Dans le premier entretien (mensuel N° 139), Georges Bonnefoy et Raymond Dhellemmes, vous avez pu répondre à des questions relatives à ce qui faisait l’identité de votre groupe qui, rappelons le, œuvre dans le cadre de l’AEEPS. Le second entretien (mensuel N° 140) vous a permis de développer votre point de vue sur ce que l’EPS proposait à l’étude des élèves, ce qui vous a conduit à mieux caractériser les thèmes et les objets d’étude propres à l’EPS, de votre point de vue, du fait même de son identité comme discipline scolaire. Dans ce troisième entretien, nous avons convenu d’approfondir les conséquences de vos options relatives aux contenus de l’EPS, sur ce qui permet leur transmission. Dès lors, quelles sont les conditions pour que les élèves entrent dans une activité de transformation de leur comportement spontané en rapport avec les objets d’enseignement proposés ? Mais également quelles seraient les conditions pour qu’ils construisent progressivement des connaissances en acte en rapport avec cette activité de transformation ?
Que mettez vous sous la question « comment s’y prendre ? » qui inévitablement vient après l’interrogation « Que proposer à l’étude des élèves ? ».
Au point de départ, notre singularité tient certainement à un postulat de départ sur lequel il n’y a pas d’unanimité aujourd’hui. Ce postulat est le suivant : il existe une culture scolaire des activités physiques, sportives, artistiques et de développement. Mais, bien entendu, cette culture scolaire propre à l’EPS n’a pas d’existence autonome au regard des cultures de référence qui appartiennent à de multiples milieux. Pour nous il est vain de rechercher un modèle unique de transposition de ces cultures vers l’école. Chaque champ de pratique a tracé dans l’école un sillon original : les sports collectifs, les sports de combats, les activités gymniques, la danse, le stretching … ont ainsi leur propre histoire d’intégration à l’école sous des formes originales dont l’ensemble traduit une culture scolaire. Dans un article de présentation du cahier N°6, (2007) DHELLEMMES R. sous le titre EPS : « L’émergence d’une culture scolaire des APSA » (pp 4-6) évoquait un certain nombre de conditions de transmission de cette culture. Ces conditions étaient formulées sous forme d’exigences qui balisaient alors un « comment s’y prendre ? ». Ces exigences, que nous ne reprendrons pas ici dans le détail, précisaient par exemple la nature de la forme de pratique, ou encore les dispositifs proposés par l’enseignant au sein desquels sont dissimulés les objets d’étude. Sont évoquées également les médiations de l’enseignant, déterminantes pour le développement du processus didactique.
Par ailleurs, des mises en garde nous paraissent devoir s’exprimer. Par exemple le CEDREPS propose-t-il une modélisation de ce que serait un « bon enseignement en EPS ? ». Nous souhaitons que non ! Mais allons au plus court compte tenu de la complexité que présenterait une réponse exhaustive à cette question. Il ne s’agit pas ici, pour nous, de développer un modèle. Les écrits préconisant telle ou telle bonne pédagogie sont datés et, à juste titre, l’institution ne donne plus de modèles de bonne pratique aux enseignants. En EPS, s’il y eut des instructions officielles pour promouvoir telle ou telle forme de pédagogie efficace, ce n’est plus le cas aujourd’hui. L’accent est mis sur le programme et dans le programme, ce qui doit être obtenu de la part des élèves. Le fil directeur est bien celui -là et au final nous pensons que c’est là un réel progrès.
Cependant, les enseignants sont évalués et cela ne peut se réaliser à l’aulne des résultats difficilement appréciables dans le court terme et relativisés par les ressources initiales des pratiquants. Qu’on le veuille ou non, l’appréciation mobilise, chez l’évaluateur des pratiques professionnelles, un modèle de référence qui permet de porter un jugement sur la valeur des enseignements. Nous ne nous engagerons pas non plus sur ce terrain du jugement de la valeur professionnelle qui appartient à d’autres instances. Tout enseignant développe en EPS ses compétences dans des contextes singuliers desquels il est censé tirer le meilleur parti. De ce point de vue, l’activité première de l’enseignant d’EPS est bien celle d’une résolution de problèmes multiples permettant d’optimiser, collectivement et individuellement, la planification de son enseignement pour répondre à la commande institutionnelle que constituent les programmes.
Face à ces approches prescriptives et normatives, d’autres approches plus descriptives se sont efforcées de rompre avec toute idée de « modèle » pour s’attacher à comprendre les significations des pratiques expertes ou non. Nous n’irons pas plus loin sur ce terrain mais retenons deux choses : La première concerne la posture que le CEDREPS tente d’adopter dans ses propositions ; Il se situe dans un entre-deux entre ces postures prescriptives et descriptives. Certes, il propose et développe, au travers de ses articles, des exemples de pratique novatrice. Les auteurs tentent de décrire les modes d’intervention qu’ils estiment innovants et par là même, appelés à se développer. Mais ces tentatives bien qu’appuyées sur des données issues des recherches n’en restent pas moins personnelles et par là même échappent à des souhaits de généralisation hâtive, à des applications sans compréhension de ce qui se joue dans les interactions avec la classe.
