Par Laurent Piau
Tout d’abord, mois de janvier oblige, permettez-moi de vous adresser tous mes meilleurs vœux pour cette nouvelle année 2013.
Pour cette rubrique de janvier, nous allons étudier quelques questions pratiques en rapport avec la gestion des locaux et de la classe.
1) La responsabilité du Directeur d’école dans la mise à dispositions des locaux.
Deux situations se présentent :
– celle prévue par l’article L 212-15 du Code de l’Education :
« Sous sa responsabilité et après avis du conseil d’administration ou d’école et, le cas échéant, accord de la collectivité propriétaire ou attributaire des bâtiments, en vertu des dispositions du présent titre, le maire peut utiliser les locaux et les équipements scolaires dans la commune pour l’organisation d’activités à caractère culturel, sportif, social ou socio-éducatif pendant les heures ou les périodes au cours desquelles ils ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue. Ces activités doivent être compatibles avec la nature des installations et l’aménagement des locaux.
La commune ou, le cas échéant, la collectivité propriétaire peut soumettre toute autorisation d’utilisation à la passation, entre son représentant, celui de l’école ou de l’établissement et la personne physique ou morale qui désire organiser des activités, d’une convention précisant notamment les obligations pesant sur l’organisateur en ce qui concerne l’application des règles de sécurité, ainsi que la prise en charge des responsabilités et de la réparation des dommages éventuels.
A défaut de convention, la commune est responsable dans tous les cas des dommages éventuels, en dehors des cas où la responsabilité d’un tiers est établie. »
Ainsi, pour l’organisation d’activités à caractère culturel, sportif, social ou socio-éducatif pendant les heures ou les périodes au cours desquelles les locaux ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, le Conseil d’administration ou d’école émet un avis (son accord n’est donc pas obligatoire) et la convention avec le Maire est facultative.
Quant à la responsabilité du Directeur d’école, elle n’est pas engagée puisque l’introduction de de cet article du code de l’Education est ainsi rédigée : « Sous sa responsabilité … le Maire « .
– celle prévue par l’article L 216-1 du Code de l’Education :
« Les communes, départements ou régions peuvent organiser dans les établissements scolaires, pendant leurs heures d’ouverture et avec l’accord des conseils et autorités responsables de leur fonctionnement, des activités éducatives, sportives et culturelles complémentaires. Ces activités sont facultatives et ne peuvent se substituer ni porter atteinte aux activités d’enseignement et de formation fixées par l’Etat. Les communes, départements et régions en supportent la charge financière. Des agents de l’Etat, dont la rémunération leur incombe, peuvent être mis à leur disposition.
L’organisation des activités susmentionnées est fixée par une convention, conclue entre la collectivité intéressée et l’établissement scolaire, qui détermine notamment les conditions dans lesquelles les agents de l’Etat peuvent être mis à la disposition de la collectivité. »
Dans cette situation concernant les activités éducatives, sportives et culturelles facultatives complémentaires organisées dans les établissements scolaires pendant leurs heures d’ouverture, la Convention entre la collectivité territoriale et l’école est obligatoire et les accords préalables du Conseil de l’école et du Directeur requis.
L’introduction de l’article L 212-15 « Sous sa responsabilité …le Maire » n’étant pas reprise dans cet article 216-1, le Directeur d’école est responsable du bon déroulement de ces activités.
Pour information, sont considérées comme activités de formation : Les heures de classe ou de cours (y compris les enseignements de langue et culture nationales et les actions de formation continue), les réunions des conseils de classe, des conseils d’enseignement, des équipes pédagogiques, du conseil d’établissement, du comité de parents d’élèves, du conseil des maîtres ou du conseil d’école, les réunions syndicales, les réunions tenues par les associations locales de parents d’élèves qui participent à la vie de l’établissement, les activités qui, en raison de leur intérêt pour les élèves et leur famille, sont assimilables à des actions de formation, à savoir les réunions d’information sur les métiers qui se déroulent dans les établissements du second degré au titre de l’orientation scolaire et professionnelle, ainsi que les réunions consacrées aux prêts et bourses de livres.
2) La gestion des déplacements des élèves dans l’établissement
Dans le primaire, ces déplacements sont sous la seule responsabilité du professeur entre le moment où les élèves ont été confiés au maître et le moment où ce dernier les remet aux parents ou aux personnes qu’ils auront désignés par écrit pour les élèves de l’école maternelle.
Quant à la surveillance des récréations, elle est de la responsabilité du directeur qui organise les services de surveillance des professeurs de l’école.
Dans le secondaire, les déplacements des élèves entre les heures de cours et les pauses sont sous la responsabilité du Chef d’établissement, mais durant les heures de cours, les déplacements se font sous la seule responsabilité du professeur en charge de la classe.
C’est pourquoi, il est fortement recommandé de faire accompagner un élève qui quitte la classe par un délégué de classe ou un élève mature. En cas de doute sur la capacité de l’élève accompagnateur à amener l’élève jusqu’à sa destination finale, il ne faudra pas hésiter à envoyer chercher un conseiller principal d’éducation afin qu’il prenne en charge l’élève à accompagner.
