Par François Jarraud
SOMMAIRE
- Bruno Devauchelle : Les fournitures scolaires à l’ère du numérique
- Le règlement intérieur à l’ère du numérique
- Peut-on enseigner avec des mobiles ?
Quelle place pour le numérique à l’école ? Bruno Devauchelle montre comment le numérique se heurte aux usages de l’école…
Bruno Devauchelle : Les fournitures scolaires à l’ère du numérique
La publication d’une circulaire à destination des parents au BO du jeudi 23 aout 2013 fait apparaître un volet spécifique aux fournitures scolaires dont le détail est spécifié en annexe à la circulaire. Pas de surprise dans cette liste, aucune référence aux technologies numériques d’information et de communication, mais uniquement les références papier crayon. Or au moment où le numérique fait de plus en plus question dans le quotidien de la vie des jeunes et de leurs familles, on constate que celui-ci est absent de la totalité de ce texte. Cette absence est étonnante au moment où (même si cela a été fait sous l’impulsion législature précédente) le socle commun, les bulletins scolaires, le cahier de texte sont en train de se numériser et les ENT en train de se déployer. Cahiers, agendas papiers, cahiers de textes et crayons ont donc encore de belles journées devant eux !
Or, à cette rentrée, dans la suite de précédentes, de plus en plus de jeunes seront dotés d’ordinateurs portables, de netbook ou de tablettes numériques à la rentrée à l’initiative soit des établissements eux-mêmes, soit des collectivités territoriales. Dès lors, peut-on imaginer, à terme, la disparition, au moins partielle, de cette liste de fournitures scolaire dont le coût et l’usage ne cessent d’être interrogés. D’aucuns ajouteront aussi le poids des cartables, question récurrente, et rarement résolue dans le contexte « papier » du monde scolaire. Le développement des usages sociaux du numérique ne semble en tout cas pas beaucoup modifier les rituels scolaires de la rentrée, livres, fournitures etc…
Une analyse économique un peu rapide peut amener à penser qu’il y a uniquement des industries, des emplois, des profits à préserver. On assisterait ainsi à la prolongation des débats sur la musique, le livre, à savoir l’évolution de la chaîne de production distribution de ces outils et contenus. Les défenseurs des droits d’auteurs auront tôt fait de reporter sur le livre numérique le prix du livre papier (ce que la loi du 17 mai 2011 précise partiellement) fabrication et distribution comprise. De même les marchands de fournitures scolaires auront vite compris le risque du numérique et pousseront les partisans des méthodes papiers crayons à aller sur le devant de la scène et attiseront les débats en milieu scolaire sur le travail « manuel » des élèves. Mais tout ceci nous éloigne de deux problèmes essentiels : celui de la culture et celui de l’apprentissage qui sont sous jacents à ces questions
La culture à l’ère du numérique marque le quotidien de chacun de nous. Les fournitures scolaires sont un des symboles les plus visibles de la culture du papier/crayon. Les parents soucieux de l’avenir de leurs enfants se demandent depuis de nombreuses années si l’informatique n’est pas un des moyens de leur garantir un emploi. Les comportements d’achats observés depuis longtemps montrent qu’il y a une corrélation, au moins symbolique, voire imaginaire, entre la situation sociale et l’ordinateur, et indirectement que la maîtrise de cette machine entre dans ce que les adultes pensent qu’il est nécessaire de connaître pour un jeune. Le développement des équipements numériques personnels et de plus en plus mobiles, les smartphones faisant partie désormais de la panoplie du lycéen, dérange chaque jour un peu plus l’organisation scolaire. Après avoir touché la salle de classe, ils touchent désormais les temps d’examens…. En se pliant au rituel des fournitures scolaires, marronnier bien connu des médias en fin aout, les familles, les associations, les établissements scolaires, les ministres, reproduisent, sans même parfois y penser davantage, l’acceptation du pouvoir de l’écrit manuscrit sur le monde scolaire. C’est un allant de soi, incontestable et incontesté et surtout pas remis en question.