La seconde remarque concerne la distinction, encore en débat, entre pédagogie et didactique. Pour Michel Develay, didactique et pédagogie s’appliquent toutes deux aux processus d’acquisition et de transmission de connaissances. Il est coutumier de placer la pédagogie du côté des relations entre le professeur, la classe et l’élève, du côté des valeurs, des attitudes, du savoir être. Concernant la didactique, la spécificité des contenus de savoirs est déterminante pour leur appropriation. On se situe alors du côté de l’épistémologie de la discipline, des obstacles rencontrés par les élèves, de la transposition que présentent les activités et les objets d’enseignement avec les pratiques et/ou les savoirs de référence. Le système enseignant – élèves – savoirs peut ainsi être appréhendé, étudié sous deux angles différents et complémentaires. Nous avons privilégié l’éclairage du système avec les outils de l’approche didactique et cette option a certainement permis de mettre en évidence des relations qui n’étaient pas si évidente en EPS : les rapports de l’enseignant avec le savoir (à enseigner) ; les rapports des élèves avec ce qu’il y a à étudier, médiés par les interventions de l’enseignant ; la transposition des pratiques sociales ….
Nous nous trouvons ainsi proches de la position de Vergnaud (didacticien des sciences) pour qui « La didactique …, s’attache … aux contenus des savoirs et savoir-faire, et aux difficultés spécifiques que ces contenus peuvent soulever …. La didactique s’intéresse en particulier à l’analyse du contenu des activités mises en jeu dans l’apprentissage, notamment des opérations de pensée que ces activités impliquent. Ainsi, selon cet auteur, décrivant et analysant les difficultés et obstacles rencontrés par les élèves, la didactique propose des moyens pour les surmonter, pour « faire du savoir enseigner, un savoir vivant, fonctionnel, opératoire. » C’est pourquoi l’approche didactique comme activité scientifique s’appuie d’une part sur la psychologie du développement cognitif, et d’autre part sur l’épistémologie des disciplines, indispensable à l’analyse du contenu des connaissances ».
Ce point de vue nous conduit à considérer les conditions d’apprentissage comme répondant à un ensemble d’éléments d’un contexte que l’enseignant propose à sa classe. C’est-à-dire, et pour reprendre ce que nous disons au CEDREPS, une Forme de Pratique Scolaire doit intégrer à la fois le savoir (issu des pratiques de références, que nous appelons après ciblage, objet d’enseignement), mais aussi son habillage qui vise à prendre en compte l’activité réelle de l’élève et le nécessaire guidage de l’enseignant … Cette orientation permet de décrire les nombreux éléments de culture que l’enseignant transmet : aussi bien ceux cristallisés dans le savoir choisi, que ceux qui s’expriment dans les obstacles à surmonter par les élèves et aussi ceux qui imprègnent la médiation de l’enseignant, y compris au travers de ses communications non verbales.
Pour concrétiser ces diverses options, sous le « comment nous entendons les éléments suivants » : Les activités proposées aux élèves, que nous avons caractérisées sous le terme de « forme de pratique scolaire » ; Les procédés visant à mobiliser les élèves sur les résultats de leur action, sur certaines modalités de réalisation au travers de l’usage différencié de cette évaluation qui accompagne les réalisations des élèves ; Les interventions et les démarches d’enseignement qui permettent de solliciter les élèves dans le sens d’une appropriation active des contenus qui leurs sont proposés.
Ces diverses entrées nous conduiront à développer, dans un dernier temps, un point de vue sur ce que nous appelons les « savoirs pour enseigner ». En effet, la connaissance de ce qu’il y a à enseigner ne peut suffire pour rendre les enseignants compétents. Donnons un exemple : savoir observer les réponses motrices diversifiées d’une classe en activité de badminton, par exemple, suppose de mobiliser « dans l’instant » un ensemble de repères, d’interprétation de ce qui est prometteur dans ces réponses et d’intervenir (ou non) au moyen de stratégies de communication avec la classe. Ainsi, savoir à enseigner et savoir pour enseigner, constituent pour nous les deux domaines essentiels de l’efficacité professionnelle. Nous y reviendrons.
En quoi vos propositions sur les formes de pratique scolaire vous paraissent si différentes des pratiques actuelles ? Et, en quoi vous paraissent-elles porteuses d’innovation ?
Revenons d’abord sur ce que signifie pour nous une forme de pratique scolaire. Il ne s’agit évidemment pas de se faire plaisir en déconstruisant les règles constitutives de telle ou telle APSA, en mettant en cause les formes sociales actuelles des pratiques culturelles. On remarquera au passage qu’elles s’en chargent elles même en proposant des formes sociales renouvelées de pratique (le futsall à 7 en est un exemple récent). Le postulat de départ : « il existe une culture scolaire des APSAD qui se construit par recours et aux dépens (disons nous) des cultures de références » prend ici toute sa place. Il s’agit également de formes de pratiques sociales, mais scolaires, un point de vue qui s’inscrit dans la perspective des analyses de Forquin J.C. sur les cultures scolaires.