Ce sera, une fois encore, la seule condition du dégagement de votre responsabilité en cas d’accident, de fugue, etc.
3) L’organisation des activités scolaires extérieures
Toute sortie scolaire doit être autorisée par le Chef de service ou le supérieur hiérarchique et, selon les cas, l’autorisation des parents est obligatoire.
Dans le premier degré, la sortie occasionnelle de jour est autorisée par le Directeur mais la sortie avec découché est autorisée par l’Inspecteur d’Académie. Lorsque la sortie scolaire à lieu en partie ou en totalité sur le temps scolaire, une assurance responsabilité civile et l’accord écrit des parents est obligatoire.
Il est de votre responsabilité de vérifier que ces deux conditions sont remplies.
Dans le second degré, le Conseil d’Administration est consulté si une participation financière est demandée aux familles, mais c’est le Chef d’établissement qui délivre l’autorisation de sortie et qui en assume la responsabilité. Néanmoins, cela ne saurait en aucun cas dégager votre responsabilité pénale en cas de faute grave et manifeste.
L’autorisation des parents est obligatoire pour les seuls élèves mineurs. Cela étant, je vous conseille de demander aux élèves majeurs de signer une attestation par laquelle ils déclareront assumer l’entière responsabilité de leurs actes et par laquelle ils s’engageront à suivre vos ordres et consignes lors de cette sortie.
Les déplacements extérieurs sont toujours encadrés au collège ; mais le règlement intérieur peut prévoir que s’ils ont lieu au début ou en fin de demi-journée, les élèves puissent s’y rendre seuls si leurs parents ou représentants légaux les y ont autorisés.
Vérifiez que ces deux conditions sont remplies.
Quant aux internes et aux demi-pensionnaires, ils sont toujours nécessairement encadrés.
Au lycée, le règlement intérieur peut prévoir que tous les déplacements pour se rendre à une activité scolaire se feront individuellement, sans encadrement et sous la seule responsabilité des représentants légaux.
Néanmoins, je vous conseille, une fois encore, de faire signer une décharge aux parents que vous ferez enregistrer par l’établissement.
N’utilisez jamais votre véhicule personnel pour transporter des élèves.
Pour les sorties utilisant les services d’un transporteur, vérifiez que ce dernier est bien inscrit au registre préfectoral.
Les échanges scolaires avec un établissement étranger sont toujours soumis à la conclusion d’une convention entre les deux établissements, à son approbation par le Conseil d’Administration et à l’autorisation du Recteur d’académie.
Vérifiez donc que toutes ces autorisations sont en règles.
Assurez-vous, avant le départ, que les élèves mineurs sortant du territoire national sans leurs représentants légaux sont en possession d’une autorisation parentale de sortie du territoire ou d’une autorisation collective délivrée par la préfecture et de leur document individuel d’identité (Carte nationale d’identité ou passeport).
Vérifiez que les élèves ont tous une assurance responsabilité civile et individuelle accident pour les sorties facultatives, les sorties avec découché et les échanges internationaux. Tous les accompagnateurs vérifieront également qu’ils possèdent bien une assurance responsabilité civile et individuelle accident qui les couvre en cas de difficulté.
N’acceptez pas de gérer des sommes d’argent sans un ordre écrit du Chef d’établissement.
Ne servez pas d’intermédiaire entre les élèves et l’établissement ou entre l’établissement et des tiers sans ordre écrit, surtout lors de l’organisation de voyage à l’étranger. En effet, est considéré comme organisateur de voyage, et donc responsable pénalement et civilement du bon déroulement de celui-ci, toute personne qui prend les inscriptions, qui collecte les fonds, qui règle les dépenses et au nom de laquelle les factures sont établies.
Evitez donc de cumuler plus de deux de ces conditions d’engagement de votre responsabilité.
Faites attention au taux d’encadrement qui est fonction du niveau des classes et du type d’activité et refusez de participer à un voyage ou une activité si ce taux n’est pas atteint. C’est en effet un facteur de risque supplémentaire et un moyen supplémentaire pour engager votre responsabilité pénale et civile.
Enfin, gardez à l’esprit que le juge requiert des enseignants qu’ils gèrent cette notion de sécurité dans la pratique des activités enseignées « en bon père de famille », c’est-à-dire selon une norme de sécurité communément admise dans la société civile, même s’il faut bien l’admettre, cette norme est pour le moins floue et fluctuante selon les époques.
Une dernière remarque trop souvent oubliée : les professeurs accompagnant des élèves à l’étranger lors des échanges interscolaires peuvent être remboursés par l’Administration de leurs frais de voyage mais pas de leurs frais de séjour et les élèves n’ont, en principe, pas à supporter ces derniers. Il faut donc trouver un compromis, si possible par écrit.
