En visite à La Réunion, George Pau Langevin a rencontré le 14 juin la « classe passerelle » de l’école annexe Eugène Dayot de la commune du Port. Pour la ministre, « cet exemple doit être relayé pour voir si ailleurs il peut être dupliqué, évidemment dans le respect des spécificités ».
« Une découverte de l’école au rythme de l’enfant », c’est, pour Kathy Lauret-Lucilly, la caractéristique de sa classe. Ici on s’adapte aux rythmes des enfants. Durant les deux premières périodes de l’année, l’enfant est accueilli en classe avec son parent durant deux heures. Il découvre l’école, s’amuse, fait des ateliers toujours en compagnie de son parent. Puis, au fur et à mesure de l’année, enfant et parent restent toute la matinée. Enfin les parents quittent progressivement la classe, pour ne revenir qu’une matinée par semaine. Cela permet de faciliter la séparation entre parents et enfants et aussi de faire entrer les parents dans l’univers de l’école.
Un projet tri-partite
Pour Jean-Paul Burkic, IEN de circonscription, ce dispositif est une réponse aux problèmes importants au niveau langagier mais aussi aux difficultés éducatives des élèves en petite section. Dans ce quartier défavorisé, le projet est développé en partenariat entre l’Education Nationale, la commune et la CAF. Ainsi, la mairie met à disposition une ATSEM titulaire d’un CAP petite enfance, et la CAF une éducatrice de jeunes enfants.
Autre priorité du dispositif, l’éducation à la parentalité
Quelques heures après la visite de l’école Eugène Dayot, lors de la réunion du groupe académique de pilotage de l’éducation prioritaire, la ministre a évoqué la classe passerelle et le témoignage de Maëlle, Maman de Kelsy, qui avait bénéficié du dispositif l’année dernière. « Il faut associer les parents, qu’ils se sentent reconnus et considérés comme des acteurs essentiels de la réussite de leur enfant », dit la ministre. Kathy Lauret Lucilly partage son expérience d’enseignante. « Au début, quand on m’a dit qu’il y aurait des parents dans la classe, j’étais un peu réticente ». Mais au fur et à mesure des activités de groupe, l’enfant et son parent se sont mis à jouer ensemble, à prendre le temps d’être ensemble, à se découvrir ou se redécouvrir… « Avant, l’après midi à la maison, j’avais l’habitude de regarder le feuilleton quotidien, désormais, le feuilleton, je l’écris avec ma fille tous les jours », déclare, ravie, Maëlle.
L’école devient un lieu de vie
« Ici, ce sont les mamans qui pleurent », nous précise K. Lauret-Lucilly. L’école est devenue un lieu de vie, et les chiffres en attestent. A l’issue de l’année scolaire 2011-2012, 16 enfants sur les 18 de la classe passerelle sont entrés en petite section de maternelle. L’année d’après, 14 sur 17. Le taux de fréquentation est élevé : de 82% à 90% de 2010 à 2012. Autre point, en petite section, ces enfants sont devenus les éléments moteurs du groupe. Plus de problème de séparation avec les parents ou de cohabitation avec les autres enfants, qui eux-mêmes se calquent sur les anciens de la classe passerelle.
Une nécessaire prise en compte du créole et du bilinguisme
Pour K. Lauret-Lucilly, l’enseignante de la classe passerelle, qui détient une habilitation langue créole, « c’est un besoin de parler créole avec l’enfant ». Cela permet à l’élève d’avoir des outils pour le français et de faciliter la construction du langage. Pourquoi ne pas imaginer la même démarche dans d’autres lieux, où la prise en compte de la langue maternelle est également un besoin pour l’enfant ? La langue maternelle doit être prise en compte, souligne la ministre.
Antoine Maurice