Par ailleurs, et comme toutes les disciplines scolaires, l’EPS fonde son enseignement sur la mise en activité des élèves. Nous entendons par mise en activité (athlétique, gymnique, de handballeur …) la mobilisation singulière dans des contextes spécifiant telle ou telle APSAD, de ressources diverses qui conduisent les pratiquants élèves à réaliser des prestations identifiables comme relevant d’une spécialité sportive, artistique ou de développement. En EPS, plus encore que dans d’autres disciplines, on ne peut enseigner sans « faire-faire » aux élèves, ce qu’ils apprennent à faire. Aucun discours ne peut se substituer à cet apprentissage dans et par l’action, la prise en compte du résultat de l’action étant la condition première pour que les élèves s’approprient ce que l’enseignant souhaite communiquer… Cependant, comme nous proposons de « cibler » ce qu’il y a à étudier dans chaque APSA, l’activité sollicitée par la forme de pratique proposée et les interventions de l’enseignant ne se dispersera pas au hasard des réponses des uns ou des autres. Par exemple, et au risque de choquer certains, le modèle de l’intervention individualisée de l’entraineur d’athlétisme corrigeant les élèves à tour de rôle à la sortie de la réception du saut en hauteur est inadapté à l’enseignement d’un athlétisme scolaire, ne serait-ce que par la durée des régulations qu’il imposerait.
La forme de pratique scolaire constitue, pour le cycle d’enseignement, une colonne vertébrale à laquelle peuvent s’accrocher des situations dérivées lorsque des apprentissages plus ponctuels seront nécessaires. Ces deux plans sont illustrés par UBALDI COSTON sous les termes de grande boucle et petite boucle. Il ne s’agit pas d’une situation de référence au sens d’une référence à une situation type issue des pratiques sociales. C’est la pertinence de ce que nous proposons de faire jouer aux élèves, qui peut les faire mieux jouer. En ce sens, c’est ce que vit l’élève dans cette forme de pratique, découvrant alors ce qu’il peut étudier, qui nous intéresse, et que nous pouvons mettre en perspective. C’est pour cette raison que les interventions relatives à la forme de pratique sont choisies très précisément en relation avec les acquisitions visées. On pourra citer par exemple une modification d’éléments de l’espace, d’un rapport de force, des contrats individualisés pour chaque joueur en Sports Collectifs, ou encore des procédures de valorisation d’éléments du score. On trouve dans les Cahiers du CEDRE de très nombreux exemples de ces « interactions didactiques » susceptibles de générer des transformations positives pour l’élève pratiquant (Cahier 3, En Volley ball G.Bonnefoy pp 49-55 ; J. Metzler Cahier 4, pp 13-15 ; Cahier 7 C. Boutitié, D. Contet, A. Falco. En Volley Ball Cahier 11. En badminton N. Mascret p 27 ; et bien d’autres encore).
Les interventions fournissant systématiquement des modèles de réponses seront réduites dans un premier temps de sorte à ce que les élèves s’engagent dans la forme de pratique proposée, intériorisent toutes les règles et y développent l’activité adaptative souhaitée. Les interactions à ce niveau seront plus incitatives qu’interrogatives. Le projet d’enseignement avançant dans le cycle, le type d’interaction avec la classe va se transformer au profit par exemple d’autres types d’interventions plus sous forme d’incitations à se centrer sur tels ou tels éléments de réalisations, prenant appui sur ce qui est effectivement réalisé, plutôt que sur ce qu’il faut faire. Nous ne préconisons donc pas un modèle d’interaction avec la classe, nous interrogeons un processus d’enseignement qui s’appuie sur l’activité adaptative des élèves pour la transformer … par des procédures d’intervention de l’enseignant diverses, évolutives.
Par ailleurs, la forme de pratique scolaire proposée aux élèves ne représente pas un formatage valable dans toutes les situations. De nombreux articles montrent la capacité des auteurs à construire les éléments pertinents pour solliciter les élèves dans le sens d’une mise en scène ce que l’expert pense qu’il est possible pour les élèves d’étudier. On trouve dans le Cahier 7, diverses propositions présentant des exemples convaincants de ce qui est évoqué ici. Celles par exemple de Julien Metzler intitulé « Jouer au Volley-Ball en respectant des contrats diversifiés et évolutifs » (pp 40-43), de N. Mascret à propos des « acquisitions attendues en EPS, motivation, évaluation : la place du score » (pp 44-53), ou bien de F. Bergé : « une Forme de Pratique Scolaire de Course DE durée » (pp 54-60).
La transformation progressive de la forme de pratique au cours du cycle d’enseignement accompagne l’évolution du rapport des élèves à ce qu’il y a à apprendre. C’est ce que l’on trouve par exemple, dans notre Cahier 11, au travers des propositions de C Patinet, pour la spécialité cirque, ou encore chez F. Fanget pour cette forme scolaire qu’il préconise : « le rugby à l’arrache », (p 91).
