Carmen en 5ème
Le collège Victor-Hugo de Bourges, classé en Réseau réussite scolaire (ex-ZEP), accueille 580 élèves issus pour les deux-tiers de milieux sociaux défavorisés. « Difficultés d’appropriation des codes de vie en société », « faible conscience des enjeux de la scolarité », « déficit d’ambition », « difficultés au vivre-ensemble »… : face à ces constats, contre les résignations et les renoncements, Sébastien Montanari, professeur de français, a monté, avec deux classes de 5ème, en collaboration avec des enseignants de musique et d’arts plastiques, un projet ambitieux autour de Carmen. « Le projet, explique sur son blog le journaliste du Monde Frédéric Potet, durera deux années pleines. La première classe élaborera le livret, apprendra différents chœurs et réalisera la mise en scène. La seconde classe dessinera les décors et les construira en partie. »
On peut suivre ainsi en ligne les différentes étapes de cette belle aventure pédagogique, ses bonheurs et ses difficultés : séances d’analyse en classe des ressorts narratifs et psychologiques de l’opéra de Bizet, cours de chant, rencontre avec une cantatrice, ateliers théâtraux animés par un metteur en scène, voyage à Paris où les élèves assistent à une représentation à l’opéra Bastille … L’expérience conduit les collégiens vers un territoire artistique qui ne leur est a priori pas destiné, une ouverture culturelle qui développe des compétences variées. Elle s’avère émancipatrice à bien des égards, comme l’explique la principale Isabelle Guillamo : « On s’en rend compte au moment des choix d’orientation : beaucoup n’arrivent pas à se projeter. D’où l’importance de développer leur savoir-être. Et cela passe par de « belles rencontres ». L’approche du beau est un moyen de sortir de son quartier et des difficultés sociales qui vont avec. »
Le projet sue le blog de Stéphane Montarini
http://crise.blog.lemonde.fr/2012/12/19/carmen-version-zep-4-a-la-bastille/
« Ecritures de la terre »
Animé par Marie Marques, auteure et journaliste, le projet « Ecritures de la Terre » construit peu à peu « un livre autour du monde écrit par des adolescents », invités à explorer par l’écriture leur identité culturelle et à partager ces expériences du monde dans une production numérique commune. Il s’agit de favoriser « la participation des jeunes au sein de la société de l’information en leur offrant la possibilité de mettre en valeur leur patrimoine à l’aide de trois outils fondamentaux : la langue française, les arts premiers et traditionnels, le réseau Internet ». Le projet, à la fois littéraire et ethnographique, cherche ainsi, via des ateliers d’écriture, des recherches documentaires et des réalisations numériques, à abattre de nombreuses frontières, historiques, géographiques, culturelles, à explorer les ressemblances tout en s’enrichissant des différences.
Le livre présente d’ores et déjà le travail mené avec des lycéens de Guyane. Vincent Alzial, professeur de français au Lycée Gaston Monnerville, et coordinateur pédagogique des « Écritures de la Terre » de Kourou, en souligne ainsi la force créative et pédagogique : « Le besoin que cette jeunesse a de dire le monde qui l’entoure, avec ses mots à elle, est perceptible dans le constat que, sur les six jeunes de Kourou (Sheyenne, Merick, Comilla, Elodie, Evanson et Sylvine) qui sont allés jusqu’au terme de l’aventure proposée, aucun n’était particulièrement solide sur le plan scolaire. Et pourtant, nous assistons au final, à une bien jolie moisson dans laquelle chacun parvient à délivrer, au travers de textes très personnels, sa langue singulière et poétique. ». C’est aussi alors une belle leçon que donne le projet à tous les professeurs de français : « la nécessité d’ancrer davantage les élèves dans le réel au travers de la langue ». Vincent Alzial invite d’ailleurs tous les enseignants qui le souhaiteraient à prendre le relais pour que leurs lycéens habitent encore mieux leur lieu de vie et de culture, pour qu’ils participent à leur tour à l’enrichissement de ce livre singulier et universel.
Le Livre des « Ecritures de la Terre »
http://www.ecrituresdelaterre.net/
(Choisir Amazonie Équatoriale sur le planisphère, puis Kourou, puis se laisser porter …)
Des blogs sans frontières à Istanbul
« Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage »
(Joachim Du Bellay, 1558)
Abolir les frontières géographiques, culturelles, linguistiques et même didactiques, c’est l’enjeu du travail mené sur leurs blogs par les élèves du lycée Saint-Joseph d’Istanbul : les adolescents turcs y publient des textes divers pour s’approprier œuvres, genres, mouvements, codes, auteurs du patrimoine français ; ils développent leurs compétences dans le maniement de la langue de Molière en s’immergeant dans la plus haute littérature, en s’adonnant, artisanalement et numériquement, aux plaisirs de l’écriture et de la créativité.
Ce travail, en cheminement, est animé par Géraldine Larguier, professeure de français et coordinatrice, en collaboration avec ses différents collègues du lycée. On pourra découvrir par exemple des comptes rendus de lecture (Baudelaire, Camus, Japrisot …) enrichis de notes de vocabulaire, des contes et anti-contes, des faits divers insolites, des acrostiches, des affiches de cinéma originales, des nouvelles à chute, et même des sonnets, inspirés de Ronsard ou Du Bellay …
En l’occurrence, le déplacement pédagogique, c’est regarder ailleurs, mais ce peut être aussi regarder chez soi d’un autre point de vue, de l’intérieur d’une autre langue.
« Istanbul, mon amour dont je suis loin pendant la guerre ,
Sans lui mon cœur est cassé comme du verre . Elle seulement peut me sauver. »
(Melis Taşözü, élève de 10ème, 1993)
Le blog « Je publie donc je suis »
http://lewebpedagogique.com/sjniveau9/
Le blog « Bilinguisme, littérature et compagnie »