Adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale le 28 mai par une majorité assez étroite (socialistes et radicaux seulement), la loi présentée par Geneviève Fioraso affecte directement le devenir des lycéens et le fonctionnement des lycées. Elle favorise l’accès aux études supérieures des lycées d’origine populaire et établit un lien avec le supérieur pour les lycées.
Des droits nouveaux
Pour les lycéens, la loi ouvre des droits nouveaux. Elle instaure dans son article 18 des quotas d’accès aux sections de techniciens supérieurs (STS) et aux IUT. » En tenant compte de la spécialité du diplôme préparé et des demandes enregistrées dans le cadre de la procédure de préinscription mentionnée au deuxième alinéa, le recteur d’académie, chancelier des universités, peut prévoir, pour l’accès aux sections de techniciens supérieurs et aux instituts universitaires de technologie, respectivement un pourcentage minimal de bacheliers professionnels et un pourcentage minimal de bacheliers technologiques, ainsi que des critères appropriés de vérification de leurs aptitudes. Les pourcentages sont fixés en concertation avec les présidents d’université, les directeurs des instituts universitaires de technologie, les directeurs des centres de formation d’apprentis et les proviseurs des lycées ayant des sections de techniciens supérieurs ».
La loi ouvre les classes préparatoires aux meilleurs élèves de tous les lycées. » Sur la base de leurs résultats au baccalauréat, les meilleurs élèves de chaque lycée bénéficient d’un droit d’accès dans les formations de l’enseignement supérieur où une sélection peut être opérée. Le pourcentage des élèves bénéficiant de ce droit d’accès est fixé chaque année par décret. Le recteur d’académie, chancelier des universités, réserve dans ces formations un contingent minimal de places au bénéfice de ces bacheliers ». Pour Vincent Feltesse, rapporteur de la loi sur l’enseignement supérieur à l’Assemblée, sur 2 000 lycées, 150 établissements particulièrement dans les quartiers n’envoyaient aucun élève en prépa. La loi devrait permettre à 1 500 à 2 000 meilleurs élève de ces lycées à accéder en classe préparatoire. Celles-ci comptent 4 000 places vides.
Des avantages réels ?
Ces dispositifs sont-ils aussi positifs qu’annoncés ? Lors d’un point presse le 28 mai, Yves Durand, rapporteur de la loi de refondation de l’Ecole a souligné ce point « comment refuser aux bacheliers professionnels et technologiques de réussir quand on est de gauche ». Il a estimé qu’avec ce point, « on va passer de la massification à la démocratisation de l’enseignement ».
Interrogé par le Café sur l’opportunité de spécialiser les STS et IUT pour les lycéens d’origine populaire avec ces quotas, ce qui pour S Orange, auteure d’un excellent livre sur les BTS, constitue une orientation précoce qui leur est préjudiciable, V Feltesse estime que ces filières favorisent l’insertion professionnelle et qu’elles ouvrent sur des licences. Pour le gouvernement l’objectif est de diminuer la concurrence dans ces filières entre lycéens généraux et professionnels et technologiques. Cette concurrence est mis en doute par S Orange pour les BTS.
La loi assiste davantage les lycéens qui arrivent en université. Elle instaure une spécialisation progressive des licences ce qui rend plus aisée une réorientation. Elle modifie aussi le statut des stagiaires pour éliminer l’utilisation des stages comme emplois déguisés (art. 15).
Lycées : le début du bac -3 à bac +3 ?
Pour les lycées, la loi amorce l’idée d’un grand cycle bac – 3 à bac +3 en invitant les lycées à se rapprocher du supérieur. » Chaque lycée public disposant d’au moins une formation d’enseignement supérieur conclut une convention avec un ou plusieurs établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel de son choix dans son académie afin de prévoir des rapprochements dans les domaines pédagogique et de la recherche et de faciliter les parcours de formation des étudiants », instaure l’article 18. « L’établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel doit justifier, par un avis motivé, son refus de conclure une convention ».
La loi impose aussi une obligation aux lycées ayant des BTS. « Les établissements d’enseignement scolaire disposant d’une formation d’enseignement supérieur rendent publiques des statistiques comportant des indicateurs de réussite aux examens et aux diplômes qu’ils délivrent pour ces formations, de poursuite d’études et d’insertion professionnelle. Chaque élève ou apprenti en est obligatoirement informé avant son orientation dans un nouveau cycle ou une formation supérieure ».
François Jarraud