Bien entendu des questions demeurent : celle par exemple qui porte sur le fait d’introduire des changements dans les façons d’établir le gain d’une rencontre, sans modifier les fondements culturels et symboliques d’une APSA. Dans les gains de rencontre au premier à atteindre un score de référence (volleyball et tennis par exemple), le rapport au temps est indifférent. C’est ainsi que les pratiques sociales en tennis conduisent les joueurs à jouer parfois jusqu’à 5 heures de suite. Le vainqueur gagne quasiment par épuisement de l’adversaire et c’est là une dimension symbolique forte qui articule la compétition à l’épreuve pour reprendre la classification de Bernard JEU. A l’école, il devient impossible dans le cadre scolaire de jouer avec cette règle. On jouera donc des jeux décisifs, ou au meilleur d’un score en temps contraint. Cela entraîne donc des transformations mais, si elles sont réalisées de façon lucide et réfléchie, les inconvénients peuvent être réduits. Il s’agit de jouer sur le contingent sans jouer sur le constitutif. Mais cette distinction ne va pas de soi et par là même est parfois mal comprise. Par exemple : en Volley ball, défendre une cible horizontale, le sol, est constitutif pour certains, (on jouera sur le passeur bloqueur) ; décider de ce que l’on va faire avec la balle avant de la toucher car on ne peut pas la garder est constitutif pour d’autres. Ou encore renvoyer la balle après une trajectoire directe. En conséquence, on ne se donne pas le droit d’introduire dans certaines formes de pratique un (seul) rebond (pour donner du temps à la prise de décision) ou de bloquer ou non la balle.
En conclusion, nous pouvons dire que tout cela n’a d’intérêt que si l’enseignant par ses interactions fait vivre la forme de pratique vers ce qu’il se propose de faire étudier aux élèves. Et que cet objet d’étude soit pertinent avec les conduites adaptatives que suppose la pratique d’une spécialité. Et c’est sur ce point que les débats doivent être approfondis. C’est essentiel pour que l’enseignant puisse évaluer les réponses de ses élèves dans le sens d’un accompagnement formatif. De ce point de vue, les propositions du CEDREPS révèlent un usage multiple et divers des évaluations des réponses des élèves « en cours de route », évaluations qui accompagnent les réalisations des élèves.
Vous évoquez la nécessité de mobiliser les élèves sur les résultats de leur action et l’importance formative des régulations de l’enseignant qui accompagnent les réalisations des élèves. Pouvez vous revenir sur ces perspectives et les expliciter ?
Il serait nécessaire de revenir précisément sur le concept d’évaluation répondant à cette exigence d’accompagnement. Rappelons de ce point de vue qu’on différencie l’évaluation formatrice de l’évaluation formative, laquelle en EPS avait fait l’objet d’une recherche publié en 1987 par le département des didactiques de l’INRP. Ce travail s’inscrivait d’ailleurs en 1983 dans un contexte où la mise en place du Contrôle en Cours de Formation dit CCF, suscitait au sein de l’EPS une réflexion nouvelle et importante sur les fonctions et modalités de l’évaluation. A la même époque, un document du SNEP sur la certification diffusé à 10000 exemplaires en fait foi ! Pour Brau-Anthony S. (Cahier 12 p 128), « l’introduction de ces nouvelles modalités d’évaluation a transformé les pratiques beaucoup plus que les programmes. » Cet auteur nous rappelle d’ailleurs très justement que l’on doit considérer l’évaluation comme un fait didactique à part entière. Mais ce franc succès, il y a une vingtaine d’années, théorique, autant que pratique, de cette réflexion sur « l’activité évaluative des enseignants d’EPS » a t-il laissé quelques traces ? Lesquelles ? Ces pratiques se sont-elles généralisées chez les enseignants ? Appartiennent-elles aujourd’hui aux compétences du plus grand nombre ? On sait que leur utilisation rencontre de nombreux obstacles et plus encore lorsque l’absence de ciblage conduit à la dispersion. Or, on a coutume en EPS de distinguer et d’articuler l’évaluation formative qui relève de l’activité de l’enseignant et l’évaluation formatrice qui appartient aux élèves lorsqu’ils s’appuient sur des critères de réussite (comment je sais que le résultat de ma prestation est satisfaisant ?) et/ou de réalisation (que puis-je exprimer de la procédure que j’ai utilisée ?).
Evoquons dans un premier temps, l’évaluation formative qui connut donc un succès « théorique » (si on se réfère au nombre de citations dans les copies pour les concours) il y a une vingtaine d’années ! Rappelons qu’il s’agit ici de réguler/guider les apprentissages : « l’évaluation (formative) est conçue par nous comme l’ensemble des interventions des enseignants destinées à réguler les apprentissages des élèves ». Et cette régulation « existe dans les faits quels que soient les formes prises ». C’est en ces termes que s’exprimaient Marsenach J. et Merand R. dès 1987. La référence première en EPS portait sur les propositions de L Allal (L’évaluation formative dans un enseignement différencié. Berne, Peter Lang, 1979), lorsqu’elle distinguait les perspectives néo behavioriste et cognitiviste en matière « d’évaluation formative dans un enseignement différentié ». Linda Allal avait alors modélisé les trois temps de l’évaluation formative : recueillir des données … établir un diagnostic, (interpréter ces données), proposer des remédiations. Elle montrait que les contenus de ces temps variaient en fonction de la perspective mobilisée par l’intervenant. Néo behavioriste d’une part qui conduisait à mettre en perspective des comportements considérés comme représentant « la bonne réponse ». Cognitiviste d’autre part qui visait à repérer au travers des réponses des élèves, des stratégies productrices de conduites « prometteuses ». Souhaitant se situer dans une perspective cognitiviste, de nombreux enseignants se sont retrouvés en difficulté lorsqu’il s’est agit de ne plus lire et interpréter les réponses des élèves en termes de manques ou d’ « écart aux comportements attendus » mais de les interpréter comme un type momentané d’organisation, qu’il fallait faire évoluer dans le sens de conduites prometteuses. Mais pour aller dans ce sens et pour que le « modèle de la réponse attendue » laisse la place à une autre évaluation formative, les enseignants doivent mobiliser dans l’interaction avec la classe une autre lecture, une autre interprétation des réponses. Cette approche suppose de pouvoir disposer d’analyses poussées concernant l’activité adaptative des élèves, de s’appuyer sur des modèles interprétatifs des conduites adaptatives des élèves au travers de repères fiables, fondés.
