« Rencontre inédite », la Journée nationale de la réussite éducative a réuni en Sorbonne près de 400 acteurs le 15 mai. Invités par George Pau-Langevin, ils ont assisté aux noces difficiles de l’Education nationale et de la politique de la Ville. Un mariage pour tous qui n’est pas allé sans frictions mais qui se veut le début d’une vie de couple durable. A l’issue de la cérémonie un texte définissant la réussite éducative est diffusé. Une circulaire sur les relations parents – école devrait suivre. Presque un contrat de mariage…
« Cette journée est une rencontre inédite qui réunit très largement tous les acteurs de la réussite éducative, ministères de l’éducation nationale, de la ville, acteurs associatifs, élus, parents d’élèves », a déclaré George Pau-Langevin, ministre de la réussite éducative, en ouvrant la Journée. Près de 400 personnes remplissaient le grand amphithéâtre de la Sorbonne pour une journée marathon entre tables rondes, le matin, et ateliers l’après-midi.
Pour G Pau-Langevin si « la plupart des intervenants dans les programmes de réussite éducative sont ne mesure de démontrer l’apport positif de ce qu’ils ont mis en place,… l’ambition de réduction des inégalités territoriales est loin d’être atteint ». Pour lutter contre les inégalités il est nécessaire pour la ministre que l’Ecole fasse le lien entre l’école et son environnement. « A travers cette journée c’es une conception de l’Ecole qui est affirmée : une école ouverte aux familles et aux parents qui a vocation à construire une nouvelle alliance avec eux.. Une école qui considère que si les apprentissages fondamentaux sont nécessaires, ils ne suffisent pas à faire réussir tous les enfants ». G Pau-Langevin invitait à « faire tomber les barrières, mettre en lumière des bonnes pratiques ».
Pour appuyer cette politique, G Pau-Langevin a organisé deux tables rondes qui elles aussi échappaient à la routine habituel des cérémonies officielles. Face à Frédéric Berthoumieu, président de l’ANARE, ou à Jean-Paul Delahaye, directeur de la Dgesco, la ministre avait invité des sociologues critiques. Agnès Van Zanten a dénoncé l’empilement des dispositifs, le manque d’accompagnement sur le terrain et la difficulté à transférer les « bonnes pratiques » d’un lieu à un autre. Jacques Donzelot a mis en garde sur les pratiques de réussite éducative. « La vraie réussite est scolaire », a -t-il rappelé. La réussite éducative permet aussi de sortir de la classe des élèves gênants. « Attention à ce que la réussite éducative ne soit pas un simulacre de réussite scolaire » explique-t-il affirmant même que c’est « son destin ». François Dubet a rappelé l’incapacité de l’Ecole à reconnaitre les parents : « l’Ecole appelle les familles mais ne franchit pas le pas ».
François Lamy, ministre de la Ville et Vincent Peillon sont intervenus pour marquer leur soutien à la réussite éducative. Pour F Lamy, les Programmes de Réussite Educative « ont fait leurs preuves » et « la mobilisation a eu lieu ». Il a annoncé de nouveaux contrats de ville et une convention avec l’éducation nationale. V Peillon a promis d’accepter un amendement au Sénat sur la place des parents à l’école.
« Cette journée a été une reconnaissance pour les acteurs », a conclu G Pau-Langevin. « Le discours commun de l’éducation nationale et de la Vile répond aux inquiétudes ». La Journée devrait avoir des suites concrètes. Le texte définissant la réussite éducative devrait devenir une Charte entre les acteurs. Un Observatoire sera mi s en place avec l’IFé pour évaluer ce qui se fait et transférer ces pratiques. Une circulaire sur la place des parents dans l’Ecole devrait paraitre prochainement. Elle pourrait reprendre des amendements déposés au sénat à propos de la loi d’orientation sur l’Ecole : création d’espaces parents dans les établissements et accompagnement des parents par les enseignants. Car cette évolution du métier enseignant est une invitée cachée de la Journée.
François Jarraud
Dossier Réussite éducative du ministère
http://www.education.gouv.fr/pid29102/la-reussite-educative.html
L’éducation nationale doit sortir de sa coquille. A la veille de la Journée de réussite éducative, George Pau-Langevin, ministre déléguée à la réussite éducative, montre que cette Journée s’inscrit dans une pensée sur l’éducation. En lien avec la réforme des rythmes scolaires et les PEDT, la Journée participe d’une « révolution culturelle » programmée rue de Grenelle.
Mercredi 15 mai, la première Journée de la réussite éducative réunit des participants d’horizons divers. Son objectif c’est de mettre plus de cohérence entre les différents acteurs ?