De quoi a-t-on besoin pour apprendre ? Si l’on en juge par cette actualité : de papier, de crayons et de livres. Est-ce suffisant ? Non bien sur, il faut aussi des enseignants, et l’école est obligatoire ? Mais alors, à quoi servent les ordinateurs et ces objets numériques que tout le monde utilise tout le temps ? La conception dominante de l’apprentissage est d’abord celle d’une école, ses salles de classes, ses enseignants, ses tables, les crayons et les papiers. Mais là, il y a quand même eu une véritable révolution technologique. Jeune élève dans les années 1960, il m’est souvent arrivé, au grand plaisir de me délasser les jambes, d’avoir à remplir les encriers de la classe. Très vie le baron Bich avait créé un objet infernal qui allait révolutionner la classe et l’art d’écrire. Puis on a vu se succéder les différentes sortes de crayons automatiques et même les effaceurs de ces écritures manuscrites, évitant les sales ratures qui faisaient avoir de mauvaises notes. Oui les outils pour écrire ont fait leur révolution, mais pas numérique. La grande révolution des fournitures pour apprendre a été celle de la calculatrice électronique venue remplacer la règle à calcul qui elle-même avait déjà posé question. Certains ont déclaré et déclarent encore que, plus de 30 années après son arrivée progressive dans les classes, on ne saurait plus faire de calcul. N’est-ce pas là un des plus explicites exemples de l’irruption du numérique dans les fournitures ? Certes la calculatrice numérique n’est pas dans la liste du ministère mais elle embarrasse bien dans les établissements scolaires qui l’utilisent parce qu’ils n’ont pas assez d’ordinateur pour tous…
En cette période de rentrée des classes, on peut interroger cette question des fournitures scolaires à une époque où de plus en plus de lieux parlent de « zéro papier« , à une époque où l’on arrive pas encore à remplacer les livres par leur version numérique (nombre de témoignages récents parlent de grandes difficultés de mise en oeuvre), à une époque ou chaque jeune accède à Internet à l’ordinateur et où il doit continuer de rendre la plus grande partie de ses travaux sur feuille de papier manuscrite. Le rituel des fournitures scolaires sera, dans les années à venir et pour chaque établissement un des bons indicateurs de la place donnée au numérique dans l’enseignement. Mais qui va payer les ordinateurs ? Entre 150 et 200 euros (minimum) semblent être consacrés à ces fournitures traditionnelles d’après les associations et le ministère. On pourrait imaginer que la machine numérique fasse partie de ces fournitures. Mais cette fois pas besoin de l’acheter chaque année, au collège il pourrait être gardé quatre années et sa charge financière aussi. Mais est-ce aux familles de payer ces machines (comme l’ont fait certains établissements privés sous contrats) ? Certains diront non ! Alors pourquoi faire payer les fournitures scolaires aux familles ? Le débat est à reprendre, à la rentrée prochaine…
Bruno Devauchelle
En appui à cette chronique, cet article…
http://www.vipad.fr/post/ipad-obligatoire-a-l-ecole
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- Bruno Devauchelle : Les fournitures scolaires à l’ère du numérique
- Le règlement intérieur à l’ère du numérique
- Peut-on enseigner avec des mobiles ?
Le règlement intérieur à l’ère du numérique
Le règlement intérieur de l’établissement c’est d’abord un texte que les parents d’élèves et parfois l’élève signent en début d’année, mais qu’ils ne lisent que rarement (un peu comme les contrats d’assurance et autres contrats d’achats de logiciels par exemple). C’est aussi un texte dont on retrouve l’existence dès lors qu’une situation « rare » nous amène à y regarder de plus près : accident, sanction, etc. Mais c’est surtout un texte qui « encadre » les activités de l’établissement scolaire et en particulier celles des élèves (mais pas seulement). Comme toute entreprise de plus de vingt salariés se doit d’avoir un règlement intérieur, on comprend qu’un établissement scolaire ou universitaire en ait un, aussi bien pour les élèves que pour les enseignants et les personnels éducatifs, administratifs et de service…
Charte ou pas charte ?
Avec le développement de l’informatique et plus généralement du numérique, le règlement intérieur est soumis à deux interrogations :
– Doit-il y avoir un volet spécifique pour le numérique ou faut-il faire une charte particulière (http://eduscol.education.fr/internet-responsable/les-tic-et-lecole/mettre-en-place-un-cadre-reglementaire/elaborer-une-charte-utilisateur.html, comme le ministère de l’éducation le suggère)?
