Comment une enseignante « du primaire » fait-elle face polyvalence ? C’est la question du Café Pédagogique à Régine Malie … Après avoir été durant 10 années, assistante sociale, Régine Malié est devenue professeure des écoles en 1994. Elle exerce aujourd’hui en classe de CP à Lavaur (Tarn). Sa réponse est nette : « On ne peut pas être bon en tout » … Sa propre polyvalence n’est pas uniquement une compétence didactique dans de multiples matières, c’est aussi une ribambelle de missions hors enseignement stricto sensu. Une « maîtresse » dans le cas de Régine Malie doit organiser des événements (lotos, fêtes) et aussi mener des concertations ou accomplir quelques tâches d’administration tout en entretenant des relations harmonieuses (diplomatiques) avec divers interlocuteurs extérieurs ainsi qu’avec des partenaires directs comme les parents et les acteurs municipaux …
Alors Régine Malie ! Pas bonne en tout, mais bonne à tout faire?
Contrairement aux enseignants du secondaire, le(a) professeur(e) des écoles n’est pas le (la) spécialiste d’une matière mais doit pouvoir maîtriser et enseigner des champs disciplinaires aussi variés que l’Education Physique et Sportive, l’histoire des arts, l’éducation musicale, une langue étrangère et le français et les mathématiques bien entendu …
Y a-t-il un être capable de tout cela à la fois ?
À chacun, son talon d’Achille. Le mien, c’est la musique. Je chante comme une casserole et je ne suis pas prête à profiler les élèves pour The Voice ou Star-ac. Heureusement, la formation, l’auto-formation, les rencontres, l’aide parfois d’intervenants, permettent d’investir un domaine dans lequel on se sent peu à l’aise.
La polyvalence a-t-elle tout de même un aspect positif ?
C’est une contrainte pour l’enseignant, mais en effet il arrive qu’elle ait un avantage. En oyant l’élève dans toutes ces disciplines, on peut se forger une vision globale de ses capacités et de ses difficultés. Nous passons 6 h par jour en classe … nous pouvons observer les enfants parfois bien longtemps que la plupart de leurs parents.
La polyvalence n’est-elle qu’un empilement de matières à enseigner les unes à la suite des autres ?
Non. Tout enseignant peut faire le lien, et vérifier le transfert des acquis et le réinvestissement qu’en font les élèves d’une matière vers l’autre. Par exemple, il arrive que je fasse travailler la lecture en séquence d’EPS (mais oui, c’est possible). C’est la mise en cohérence des apprentissages, l’articulation et non plus la juxtaposition des disciplines qui donne sons sens à une polyvalence cherchant le progrès de chaque élèves.
Il arrive parfois qu’un professeur des écoles ressemble à un homme-orchestre …
Certains commentateurs croient qu’un enseignant travaille 24h semaine sans doute parce que la plupart des tâches que j’accomplis sont comme invisibles. Certains jours, je me sens tâcheronne à passer toutes ces heures à photocopier, afficher, couvrir des livres… En tant qu’être pluridisciplinaire, l’enseignant est aussi un être multitâche : tour à tour assistante sociale, gestionnaire, capable de travailler en équipe, de faire le lien entre les différents intervenants auprès de l’enfant, avec les élus, les structures périscolaires etc. qui se celles surajoutent à celle qui sont obligatoirement liées à la présence en classe face aux élèves (préparations, corrections)…
En définitive, on a l’impression qu’on n’a jamais vraiment fini. On pourrait encore y passer des heures et des heures. Au fond, c’est ce qui rend le métier passionnant. Bientôt 20 ans d’exercice ; je ne me suis jamais ennuyée une seconde !
Propos recueillis par Gilbert Longhi