Si ce n’est plus la réponse attendue qui demeure le contenu à enseigner, alors ce contenu doit émerger d’hypothèses sur les relations nouvelles que les élèves doivent construire entre les éléments du milieu avec lequel ils interagissent. Il faut dès lors que l’intervenant dispose de modèles d’activité adaptive dans les diverses APSAD. Ces modèles n’ont pas été mis à la disposition de la majorité des enseignants sous des formes utilisables alors que de nombreuses propositions issues de recherche d’ingénierie didactique ont été publiées depuis quelques décennies sans trouver un écho semble-t-il chez la majorité des enseignants qui ont conservé des pratiques anciennes, la solidité d’une référence à un modèle gestuel…
Où le CEDREPS en est-il de la mobilisation de cadres interprétatifs des réponses des élèves ? Il nous semble que nous avons tenté et que nous continuons de tenter de nous inscrire dans une perspective d’interprétation des conduites prometteuses des élèves. Les innovations proposées présentent, sans toujours les expliciter, des interactions avec la classe en activité qui fondent leur pertinence sur une « lecture de l’activité adaptative des élèves » en action dans la forme de pratique. Un des axes de travail que nous devrions développer serait d’aller plus loin dans l’utilisation, voire dans l’élaboration de modèles interprétatifs, de l’activité des élèves. C’est par exemple ce qu’avait proposé dès 2002 Ubaldi J.L. en natation, décrivant des conduites typiques de l’élève-nageur à partir desquelles il a pu préciser les étapes d’un cursus, des situations d’apprentissages ciblées, ainsi que des critères de réalisation permettant d’évaluer et donc situer les prestations de ses élèves. (Cahier n°3, p 36). Dans ce même cahier une démarche identique était proposée pour un Basket Ball scolaire par Phillipon S.. Plus récemment, en 2007, dans le Cahier 7. Portes M. fait pour sa part, l’inventaire des exigences à respecter pour concevoir des formes de pratiques (Scolaires) qui amèneraient les élèves à « vivre une tranche de vie de handballeur ». DHELLEMMES R. développe dans ses propositions successives, ce que représente pour lui « l’activité du S’entraînant » ; Par exemple dans l’article : « S’entraîner ? Pas si simple, Cahier N°8, (pp 60- 73) ».
Nous ne pouvons pas ici multiplier ces exemples de formalisation des APSA des différents auteurs s’étant exprimés depuis dans les Cahiers du CEDREPS. Mais tous, plus ou moins explicitement, et de façon plus ou moins exhaustive, font référence à cette approche. Les pratiques d’évaluation formative bien connues maintenant mais finalement peu mobilisées effectivement n’ont de portée que dans la mesure ou l’objet d’étude est bien ciblé. Est-ce pour cette raison qu’elles ne ses sont pas plus massifiées ? La mise en pratique autonome des élèves sous le regard de l’intervenant qui englobe la totalité du dispositif en jeu devrait être un moyen pour lire l’activité adaptative des élèves, pour comprendre les logiques de leurs conduites motrices alors qu’ils sont confrontés aux contraintes externes (environnement) et internes (celles liées à leur activité corporelle) et ceci dans la mesure ou l’objet d’étude est ciblé, pertinent.
Concernant l’évaluation formatrice dans le sens évoqué précédemment, les auteurs du CEDREPS présentent diverses propositions de formes de régulation visant à favoriser la centration chez les élèves sur des éléments précis d’étude qui ont été ciblés. Cette perspective d’aide aux apprentissages est particulièrement intéressante, puisque, comme le soulignait J.J. Bonniol, « seul l’élève peut corriger ses erreurs, au vrai sens du terme ». Et pour cela, l’intervenant peut jouer sur plusieurs types de propriétés du résultat de l’action. Nous reprendrons en cela les propositions de Christian Georges datées certes, mais selon nous toujours d’actualité (Apprendre par l’action, Puf Paris, 1983).