– Faut-il rendre « numérique » le règlement intérieur pour en favoriser l’utilisation et la compréhension ? La particularité du numérique est qu’il génère très rapidement de nouveaux comportements aussi bien des jeunes que des adultes et qu’il faut alors adapter constamment le règlement à ces évolutions.
En premier lieu, on observe que de plus en plus d’établissement développent des chartes informatiques, voire davantage. Depuis maintenant plus de trente années que les ordinateurs ont fait leur irruption dans les salles de cours, dans des salles spécialisées ou dans les CDI, les responsables de ces équipements ont tenté d’en contrôler les usages. Tant que le matériel et le logiciel ne permettaient pas d’interconnexion avec l’extérieur de l’établissement, l’organisation interne était relativement simple. Les principaux problèmes rentraient le plus souvent dans le cadre de la dégradation ou du vol. Avec l’arrivée d’Internet, la multiplication des équipements, les règlements intérieurs se sont enrichis soit d’une charte annexée, soit carrément d’un volet spécifique au sein même du règlement. Avec le développement des équipements personnels, et en premier lieu les téléphones portables et désormais les smartphones, les paragraphes spécifiques à ce thème se sont multipliés.
Règlement et réseau social
Les responsables informatiques des établissements (et aussi des rectorats ou des collectivités territoriales) sont le plus souvent très vigilants sur les notions de sécurité, contrôle et filtrage. Certains vont même au delà des règlements intérieurs et édictent des règles, basées sur des outils les mettant en œuvre. Mais très souvent ces règles créent des frustrations dans les établissements et certains tentent de les contourner. Aussi, la responsabilité de chacun est engagée et en particulier celle du chef d’établissement. C’est pourquoi les règlements intérieurs s’enrichissent de plus en plus souvent de paragraphes et d’annexes pour tenter de cadrer les pratiques. Qu’elles soient techniques ou juridiques, les règles et les restrictions sont souvent (toujours) contournable et aussi contournées. L’exemple des téléphones portables l’illustre bien comme le montre ce film de Curiosphère (http://www.curiosphere.tv/video-documentaire/17-education-aux-medias/108989-reportage-media-lycee-le-telephone-portable-et-les-jeunes). Mais bien plus encore, les enseignants eux-mêmes sont souvent en difficulté par rapport à ces règlements intérieurs et encore davantage à ces règles souterraines qui contraignent les usages du numérique.
C’est le deuxième aspect de la question du règlement intérieur à l’ère du numérique. Il est évolutif et de plus en plus interrogé par les évolutions technologiques. L’une des pistes est de « numériser » le règlement. Non il ne s’agit pas du PDF téléchargeable sur le site de l’établissement ou sur l’ENT. Il s’agit plutôt de penser l’insertion de parties du règlement intérieur au cœur de la communication numérique. Ainsi l’élève qui se trouve confronté à ce règlement ne recevrait pas ces messages froids et laconiques du style « site interdit par l’administrateur » mais plutôt une invitation au dialogue autour de l’action qu’il souhaite mener et qui est interdite par le règlement. Pour aller plus loin et pour ne pas se limiter aux questions informatiques, il pourrait être intéressant qu’en lieu et place de ce catalogue, un peu inventaire à la Prévert on réfléchisse à mettre en place une documentation dynamique et interactive autour des règles posées.
Passer d’une vision statique à une vision dynamique pour favoriser une meilleure compréhension, c’est une piste qui pourrait être creusée dans une dimension éducative. Un règlement intérieur est d’abord un outil éducatif, or sa forme ne favorise pas cette dimension. De plus de par sa modalité de rédaction et de validation (CA, Direction), de mise en œuvre, il risque fort de manquer un objectif : associer les élèves à la dynamique éducative plutôt que de simplement les restreindre au cadre fixé par les adultes. Les assemblées d’élèves dans certains établissements ont montré combien les règles de vie ont besoin d’être travaillées. Or souvent elles sont lues à la première heure de l’année, signées et mises dans le carnet de correspondance, espérant qu’elles ne seront jamais mises en application (en particulier pour leur aspect répressif).
