nous sont attribués. Elle est récupérée par la tablette sur PRO-EPS (Brique ENT en EPS). Une étape qui n’est pas anodine, car cette liste est associée à la création de comptes d’élèves personnalisés et sécurisés. L’application, sur le terrain, fonctionne en mode déconnecté et assume parfaitement son autonomie à tous points de vue. De retour dans un environnement connecté (borne wifi, partage de connexion), il est possible pour le professeur de « télécharger » ses données (avec ou sans les notes) qui appartiennent maintenant également à chacun des élèves à titre individuel.
Mon ambition est de permettre l’exploitation de ces données dans les autres disciplines (comme en mathématiques avec les statistiques de matchs d’ATP Network). Un exemple de travail entrepris avec une classe de 6ème sur la vitesse de course : au début de mon cycle, l’échauffement était axé sur la réalisation d’un tour de terrain (400 mètres) qui, pour mes élèves, devait se réaliser le plus rapidement possible pour en être débarrassé (oui !).
La vitesse de course, sa progression, ainsi que la distance à parcourir en fonction du travail qui suivait étaient des aspects fondamentaux de la nécessaire régulation et du décalage profond entre chaque élève, car, en contrepartie, j’avais quelques élèves pour qui le tour avait tendance à s’éterniser. J’ai donc pris le parti de valoriser les attitudes et pas forcément en imposant la performance comme un exploit, mais comme une réalisation avec des critères. J’ai pu travailler alors sur l’intensité en associant l’effort demandé à un objectif de réalisation particulier. Les résultats obtenus ont été matérialisés par les élèves sous formes de courbes et d’histogrammes simples mettant en évidence la valeur de progression dans la répétition lors d’un échauffement et la variation de l’intensité en fonction du moment.
Une expérience similaire a été menée sur des distances de 200, 400, 600 ou 800 mètres où l’effort se maintenait sur 200m dans les 2 cas et pouvait s’avérer contre-productif sur la même distance dès qu’il s’agissait d’effectuer le double ou le triple de la distance. Que dire du quadruple ! Par la suite, nous avons renforcé ce travail de réalisation avec « EPS Running » au travers d’objectifs liés aux temps ou aux distances et avec des courbes pouvant être cette fois réalisées par l’élève et corrigées immédiatement du fait de leur accessibilité en ligne ! PRO-EPS est donc un prolongement de la séance dans le temps, donnant accès à des informations transmises sur le terrain mieux identifiées dans un cadre plus posé (CDI, salle multimédia, cours dans une autre discipline et à la maison). Ce peut être un lieu de comparaison et d’émulation, car dans le cas très précis de CHRONOPerf, les résultats de l’ensemble de l’établissement sont mis en commun et une liste de records par activités et épreuves met en avant, par catégorie d’âge et de sexe, les élèves les plus performants au travers du temps. PRO-EPS devient ainsi une mémoire pour l’élève et l’établissement, accessible à ses seuls membres.
Propos recueillis par Antoine Maurice
Pour compléter la rencontre voici quelques liens intéressant
La rencontre dans le mensuel 144
D’outils classiques aux outils numériques… CHRONOPerf