Nous distinguons d’une part, les propriétés motivationnelles des scores, performances, gains etc … qui fondent toute pratique ludique. Nous utilisons beaucoup les procédés qui consistent à mettre en évidence les conduites les plus adaptées au cours de la recherche de gains de jeu sous conditions (Jockers, « mort subite »). La valorisation de zones d’envoi dans le gain d’un point acquis dans des conditions particulières est un bon exemple de ce procédé tel que décrit par N MASCRET dans son article : « acquisitions attendues en EPS, motivation, évaluation : la place du score (cahier N°7, pp 47 53). Au delà de la motivation à gagner le point « avec la manière », ce procédé permet à l’enseignant de revenir sur les divers scores des joueurs de sa classe pour tirer des enseignements en terme de mise en perspective d’objets d’étude. Il s’agit là d’autre part, de l’usage des propriétés informationnelles des résultats de l’action. Les informations données par les résultats de l’action sur les moyens de s’y prendre viennent en complément des propriétés liées à la motivation. Elles supposent en effet la sollicitation d’un retour sur le résultat de l’action, individuellement et collectivement pour abandonner certaines réponses qui constituent des impasses, pour éventuellement contribuer à dégager des principes et des règles d’action lorsque cela est nécessaire. C’est ainsi que N. Mascret dans le cahier 11 (pour une réhabilitation du critère de réussite en EPS pp 27-37), montre l’intérêt de critères liés à un objet d’enseignement qui émerge d’une forme de pratique scolaire. Il propose un tableau de score en badminton qui permet non seulement de relever les gains de points, mais également de les mettre en correspondance avec les modalités de gain (ici en l’occurrence par frappe smashées ou par rush d’une part, et d’autre part en entrant dans des zones favorables ou non).
L’auteur indique ainsi les trois fonctions que peuvent ici jouer le critère de réussite : orienter l’activité de l’élève vers l’utilisation de certaines réponses ; lui permettre de se situer dans sa capacité à mobiliser certaines frappes ; témoigner éventuellement du résultat d’un apprentissage ciblé sur ces frappes (page 95). On voit ici qu’au delà d’un procédé de renforcement motivationnel, ce critère de réussite devient un médiateur entre les apprentissages des élèves et les interventions de l’enseignant. Enfin, lorsque la classe est organisée pour relever des éléments observables des réalisations des élèves, l’enseignant pourra s’appuyer sur ces données pour orienter la classe vers des stratégies motrices plus favorables. Il pourra mobiliser les élèves dans le sens d’un recours à des critères d’efficacité ou de réalisation qui chez plusieurs auteurs prennent la forme de contrats, individuels ou collectifs. On trouve ainsi proposé par Julien Metzler et Didier Contet, un usage de contrats différenciés en fonction des progrès des élèves, des critères d’évaluation très ciblés sur l’objet d’enseignement, ou encore la construction progressive d’une feuille de match critériée, qui permet en fin de cycle d’apprécier les acquisitions des élèves. (Cahier 11, p 107.)
On retrouve chez Cathy Patinet, dans ce même Cahier (Cirque : s’équilibrer autrement sur la boule) pp 55-60, une préoccupation identique. Pour permettre aux élèves de « lire la complexité de ce qu’il y a à acquérir » cette auteure définit très précisément un ensemble de critères et d’indicateurs permettant de baliser les réalisations des élèves et de guider les interventions des enseignants. Sur le même registre, les propositions d’A. Coston et J.L. Ubaldi, (la Danse au collège, Cahier 12, p 52) indiquent comment les élèves sont amenés à auto ou co-évaluer leurs prestations. Là encore cela se réalise à partir de critères et d’indicateurs en relation avec les objets d’études retenus, et en cohérence avec une conception de la danse à l’école soutenue par ces collègues.
De ces divers exemples, on peut affirmer que dans l’ensemble, la principale difficulté pour faire que les élèves mobilisent des critères de réussite ou d’efficacité de façon utile pour l’étude, réside dans l’absence de ciblage d’objet d’étude. A l’inverse, lorsque cet objet est circonscrit, l’usage de ces procédés devient efficace. Une autre difficulté se trouverait dans l’usage formel des critères lorsque l’enseignant les impose sans que les élèves en voient bien l’intérêt et à ce niveau, il nous faut noter que la procédure de construction avec la classe de critères qu’elle mobilisera ensuite s’exprime rarement, y compris dans nos articles. C’est là une voie qu’il nous faudra approfondir
Pour nous, les enseignants devraient disposer de la capacité à réaliser une lecture compréhensive des réponses des élèves qui est bien autre chose qu’une lecture en creux des réponses au regard d’un modèle a priori. Ainsi le « coureur-sauteur » en course de haie (débutant) qui fixe le point de réception derrière l’obstacle ne fait pas une faute : il est organisé par une réception parce qu’il saute au lieu de franchir. Cela ne sert à rien de lui dire de regarder devant ! Sa réponse est logique puisqu’il ne connaît pas la distance dans le franchissement qui sépare son bassin, de la latte de haie. C’est cette « logique » sur laquelle on interviendra par des formes de pratique qui permettront à l’élève de différencier le rôle de ses membres inférieurs et d’installer une distance avec la haie qui ne soit pas que « de sécurité ». On peut alors envisager de mettre tous les élèves à en mesure de construire de façon active, les repères pour maintenir une structure de course dans le franchissement.
Une réflexion collective sur toutes ces interrogations se poursuit nous semble-t-il. Mais une fois encore, il s’agit de la réaliser en établissant un dialogue entre les données issues de travaux de recherche et les innovations construites dans les pratiques. Pour terminer sur cette question, notons en passant que le CEDREPS mobilise ces concepts plutôt dans une perspective de mise à l’étude des élèves que dans une perspective d’apprentissage moteur. Nous reprendrons cette distinction importante par la suite, lors du quatrième entretien.
Justement, pouvons-nous revenir sur les pratiques et les démarches d’enseignement qui permettraient selon vous, de solliciter les élèves dans le sens d’une appropriation active de contenus articulant « l’enseigner et l’éduquer », une des options fortes du CEDREPS. Votre centration actuelle sur l’enseigner, « quoi, comment ?», ne vous éloigne t- il pas de cette option initiale ?