4) La gestion des ateliers et les laboratoires
La définition légale de l’atelier comprend les locaux généralement désignés sous ce terme mais aussi les salles de physique, les laboratoires de chimie et le laboratoire de cuisine.
Les articles D 4153-20 à D 4153-40 du Code du Travail prohibent l’utilisation des machines ou des appareils dangereux et la manipulation de produit dangereux par les mineurs.
Néanmoins, les articles D 4153-41 à D 4153-47 de ce même code prévoient une dérogation pour les élèves des établissements d’enseignement professionnels et techniques.
Cette autorisation annuelle de manipulation de ces machines ou produits dangereux est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail, à celle du médecin scolaire et à celle du professeur en charge de l’enseignement dans l’atelier.
Un des objectifs de cette autorisation est de vous impliquer dans le processus de contrôle des capacités des élèves. En effet, si l’inspecteur du travail peut vérifier la conformité des matériels et des locaux, si le médecin scolaire peut vérifier la santé physique de l’élève, c’est le professeur qui est, semble-t-il, le plus à même de juger du degré de maturité et de responsabilisation d’un élève.
Or, cette autorisation doit être donnée en début d’année scolaire et, en ce début d’année, il est parfois très difficile de cerner le comportement d’élèves que l’on ne connaît pas.
C’est pourquoi, vous ne devez pas hésiter à donner votre autorisation avec des réserves, voire la refuser si le comportement d’un élève vous semble inadapté au travail en atelier.
Certes, vous deviendrez immanquablement la cible de pressions de la part de votre hiérarchie ou des parents de l’élève, et d’autant plus que votre avis pourra justifier le refus de l’Inspection du travail d’accorder son autorisation.
Mais, cela ne sera rien à côté des tracas judiciaires qui vous attendent si vous signez une autorisation à un élève dont le comportement est manifestement inadapté à la manipulation de machines, d’appareil ou de produits dangereux si cet élève devait, par la suite, être à l’origine d’un accident grave causé à un tiers ou à lui-même.
Le problème des élèves réglé, il vous faudra aussi vérifier que l’organisation des ateliers offre de bonnes conditions de réalisation des activités que vous allez enseigner.
Ainsi, une salle de chimie prévue pour une demi-classe n’est pas adaptée à un cours en classe entière et représente donc un facteur de risque. Si c’est le cas, signalez immédiatement par écrit le problème à votre Chef d’établissement qui assumera alors la responsabilité de vous laisser ou non dans ce local manifestement inadaptée sur le plan de la sécurité.
Vérifiez la conformité ainsi que le bon état du matériel et des équipements que les élèves vont utiliser. Certes, c’est de la responsabilité du Chef d’établissement, mais, au regard de vos connaissances techniques de professeur, cela ne saurait dégager votre responsabilité.
En effet, en cas d’accident causé par une défectuosité fortuite, cette vérification préalable aura pour effet de dégager tout ou partie de votre responsabilité si vous avez fait un rapport écrit au Chef d’établissement et lui avez demandé qu’il fasse procéder à la remise en état du matériel défectueux dont, bien sûr, vous ne ferez pas usage avant cette réparation.
Vérifiez que les produits dangereux sont tous correctement étiquetés, que les notices de précautions d’emplois sont bien visibles, et que les photocopies des manuels d’utilisation des machines ou des appareils sont rapidement et facilement accessibles aux élèves.
Assurez-vous que les déchets résultant de l’activité sont bien éliminés avant la fin du cours et qu’ils ne sont pas emportés par les élèves pour des utilisations à d’autres fins en d’autres lieux.
Insistez, lors de la phase préparatoire au déroulement d’une activité, sur les précautions d’usage et les consignes de sécurité à respecter lors de la manipulation des objets dangereux susceptibles de blesser. N’hésitez pas à faire figurer par écrit ces consignes dans votre dossier élève surtout dans le cas des activités pratiquées en atelier durant lesquelles les élèves sont dans des situations de travail autonome.
Vérifiez que les élèves portent bien tous leurs équipements de sécurité et qu’ils respectent les consignes de sécurité.
Soyez particulièrement vigilant lorsque les élèves découvrent pour la première fois une activité nouvelle. N’hésitez pas à montrer comment assurer la tâche confiée et assurez-vous dans les faits qu’ils savent s’en acquitter en toute sécurité. N’hésitez pas à faire surveiller les élèves les plus étourdis par un camarade plus mûr, mais ne vous déchargez pas de votre responsabilité de surveillance sur ce dernier.
Enfin, rappelez-vous que lors des stages ou périodes en entreprises, les élèves ne sont pas sous votre responsabilité mais sous celle conjointe de l’établissement et de l’entreprise.
Laurent Piau, juriste, est l’auteur de l’ouvrage Le Guide juridique des enseignants aux éditions ESF
Sur cet ouvrage :
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lexpres[…]
Pour commander :
http://www.esf-editeur.fr/index.php?content=prod[…]</< P> A>
Sur le site du Café
|