Aujourd’hui pour lutter pour la réussite des élèves il y a beaucoup d’acteurs qui travaillent chacun de son coté. C’est le cas par exemple des dispositifs de réussite locale où il y a des collectivités locales, des associations et des personnels de l’éducation nationale. Mais l’éducation nationale, en tant qu’institution n’est pas partie prenante de ces projets. Donc je pense qu’il faut que tous ces gens qui interviennent se rencontrent se parlent et fassent le bilan de ce qu’il doit faire. Nous réfléchissons depuis plusieurs mois à cette collaboration. Il faut qu’elle puisse se concrétiser par un projet de charte de la réussite éducative qui énoncera les principes sur lesquels peut s’appuyer une politique de réussite éducative.
Un des éléments intéressants dans le travail commencé c’est d’arriver à mieux articuler les interventions des uns et des autres. Par exemple quand un enfant a des difficultés scolaires regarder s’il a des problèmes de santé ou de famille. C’est toute cette idée de cohérence que nous faisons vivre dans cette journée de la réussite éducative.
Il y a des thèmes que l’on s’attendait à trouver et qu’on ne voit pas au programme. Comme la carte scolaire, l’enseignement prioritaire…
L’éducation prioritaire fait l’objet d’une réflexion pluri partenariale. Cette préoccupation est sous jacente puisque les quartiers d’éducation prioritaire recouvrent presque ceux de la politique de réussite éducative. On travaille avec le ministère de la Ville sur ce sujet et en même temps il y a une concertation au ministère de l’éducation nationale avec les organisations syndicales sur ce sujet, sur ses incidences financières par exemple. On fera à l’automne des Assises de l’éducation prioritaire.
La Journée va aboutir à la rédaction d’une charte ? Aura-t-elle des aspects financiers ?
Les participants vont se mettre d’accord sur des principes communs qui doivent être respectés si l’on veut faire une politique de réussite éducative digne de ce nom. Les propositions seront débattues et ils proposeront cette charte à la signature des ministres et des associatifs. Elle pose des aspects fondateurs, pas financiers. Qu’est ce que ça veut dire de travailler ensemble sur la réussite éducative. On s’aperçoit que selon les endroits on met sous le même terme des activités différentes. Il y aussi la question aussi des méthodes. On voit que là où les politiques réussissent les intervenants ont pris l’habitude de travailler ensemble, d’échanger des informations. On va ainsi faciliter la mise en place des Projets éducatifs territoriaux (PEDT) et des attitudes que l’on attend des gens avec la modification des rythmes où il faut déjà harmoniser ce qui se fait autour de l’Ecole. Cette politique de réussite éducative prend son sens aussi par rapport à la politique des rythmes scolaires.
Effectivement on voit dans tous vos projets (Conseil de l’innovation, Vie lycéenne etc.) la volonté d’ouvrir l’Ecole sur son environnement. Etes-vous satisfaite de l’avancée de cette idée ou trouvez vous les résistances très fortes ?
Pendant longtemps l’éducation nationale s’est protégée de son environnement en partant de l’idée d’assurer l’égalité des prestations offertes aux enfants de manière à ce que d’un bout à l’autre du territoire les enfants aient accès au même savoir. C’était cela le fondamental de l’égalité et on avait une école neutre qui se protégeait de l’extérieur. On s’est rendu compte à l’usage que l’Ecole était prise dans un territoire et qu’elle devait prendre en compte son identité dans le souci des enfants. C’est une révolution culturelle. De la même façon on avait fait abstraction de la famille. Or on voit que le poids des déterminismes sociaux, malgré le travail des enseignants, est très important. Donc si l’on veut que les enfants réussissent on doit prendre en compte la famille réelle, telle qu’elle est, et l’aider à remplir son rôle d’éducateur. C’est un renversement de point de vue.
Le sénateur Carle vient de sortir un opuscule où il demande à l’Ecole de se concentrer que sur les fondamentaux. Vous êtes su rune position opposée ?
Je pense que si l’école travaille en liaison avec les autres acteurs sans doute il y aura une répartition du travail plus simple. Si on arrive à organiser cela avec cohérence cela facilitera la tâche des enseignants qui pourront se concentrer sur certains points. Les deux démarches ne sont pas contradictoires.
Propos recueillis par François Jarraud
Vous pourrez suivre le déroulé de la Journée de la réussite éducative sur le compte Twitter du Café pédagogique.
La Journée de la réussite éducative
http://www.education.gouv.fr/cid71395/journee-nationale-de-la-reussite-educative.html
Sur le site du Café
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