Lorsque nous exprimons la question : « que proposer à l’étude des élèves ?», cela suppose que les élèves soient placés en situation d’étudier quelque chose qui « fasse sens pour eux ». Et pas seulement de faire, de réaliser ou de jouer malgré toute l’importance que nous accordons à l’activité ludique en EPS. Lorsque nous présentons cette idée fondamentale que les visées éducatives sont intégrées aux pratiques des élèves, à leurs apprentissages moteurs, cela ne peut se faire de façon incidente, ni n’être que le fruit du hasard. Cela signifie très clairement que les objets d’enseignement, les démarches et les visées éducatives constituent les trois pôles d’un système articulé et questionné du point de vue des cohérences qu’il présente …
Les interactions avec la classe n’arrivent effectivement pas comme un élément isolé dans les propositions de renouvellement de l’enseignement de l’EPS du CEDREPS. Il s’agit ici de mettre en lumière une des dimensions d’un système de production d’apprentissage chez les élèves et de son analyse. Nous proposons de représenter ce système au moyen d’un triangle dont les pôles seraient constitués par les trois entités suivantes : la forme de pratique scolaire ; l’objet soumis à l’étude des élèves ; les interactions avec la classe (d’ordre pédagogique et didactique, les deux étant articulés, comme nous l’avons souligné plus haut).
Cette représentation pour sommaire qu’elle soit, évite les incompréhensions traduites par exemple par les reproches de « magie de la tâche » qui ont été formulées à l’encontre de la notion de Forme de Pratique Scolaire. Bien évidemment, l’importance prise par chacun de ces pôles évolue au cours d’un cycle d’enseignement. Entre le moment de présentation de la forme de pratique et l’intériorisation par toute la classe des règles qui vont orienter les réponses de chacun, diverses médiations vont solliciter les élèves sur ce qu’ils doivent construire comme nouvelles relations entre leurs réalisations et leurs décisions de planification de nouvelles réalisations. Ce processus est bien illustré par les propositions de SOLER (A.) dans le cahier 4 p. 62 (« vers un pratiquant cultivé en EPS »). L’auteur montre sur quels éléments de réalisation et sur quelles « sensations qui leurs sont associés », l’élève doit porter son attention : qualité de l’équilibre à la réception, durée du deuxième bond. Les élèves sont ainsi sollicités sur ce qu’il y a à repérer dans la succession de leurs tentatives. Les médiations directes de l’enseignant sur l’attention à porter sur telle ou telle information endogène ou exogène par exemple, ou indirectes par l’action différenciée sur divers paramètres d’espace, de temps, de valorisation de scores fait également partie du bagage des savoirs pour enseigner … Elles supposent une capacité d’observation élaborée, une éducation perceptive de l’intervenant qui doit pouvoir discrimer finement les éléments pertinents des réponses des élèves pratiquants.
Mais où s’arrête « l’expertise polyvalente » de l’enseignant EPS ? Comme nous l’avons évoqué sur la question de l’évaluation formative, intervenir sur les réponses des élèves dans le sens d’une sollicitation des réponses prometteuses supposerait-elle de disposer d’une lecture de leur activité adaptative dans toutes les spécialités qu’il propose aux élèves ? Ou y aurait-il une possibilité de transfert des capacités de lecture d’une APSA à l’autre ? Faire vivre une forme de pratique scolaire est une chose. Assurer la maintenance de la sécurité, de la cohésion de groupe également. Autre chose est d’intervenir par divers moyens sur les réponses des élèves, en mobilisant des références pertinentes pour l’ensemble des registres observés chez chacun des élèves au cours de la leçon et en intervenant dans le sens d’une motricité spécifique.
Depuis plusieurs décennies, l’étude des interactions enseignant/classe en EPS a mobilisé des chercheurs qui ont pu théoriser sur le sens des interventions des enseignants. Les québécois ont proposé des modèles d’analyse que nous avons par exemple utilisé au cours des stages Maurice Baquet (années 1970). Plus récemment, les recherches INRP nous amenaient à discriminer les communications didactiques des autres interventions. Plus proche encore, les propositions issues de l’analyse des pratiques (Durand Marc) qui, évoquant le guidage de l’enseignant, distingue les interventions visant l’ordre dans la classe, les encouragements, l’aide aux apprentissages (interventions sur l’aménagement du milieu, sollicitation de la verbalisation).