Le développement des outils de réseaux sociaux au sein même des ENT ou en dehors pourrait être une opportunité de faire vivre le règlement intérieur et d’en faire un des dispositifs éducatifs de l’établissement. En observant l’évolution des pratiques numériques des jeunes on peut facilement penser que des changements et des débats s’opéreront autour de ces règles. Imaginer une « vie numérique » pour le règlement intérieur est peut-être une piste à explorer en ce début d’année qui est souvent l’occasion de ces litanies vite oubliées….
Bruno Devauchelle
Les fournitures scolaires à l’ère numérique
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2012/08/31082012Article634819765114004138.aspx
SOMMAIRE
- Bruno Devauchelle : Les fournitures scolaires à l’ère du numérique
- Le règlement intérieur à l’ère du numérique
- Peut-on enseigner avec des mobiles ?
Peut-on enseigner avec des mobiles ?
Dans la plupart des établissements, l’usage du téléphone portable en cours est interdit. Pourtant les mobiles peuvent être aussi des outils pour enseigner. C’est ce qu’a voulu montrer et évaluer l’Unesco qui publie une étude sur « apprendre avec les mobiles en Europe ». Elle met en évidence les difficultés à intégrer le smartphone dans la salle de classe.
Les lecteurs du Café connaissent déjà des pratiques pédagogiques utilisant le mobile en classe. A titre d’exemple, Jérome Staub a montré comment faire faire réellement de la géographie à des collégiens en utilisant la fonction GPS des smartphone et une application de mesure du son au profit d’une véritable leçon d’aménagement urbain.
L’étude de l’Unesco recense assez peu d’applications du mobile pour l’enseignement en Europe. Pour la France et l’enseignement scolaire (car la plupart des exemples sont dans le supérieur), il cite Wapeduc, un pionnier qui depuis 2005 met des cours et des tests accessibles aux élèves gratuitement. Un autre exemple intéressant est Priory School, au Royaume-Uni. David Rogers est lui aussi un professeur de géographie et, comme J. STaub, il utilise avec intelligence les capacités des smartphones pour con enseignement. On peut également citer Envigame, un projet qui utilise le GPS des smartphones pour des enquêtes locales sur l’environnement.
L’étude montre que cet enseignement peut être efficace et qu’elle peut motiver les élèves. Elle montre aussi les freins. Pour que les mobiles servent l’enseignement il faut biens sur une bonne couverture du territoire national et des tarifs qui ne soient pas trop élevés. Mais l’enquête insiste surtout sur les blocages culturels. L’institution scolaire renacle un peu partout en Europe à l’usage des mobiles dans les écoles. Il y a là à l’évidence un obstacle difficile à sauter.
F. Jarraud
L’étude
Le travail de J Staub
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2011/05/17ForumPaysagessonores.aspx
Pourquoi demander aux élèves d’apporter leur ordinateur à l’école ?
C’est la tendance en ce moment aux Etats-Unis. Plutôt qu’acheter de nouveaux ordinateurs, on invite les élèves à apporter le leur et on met en place une technologie de connexion qui s’adapte à tous les systèmes même périmés. Sur son blog Med Kharbach, un enseignant canadien, retient plusieurs avantages : les dépenses de matériel informatique baissent fortement et cela permet de refinancer des programmes de soutien disparus. M Kkarbach signale aussi que le matériel amené par les étudiants est parfois plus avancé et dans tous les cas directement disponible ce qui n’est pas forcément le cas de la salle de classe ordinaire.
L’article
http://www.educatorstechnology.com/2012/07/what-teachers-need-to-know-about-byod.html
Microsoft met une partie d’Office 365 gratuitement à disposition de l’éducation
Conçue pour l’entreprise, Office 365 est mis partiellement à disposition du monde éducatif. Les établissements d’enseignement et leurs acteurs (élèves comme enseignants) peuvent bénéficier gratuitement des services de messagerie (classique et en instantané), d’applications bureautique (Word, Excel, Powerpoint) et d’un outil de conférence en ligne. D’autres applications, comme la suite bureautique complète) restent payantes. Office 365 est utilisable sur tablettes et portables. Elle permet de monter et suivre des projets collaboratifs ou encore de partager des cours.
Découvrir l’offre
http://www.microsoft.com/fr-fr/office365/education/compare-plans.aspx#fbid=HsBtYLgrRUS
Sur le site du Café
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