Maire adjointe du Pré Saint-Gervais (93) et déléguée générale d’Ecoles Internet, Anna Angeli a une connaissance concrète de l’intégration du numérique dans l’éducation. Elle décrit les freins rencontrés au quotidien pour l’intégration du numérique dans les écoles. Et aussi ses espoirs dans le programme Peillon. Avec une mise en garde : dans le 93, ces espoirs ne doivent pas être déçus.
Dans votre vie d’élue, quels freins rencontrez-vous pour l’intégration du numérique à l’école ?
Il y a de vraies réticences chez certains enseignants. Il faut choisir les équipements en concertation avec eux et prévoir les besoins de formation. Mais il y a aussi des freins dans les services municipaux qui doivent prendre en charge la maintenance de nouveaux matériels alors que les effectifs n’augmentent pas et que les budgets ne sont pas extensibles. La solution sera sans doute de mutualiser la maintenance dans l’agglomération et d’intégrer davantage de maintenance en ligne. Certains élus, peu au fait du numérique, peuvent aussi freiner le mouvement.
Au Pré Saint-Gervais diriez vous que vos efforts d’équipement ont un impact sur le niveau scolaire des enfants ?
Les inspecteurs de l’éducation nationale nous disent qu’il y a un impact sur les résultats. Les professeurs de collège nous disent leur surprise de voir des élèves à l’aise avec les TBI, aller spontanément au tableau. Les blogs de classe incitent les enfants à écrire. Enfin cela déborde sur les familles où les enfants transmettent ce qu’ils savent faire. On voit aussi les enseignants s’emparer du TBI pour un usage quotidien, co-construire des séquences avec les élèves. C’est pourquoi on va continuer en 2013. On commence à équiper en TBI et en tablettes les maternelles. On les teste dans le cadre de vrais projets pédagogiques. On va aussi renforcer les « cyberbases », des EPN installés dans les écoles.
Quel regard jetez-vous sur la « stratégie » numérique de Vincent Peillon ?
Je suis très encouragée par ces nouveaux dispositifs, la nouvelle gouvernance et la reconnaissance des différents acteurs que l’on trouve dans ce programme. La prise en considération des collectivités territoriales dans la mise en place des équipements me parait une bonne chose.
Maintenant si je considère qu’un dispositif national est une bonne chose, j’insiste sur le fait qu’il faut aussi travailler sur la décentralisation et s’intéresser aux acteurs de proximité. Par exemple les pistes financières décrites par le ministre, le FEDER par exemple, ne sont pas à la portée d’une collectivité moyenne. Les dossiers sont trop techniques. Il faudra trouver une échelle, celle de l’agglomération ou du département, pour pouvoir en bénéficier.
Globalement je suis pleine d’espoir. Je vois avec bonheur s’instituer un dispositif nationale de concertation. J’espère qu’il sera décentralisé. De toutes façons, il faut réussir cette réforme. On ne peut plus se tromper. C’est particulièrement net dans le 93 où les enseignants ont été si malmenés, où l’Etat nous a abandonné. On est à cran.
Propos recueillis par François Jarraud