Pour conclure, nous pensons nécessaire de penser toutes les formes d’analyse des pratiques d’enseignement en EPS au sein d’un ensemble intégrant les objets soumis à l’étude des élèves et l’activité sollicitée chez eux. Nous sommes convaincus que l’étude du sens des interactions avec la classe n’a d’intérêt que si on prend en compte les objets d’enseignement et le type de relation avec l’environnement ou avec soi-même que la forme de pratique scolaire induit chez les élèves
Pouvez vous revenir sur cette question de ce que nous appelez les deux faces de la pièce gagnante de la compétence de l’enseignant d’EPS : les savoir à enseigner versus les savoirs pour enseigner
Ce que nous avons développé ici, ce sont des propositions en rapport avec ce que nous exprimions dans l’entretien précédent concernant les objets de l’enseignement en EPS. Pour communiquer aux élèves en EPS des objets de savoir, il ne suffit pas de connaître les théories de l’apprentissage moteur, ou celles de la motivation. Il faut mobiliser ce que nous appelons des savoirs pour enseigner qui nous paraissent être la face inverse, le pendant des savoirs à enseigner que constituent les objets soumis à l’étude des élèves. Ces savoirs pour enseigner sont des savoirs en action, acquis par la pratique et la réflexion sur sa pratique. Ces savoirs en acte forment ce que Perrenoud a nommé « l’habitus professionnel « . Lot de schèmes d’action d’attitudes, d’habitudes de routines qui permettent d’enseigner avec efficacité et économie ». La question sur laquelle le CEDREPS travaille est bien celle des conditions qui permettraient aux élèves d’étudier réellement les savoirs tels qu’évoqués dans l’entretien précédent et par là même de s’approprier des conduites nouvelles sur les divers plans culturels proposés en EPS : des conduites plus stratégiques, plus techniques, plus tactiques, répondant aux règlements des APSAD.
Un exemple de description de ces savoirs pour enseigner est présenté par LEMAIRE J et LEBRUN f. dans le cahier N° 12 (pp 94 96). Les auteurs illustrent la portée de cette notion dans un cycle d’enseignement en Volley Ball. Ils décrivent et justifient – ce qui est indispensable dès lors qu’on adopte une posture de formateur, -ce qui est leur cas – les principes qui organisent l’activité de l’enseignant qui s’inscrirait dans leurs propositions. Ils développent ensuite les opérations concrètes à réaliser et l’illustrent en Volley ball. Par exemple un des « savoir pour enseigner » qu’ils proposent, consiste à rendre interdépendantes, réussites motrices et réussites éducatives (p 95). Les interactions proposées en exemple montrent le rôle joué par les « temps morts » du point de vue de l’espace (tapis de temps mort) et du temps (multiplicité de ces instants) qui permettent de valider ou non les décisions collectives.
Pour conclure sur quelques unes de nos propositions concernant le « comment s’y prendre ? », pour mettre les élèves à l’étude en EPS, convenons que nous n’avons pas tout abordé de cette question, alors que la plupart des innovations décrites dans nos cahiers contiennent beaucoup plus d’éléments relatifs au comment : la question des groupements des élèves par exemple (groupe de niveau, groupe de besoin, groupe affinitaires etc …).
Tout un pan de « savoirs pour enseigner » d’ordre pédagogique portent également nos propositions. Par exemple tout ce qui porte sur l’attitude de l’enseignant dans l’accueil des réponses chacun qui relève d’une nécessaire empathie pour que les tentatives soient poursuivies. Le fait par exemple de se réjouir des progrès de chacun, aussi ténus soient-ils est déterminant tant du point de vue du climat social de la classe que du point de vue de la réussite des apprentissages. L’accueil des propositions des élèves, l’organisation de la communication avec la classe et dans les sous groupes faite d’exigence, de règles acceptées, permet de mettre en scène notre proposition d’intégrer les visées éducatives et les progrès moteur.
Certes les savoirs pour enseigner en EPS comportent des données générales applicables à l’ensemble des APSA mais une grande partie d’entre eux appartient en propre à des champs spécifiques. Enseigner des contenus en faisant pratiquer de la danse contemporaine à une classe de collège par exemple suppose à n’en pas douter, d’autres savoirs que ceux qui permettent de conduire une leçon d’EPS en saut en hauteur.
Est-ce pour cette raison que peu d’enseignants parviennent à « entrer dans la danse » en enseignement de l’EPS ? A mettre en œuvre des formes de pratique de danse, et à enseigner des contenus propres à ce champ de pratique ?
Certes des interfaces existent entre ces savoirs mais des spécificités demeurent qui constituent probablement des obstacles.
Enfin pour circonscrire notre propos dans le cadre réduit de cet entretien, évoquons un ensemble de questions sur lesquelles il nous reste bien du travail d’étude à réaliser ! La question du rapport des savoirs à enseigner, des savoirs pour enseigner aux contenus de la formation initiale ; Les diverses orientations que doivent prendre les formations continues pour être autre chose qu’une information sur les attendus des derniers textes en vigueur
Cette partie de l’entretien concernant le « comment » achevée, on pourrait conclure non seulement les propos de ce dernier échange mais également l’ensemble des trois entretiens, en revenant sur ce qui vous paraît présenter dans vos propositions, une alternative aux propositions actuelles institutionnelle ou non, à la réalité des pratiques d’aujourd’hui dans leur diversité et leur complexité.
C’est ce qui fera l’objet du quatrième et dernier entretien que nous avons détaché, du fait de l’importance des contenus des réponses à ce thème et à leur actualité. Le CEDREPS pourra évoquer quelques alternatives aux matrices disciplinaires actuelles de l’EPS par exemple celles induite par le cadre actuel des programmes officiels d’EPS, ou celle présentée par des organisations professionnelles telles que le SNEP …
L’entretien avec le CEDREPS dans le mensuel 139
http://cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/eps/Pages/2013/139_1.aspx
L’entretien avec le CEDREPS dans le mensuel 140
http://cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/eps/Pages/2013/140_1.aspx
Sur le site du Café
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