Et si on regardait un peu plus loin, un peu plus large, en embrassant l’éducation de la petite enfance à l’âge adulte. L’éducation tout au long de la vie est une belle perspective oubliée. Le versant de l’école reste éclairé par les feux de l’actualité tandis que la rive de la formation continue demeure dans l’ombre, le flux entre les deux est un fil tenu. Pourtant, tout ne se joue pas dans l’enfance, apprendre est une nécessité qui se vit à tout âge, pour peu que les clés de l’apprentissage aient été tendues et saisies.
Le lien mine de rien est plus fort qu’il n’en a l’air. Les interrogations qui se posent se ressemblent. Comment rendre le savoir accessible à tous ? Quel avenir reconstruire pour ceux que la vie professionnelle a projeté dans la marge, ceux que les mois d’inactivité éloignent encore plus d’un quotidien que l’on pensait jusque là banal ? Au décrochage scolaire succède la maitrise insuffisante des savoirs de base. Et puis il y aussi les choix d’orientation, les changements de voie professionnelle, l’élaboration d’un projet. Des thèmes qui trouvent écho dans l’enceinte des collèges et des lycées.
La formation pour adultes a trouvé des solutions sur lesquelles la formation initiale se penche : approche par compétences, évaluation sans notes, par exemple. Elle a aussi investi les champs de l’éducation populaire avec des centres de ressources, la reconnaissance des savoirs informels, l’exploration des histoires de vie ou l’autoformation accompagnée. Elle a exploré les jeux sérieux, la formation ouverte à distance. Elle est, tout comme l’enseignement initial, confrontée aux restrictions budgétaires, aux variations territoriales. Elle est source de surinvestissements : on mise sur la formation pour conjurer la crise dans une illusoire adéquation des compétences entre l’offre et la demande d’emploi, pour donner corps à un traitement social du chômage, pour prévenir les risques de ne plus être dans les exigences évolutives de son propre poste.
Le dialogue entre formation initiale et formation scolaire parait souhaitable. Il semble difficile tant les tutelles sont éparpillées entre les ministères, de l’Education Nationale, du Travail et de l’Emploi, entre les niveaux territoriaux. Le paysage de la formation continue est une mosaïque composée de structures associatives, publiques, privées, à dimension variable. Instaurer une réflexion commune semble difficile, sauf si enseignement initial et formation pour adultes sauf si elles se côtoient dans une même enceinte.
L’enseignement agricole constitue l’exception avec dans ses établissements la présence des trois voies de formation : scolaire, apprentissage, continue. A la suite des assises de l’enseignement agricole, a été institué en 2011, un conseil de l’éducation et de la formation qui « constitue un lieu de rencontre et de réflexion partagée sur la pédagogie et la formation ainsi que sur la vie scolaire et les aspects éducatifs ». L’instance est nouvelle et progressivement, les établissements se l’approprient pour en faire un espace de dialogue entre enseignants, formateurs et direction. Il est sans doute trop tôt pour observer des réalisations concrètes émanant de ces conseils. Il n’empêche, en partageant des questions communes, en trouvant ensemble et en mettant en œuvre des réponses, la frontière s’estompe entre les âges de l’apprentissage et l’éducation tout au long de la vie prend forme.
Monique Royer
Décret instituant le conseil de l’éducation et de la formation